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Les indispensables conseils pour mener le colza à sa réussite

Après une longue moisson interrompue par les fréquentes pluies durant près de 20 jours, et terminée depuis peu, le moment est venu de s’intéresser au semis de colza d’hiver. Cette culture aux atouts bien connus en tant que piège à nitrates et assurant une bonne couverture du sol contre l’érosion, permet aussi, dans le cadre de la nouvelle Pac d’application depuis le 1er janvier 2023, d’activer l’éco-régime « couverture longue du sol », à condition de couvrir au minimum 70 % des surfaces de cultures arables (d’hiver et de printemps).

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Agronomiquement, le colza d’hiver constitue une bonne tête de rotation permettant une diversification des cultures. Il est surtout un bon précédent pour les céréales, avec de bonnes restitutions, et il libère le sol tôt en été pour des semis céréaliers précoces. De plus, la quantité de matière organique formée par les plantes et restituée au sol contribue à augmenter la quantité de carbone dans le sol (amélioration de la teneur en humus). De par son système racinaire pivotant, le colza d’hiver améliore également la structure du sol. Enfin, c’est une culture bien adaptée à nos sols et à notre climat qui subit des changements importants.

Un renouvellement variétal rapide

Suite aux nombreuses précipitations de cet été (jusqu’à 150 l/m² en cumulé), la sécheresse des sols observée en juin s’est maintenant éloignée. Les conditions météo, annoncées sans pluie, seront favorables à l’implantation du colza d’hiver.

Agronomiquement, ce colza d’hiver constitue une bonne tête  de rotation. Le semer permet de diversifier les cultures.
Agronomiquement, ce colza d’hiver constitue une bonne tête de rotation. Le semer permet de diversifier les cultures. - Cepicop

Le choix variétal reste important et le renouvellement des variétés est rapide, signe d’un réel dynamisme de la sélection génétique en Europe. L’offre en Belgique est intéressante avec des variétés très récentes, à haut potentiel de rendement et à bonne résistance aux maladies fongiques et virales.

En effet, les efforts des sélectionneurs se sont portés ces dernières années sur la résistance au phoma, avec un ou plusieurs gènes de résistance, sur la tolérance au virus de la jaunisse du navet (TuYV) transmis par le puceron vert, ainsi que sur la résistance à l’égrenage avant la récolte.

La majorité des variétés actuelles sont des hybrides restaurés. Il subsiste quelques lignées. Les premières variétés de type TuYV sont arrivées en 2017 avec Architect et Angelico. Aujourd’hui, 20 variétés TuYV sont commercialisées en Belgique.

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La désinfection, une protection au démarrage

La désinfection des semences a également connu un bouleversement durant ces dix dernières années, depuis le moratoire européen de 2013 interdisant l’usage des néonicotinoïdes en désinfection des semences de colza.

Auparavant, celles-ci étaient désinfectées avec un fongicide et un insecticide afin de protéger les jeunes plantules contre les fontes de semis, le mildiou et les premières attaques d’insectes (altises). Depuis 2013, seule une désinfection fongicide ou aucun traitement n’était appliqué sur les semences. Quelques pays européens ont reçu des dérogations annuelles pour pouvoir désinfecter les semences, alors que d’autres continuent à interdire l’utilisation d’insecticides.

En Belgique, les premières variétés de colza désinfectées avec un nouvel insecticide sont apparues en 2021. En 2023, les variétés sont non traitées ou désinfectées, soit uniquement avec un fongicide, soit en combinaison avec un insecticide, ce qui assure aux jeunes plantes un bon démarrage et une bonne protection.

Les maisons de sélection ont généralement fait un choix dans les produits de désinfection autorisés en Europe. L’Integral Pro, à base de la bactérie Bacillus amyloliquefaciens est un biofongicide, stimulateur des défenses naturelles. Le Scenic Gold est un fongicide à base de fluopicolide et de fluoxastrobine, permettant de lutter contre le phoma, l’alternaria, le mildiou et le rhizoctonia.

Le Lumiposa est un insecticide à base de cyantraniliprole protégeant les jeunes stades de la culture contre les attaques d’altises, de mouche du chou et de tenthrède de la rave. Le Buteo Start est un insecticide à base de flupyradifurone protégeant les premiers stades du colza contre les attaques d’altises.

La variété DK Placid, disponible pour la seconde année, permet de lutter contre la hernie du chou qui est une maladie encore rare mais grave car elle provoque le développement d’une tumeur au niveau racinaire et perturbe le bon fonctionnement de la plante. Cette maladie est très courante au Canada. La solution génétique est la meilleure mais elle doit également être accompagnée de précautions pour éviter la propagation de cette maladie d’une terre infestée vers une autre.

Surveiller les insectes, même en présence d’un couvert

Des couverts associés au colza seront réservés aux parcelles à faible salissement. Les semences de plantes compagnes de la famille des légumineuses (trèfle d’Alexandrie, fénugrec, vesce, trèfle blanc…) peuvent être associées lors du semis, aux semences de colza. La féverole, avec de plus grosses graines, sera semée séparément du colza. Cela permet une couverture rapide du sol si l’humidité est suffisante, ainsi qu’une fixation de l’azote de l’air à l’automne qui sera restituée au colza.

Toutefois, cela n’empêche pas les attaques d’insectes à l’automne. La surveillance des insectes ravageurs comme les altises sera primordiale tout au long de la saison. Il faudra empêcher les adultes de provoquer des dégâts de morsures sur les jeunes cotylédons et les jeunes feuilles car cela affaiblit les plantules et retarde leur développement.

Il faudra éventuellement intervenir avec un insecticide pour éviter la ponte des altises adultes car aucun produit n’est autorisé en Belgique, contrairement à nos pays voisins, pour lutter contre les larves d’altises qui se logent à l’intérieur des plantes de colza à l’automne et en hiver. Ces larves vont ensuite creuser des galeries dans les tiges, ce qui peut fragiliser les plantes, comme cette année.

Après le semis du colza, il est judicieux d’installer un piège jaune qui sera mi-enterré dans le sol (avec de l’eau et quelques gouttes de détergent), pour permettre aux altises de sauter dans le bassin lors de leurs passages terrestres. Grâce à ce bassin, les vols d’altises sont faciles à repérer. Le réseau de surveillance des insectes ravageurs d’automne en colza d’hiver, coordonné par le Cepicop, sera remis en place dès que possible.

Attention aux limaces

Puisque les sols ont eu l’occasion de se réhumidifier suite aux nombreuses pluies récentes, il conviendra de surveiller les limaces dès la levée du colza d’hiver, car celles-ci peuvent faire de nombreux dégâts à la culture.

Deux nouvelles variétés pièges à méligèthes

Pour déjà bien préparer la protection des parcelles contre les attaques de méligèthes du printemps 2024, il est possible, lors des prochains semis, de mélanger une variété à floraison très précoce à la variété de colza d’hiver principale. En plus de la variété « piège à méligèthes » bien connue Es Alicia, deux nouvelles variétés arrivent sur le marché : Atrakt et Exavance, avec une floraison encore plus précoce.

Cela permettra d’attirer au printemps prochain les premiers méligèthes sur les premières fleurs ouvertes. Ce sera efficace si la pression des insectes au printemps est faible mais cela n’empêchera pas la surveillance et un éventuel traitement insecticide en végétation si la pression s’avère être importante.

Des nouveautés en mélange en 2023 combinent une variété hybride à une variété lignée à floraison précoce (Es Alicia) et aussi une ou deux légumineuses comme plantes compagnes. Le conditionnement diffère selon les variétés et les mélanges proposés par les firmes. Il faudra donc adapter la quantité de semences à utiliser par ha, en tenant compte d’une densité de 40 à 50 graines de colza par m².

Compter sur la météo automnale

Le désherbage, chimique et/ou mécanique, sera bien utile pour protéger la culture de la concurrence des mauvaises herbes aussi bien lors de l’installation de la culture qu’à la récolte.

La réussite du semis et de la levée conditionnera une bonne partie de la réussite de la culture. La météo de l’automne permettra au colza de bien s’installer avant l’arrivée de l’hiver.

Si le semis demeure une étape cruciale, ce n’est qu’à la récolte que l’on saura  si les variétés sélectionnées ont pu exprimer leur plein potentiel.
Si le semis demeure une étape cruciale, ce n’est qu’à la récolte que l’on saura si les variétés sélectionnées ont pu exprimer leur plein potentiel. - J.V.

Et si l’on souhaite bénéficier des éco-régimes ?

Il sera possible d’activer l’éco-régime « Couverture longue du sol » avec la culture de colza d’hiver pour autant qu’il y ait suffisamment de surface couverte sur l’exploitation. Le montant de l’aide variera de 15 à 30 ou à 45 €/ha selon que le taux de couverture du sol jusqu’au 15 février 2024 concerne 70, 80 ou 90 % de la surface totale en cultures arables de l’exploitation.

Dans le cadre de l’éco-régime « Réduction d’intrants » que l’agriculteur choisit d’activer, une liste reprend 46 matières actives interdites d’utilisation dans différentes cultures (tableau 4). Il faut noter que celle-ci est évolutive et qu’elle peut être différente des pays voisins. En colza d’hiver, cela concerne 15 matières actives (m.a.) : 3 m.a. herbicides, 4 m.a insecticides, 2 m.a. régulateurs et 6 m.a. fongicides. Au total, 74 produits phyto ne pourront plus être utilisés si l’on active cette mesure en 2024. La liste des matières actives et produits pouvant encore être utilisés est disponible sur le site web du Cepicop (www.cepicop.be).

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Cela affecte la conduite de la culture, notamment à l’automne lors du désherbage et de la lutte contre les insectes, ainsi que lors d’une éventuelle régulation si le colza se développait trop rapidement. L’impact est aussi important lors du choix variétal, avant les semis, car la désinfection des semences avec Scenic Gold est également exclue car ce dernier contient une molécule (fluopicolide) reprise dans la liste éditée en 2023 par la Région wallonne.

Le montant prévu pour cet éco-régime est de 80 €/ha. Une analyse des résidus sur les cultures concernées par la mesure fera l’objet d’un contrôle sur place.

Christine Cartrysse

Cepicop

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