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Éloge de la procrastination

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« Il faut mettre un frein à l’immobilisme ». L’oxymore, attribué à Raymond Barre, qui fut un ancien Premier ministre français, illustre la posture de la commission européenne, plus que jamais adepte de la procrastination en matière de gestion de nombreux dossiers. Alors que l’Exécutif devise sur la nouvelle vision pour l’Agriculture, que ses services glosent au parlement sur les atouts et vertus de l’accord avec les pays du Mercosur, que ses représentants passent des heures à exégéter sur le futur cadre budgétaire européen, les ONG multiplient les actions, les courriers, les interpellations à l’attention des décideurs politiques et très souvent à charge du secteur agricole. Il faut dire qu’icelui est bien éloigné de ce qui se trame dans les cénacles européens.

Le dynamisme des ONG n’a d’égal que la passivité de la commission. Il suffit, pour l’illustrer, de se replonger dans l’actualité des trois derniers mois. Fin janvier, 85 organisations de défense de l’environnement et d’agriculteurs publiaient une feuille de route de sortie progressive de l’utilisation des pesticides dans l’UE. Mi-décembre 2024, Pan Europe (pesticides action network) annonçait contester devant la cour de justice européenne la réautorisation pour dix ans du glyphosate. Voici 10 jours, une cinquantaine de militants européens de défense des animaux organisaient une manifestation devant le parlement européen à Strasbourg, Elles demandaient une révision majeure de la législation sur le bien-être animal. Vêtus de costumes sombres et arborant des masques de poulet, les manifestants ont symboliquement déposé un bulletin dans une urne pour « défendre leurs droits ». Cette énième manifestation contestataire illustre, une nouvelle fois, l’inaction de la commission qui s’était initialement engagée à présenter en 2024 une vaste révision de la réglementation européenne. Elle n’aura produit que deux textes, l’un portant sur le transport des animaux, l’autre sur le bien-être… des chiens et chats.

Le nombre d’associations engagées dans des actions contentieuses contre les institutions et le monde agricole est frappant. Elles se concurrencent souvent, poursuivant le même objectif sous différentes dénominations. Les associations environnementalistes ont compris depuis une vingtaine d’années la nécessité de se défendre. Elles ont constitué des réseaux de juristes. Elles ont parfaitement intégré qu’il fallait combiner stratégie juridique, communication et lobbying pour se faire entendre.

Face à cette agitation bien huilée, on ne peut que déplorer l’inertie de la commission sur certains dossiers, et à tout le moins l’extrême lenteur qu’elle met à répondre aux doléances du secteur agricole et à ses justes questionnements. La législation sur le bien-être animal n’est qu’un exemple parmi d’autres...

Marie-France Vienne

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