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Les céréales en teres hennuyères: une saison marquée par une faible pression fongique

Le 18 juin, le Carah organisait la visite de ses champs d’essais, installés à Ath. S’il a été question du renouvellement variétal, la situation sanitaire, particulièrement différente de l’an dernier, n’a pas été oubliée. L’occasion de jeter un œil sur les traitements fongicides possibles, au regard d’une saison atypique.

Temps de lecture : 9 min

Le mois de juin est traditionnellement dédié aux visites des essais fongicides et variétaux mis en place par divers centres de recherche. Les observations réalisées permettent de jauger le comportement des froments et escourgeons, mais aussi d’évaluer l’efficacité de divers programmes phytosanitaires, en vue de préparer la prochaine saison. Tout en gardant à l’esprit qu’une année n’est pas l’autre… Les campagnes 2024 et 2025, diamétralement opposées, en sont la preuve. C’est à cet effet que le Centre pour l’agronomie et l’agro-industrie de la province du Hainaut (Carah) ouvrait ses portes aux agriculteurs et conseillers (phyto)techniques, pour une visite guidée organisée par le service d’expérimentations et d’avertissements.

En escourgeon, la supériorité des doubles traitements

Avant d’entamer la visite, Olivier Mahieu, responsable des expérimentations, livre quelques observations : « L’escourgeon est en avance par rapport aux années précédentes. En cause ? Les températures supérieures aux moyennes qui ont prévalu durant sa croissance. Toutefois, en certains endroits, il a pu être difficile de trouver une fenêtre d’intervention idéale pour appliquer un régulateur ». Et d’ajouter : « Les conditions sèches semblent avoir eu peu d’impact sur le potentiel de rendement, qui s’annonce prometteur ».

Contrairement à 2024, peu de maladies ont été observées, si ce n’est la rouille naine, l’oïdium et un peu de ramulariose en fin de saison. L’helminthosporiose et la rynchosporiose étaient quasiment absentes. Au 18 juin, jour de la visite, le contraste avec les observations réalisées un an auparavant est saisissant.

Outre les essais variétaux (lire par ailleurs), le Carah conduit des expérimentations consacrées à la lutte contre les maladies cryptogamiques, à Ath et Molenbaix. Cette année, cinq nouveautés y ont été intégrées : Navura (50 g/l méfentrifluconazole + 100 g/l prothioconazole), Revytrex Trio (66,6 g/l mefentrifluconazole + 100 g/l metrafenone + 80 g/l pyraclostrobine), Priori Era (200 g/l azoxystrobine + 150 g/l prothioconazole), Priori Max (93,5 g/l azoxystrobine + 500 g/l folpet) et Idencia Prime (150 g/l azoxystrobine + 280 g/l fenpropidine). Pour le reste, les produits étaient issus de plusieurs catalogues en vue de travailler avec un large panel de solutions disponibles sur le marché.

Sur le premier site, LG Zelda est la variété testée. Elle est généralement assez sensible à la rouille naine, à l’helminthosporiose et à la rhynchosporiose et moyennement sensible à la ramulariose. À Molembaix, les essais ont été menés sur la variété Alienor, qui est moyennement sensible à la rouille naine, à l’helminthosporiose et à la rhynchosporiose et assez tolérante à la ramulariose.

 L’itinéraire technique, à Ath

« Les semis ont été réalisés le 3 octobre, à la densité de 275 grains/m² », éclaire Olivier Mahieu.

Le désherbage des parcelles a été effectué avant l’hiver, le 17 octobre, avec Herold 0,6 l/ha + AZ 500 0,15 l/ha. Une correction a suivi au printemps, à l’aide de Primus 60 ml/ha + Starane Forte 0,35 l/ha + Matrigon 0,6 l/ha, le 3 avril.

L’azote a été apporté à la dose totale de 160 unités, en trois fractions (60 unités le 21 février, 60 unités le 1er avril et 40 unités le 18 avril). Les deux traitements de régulation ont été appliqués les 8 (Medax Top 1 l/ha) et 18 avril (Medax Max 0,5 kg/ha).

Un traitement insecticide a été réalisé le 24 octobre (Kendo 50 ml/ha), car de nombreux pucerons ont été observés en août et début septembre. « Aucun symptôme de jaunisse nanisante n’a, cependant, été constaté. »

Les traitements fongicides mis en comparaison ont été appliqués aux stades 1-2 nœuds, le 8 avril, et dernière feuille, le 25 avril.

 Lutte et efficacité

« Comme tous les ans, nous constatons clairement la supériorité des doubles traitements par rapport aux simples traitements. Toutefois, vu la saison que nous connaissons, il y a globalement peu de différences entre schémas. Les seules disparités qui ont été relevées concernaient essentiellement la ramulariose », observe notre guide.

« Sur base des cotations effectuées début juin, en traitement unique à la dernière feuille, ressortent : Ascra Xpro + Vertipin, Ascra Xpro + Stavento, Ascra Xpro + Comet New et Revytrex + Comet New. Comme l’an dernier, ils montrent les meilleures efficacités, notamment sur ramulariose. »

Une comparaison des deux premiers traitements avec l’Ascra Xpro utilisé seul montre que lui adjoindre du soufre (Vertipin) ou du folpet (Stavento) apporte un plus en matière d’efficacité. Le Revytrex, associé ici au Comet New, semble plus performant que le Reytrex Trio qui, lui, n’intègre pas de fluxapyroxad.

Du côté des programmes à deux traitements, les combinaisons les plus efficaces sont : Navura suivi d’Imtrex + Balaya, Navura suivi de Revytrex + Magnum, Protendo 300EC + Sirena suivi de Ascra Xpro, Lenvyor + Flexity suivi de Ascra Xpro + Stavento, Simveris + Comet New suivi de Ascra Xpro + Stavento, et, enfin, Balaya suivi de Ascra Xpro + Stavento. « Ce sont des solutions faisant intervenir le prothioconazole, le méfentrifluconazole, la pyraclostrobine ou le folpet en T1 et/ou en T2. »

L’essai confirme encore que la lutte contre la ramulariose doit s’envisager au stade dernière feuille et qu’il reste des produits disponibles sur le marché pour lutter contre cette dernière.

Un premier regard sur le froment

Après les escourgeons, place au blé et à un rapide point sur la situation au 18 juin. Olivier Mahieu : « La saison 2024-2025 a été caractérisée par des semis menés dans des conditions assez correctes en octobre, puis plus difficiles dès novembre, en raison des pluies automnales. Les agriculteurs ont connu un bref répit en décembre. L’hiver a été assez doux, sombre et pluvieux jusqu’en février, malgré une petite période de gel en janvier. Le printemps a, lui, été sec et lumineux ».

Sur le plan sanitaire, cette météo a été plutôt favorable aux rouilles mais, contrairement à 2024, défavorable au développement de la septoriose .

La rouille jaune a, parfois, touché certaines variétés considérées comme sensibles mais aussi d’autres, assez tolérantes. « Cela laisse supposer que de nouvelles souches, capables de contourner certaines résistances, sont apparues. »

Certaines variétés de froment,  considérées comme tolérantes, ont été touchées par la rouille jaune. La piste d’une nouvelle souche est évoquée...
Certaines variétés de froment, considérées comme tolérantes, ont été touchées par la rouille jaune. La piste d’une nouvelle souche est évoquée... - J.V.

La rouille brune s’est développée plus lentement que l’an passé, mais s’est montrée assez agressive depuis début juin.

On constate peu de fusariose cette année, la floraison s’étant déroulée sous de parfaites conditions.

Côté insectes, peu de pucerons de l’épi ont été observés dans la parcelle visitée, mais les situations sont contrastées cette année. Quelques lémas ont également été repérés, sans qu’il ne faille s’en préoccuper. Les cécidomyies n’ont, semble-t-il, pas été préjudiciables dans les essais cette année. « Les rares sorties d’adultes ne correspondaient pas vraiment au stade critique de l’épiaison. »

Avec quelles stratégies contre les maladies fongiques ?

Un important essai de quarante objets, orienté sur les programmes proposés par les firmes phytopharmaceutiques et sur les stratégies mises en avant par le Carah, est déployé en matière de lutte contre les maladies en froment d’hiver. Il prend place à Ath, sur la variété Positiv, et est complété par un second essai, installé à Cambron-Saint-Vincent, sur la variété WPB Calgary.

 L’itinéraire technique, à Ath

L’essai installé à Ath a été semé le 30 octobre à la densité de 350 grains/m².

Pour son désherbage, le Carah a opté, avant l’hiver, pour Carpatus 0,6 l/ha+ AZ 500 0,15 l/ha le 4 novembre. Une correction a été effectuée au printemps, le 4 avril, sous forme de Allié 20 g/ha + Starane Forte 0,3 l/ha.

L’azote a été apporté à la dose totale de 190 unités, en trois fractions (90 unités le 21 février, 60 unités le 1er avril et 40 unités le 8 mai). Les régulateurs ont été appliqués les 4 (Moddus 0,2 l/ha + Cycocel1 l/ha) et 28 avril (Moxa 0,1 l/ha + Cycofix 0,5 l/ha).

Un traitement insecticide a été réalisé le 4 novembre (Karaté Zéon 50 ml/ha), lors du désherbage d’automne.

Côté fongicides, six nouveautés ont été mises à l’épreuve. Ainsi, aux cinq produits testés en escourgeon (lire ci-avant), s’ajoute Firuza (50 g/l prothioconazole + 735 g/l phosphonates de potassium).

Peu avant la visite, la pression était nulle en rouille jaune, faible en septoriose et un rien plus élevée en rouille brune. Les traitements ont été appliqués, selon les programmes évalués, aux stades 2 nœuds (32) le 29 avril, dernière feuille (39) le 13 mai, épiaison (55) le 20 mai et floraison (60) le 3 juin.

Et Olivier Mahieu d’en tirer quelques premières conclusions : « Globalement, les traitements uniques se sont très bien comportés cette année. A fortiori, les doubles traitements aussi ; ces derniers montrant une efficacité supérieure. Le contexte de l’année, caractérisée par une faible pression fongique, est tel qu’il est difficile d’en dire plus, surtout pour l’essai mené à Ath. À Cambron-Saint-Vincent, l’efficacité des traitements réalisés au stade dernière feuille est supérieure à celle des traitements d’épiaison, tant sur septoriose que sur rouille brune. Les doubles traitements (32 + 55 et 32 + 39) montrent, quant à eux, une efficacité supérieure aux simples traitements et ce, des deux côtés. Ils laissent passer très peu de symptômes sur F3, F2 et F1 ».

 Les principaux enseignements

Bien que ce ne soit pas la stratégie habituellement conseillée, trois traitements uniques de dernière feuille se distinguent : Revystar Gold, Univoq + Comet New, et Univoq. Cependant, ce dernier laisse passer la rouille brune s’il est appliqué seul.

En traitement unique d’épiaison, sur septoriose, l’avantage va globalement au Revystar Gold et au mélange Univoq + Comet New. Sur rouille brune, les mêmes produits se distinguent, suivis par le Velogy Era.

Du côté des doubles traitements (32 + 55 ou 32 + 39), la plupart des interventions contrôlent bien à parfaitement la septoriose cette année. C’est également le cas de la rouille, même si certaines combinaisons se montrent moins imperméables.

Les traitements permettant un contrôle complet des deux maladies dans les deux essais sont :

– aux stades 32 + 39 : Xenial suivi de Revytrex, Navura suivi de Priaxor EC + Lenvyor, Univoq suivi de Imtrex + Balaya, et Balaya suivi de Imtrex + Univoq ;

– aux stades 32 + 55 : Levyor + Simveris suivi de Priori Era + Elatus Plus, Priori Era + Questar suivi de Lenvyor + Priaxor, et Balaya + Vertipin suivi de Univoq + Comet New.

Et Olivier Mahieu d’ajouter : « L’ajout de Stavento (à base de folpet) à 1,5 l/ha ou de soufre à une triazole en T1 montre encore son intérêt sur septoriose ».

Enfin, le traitement multiple à doses réduites 32+39+60 – faisant intervenir Protendo 300 EC suivi de Revistar Gold suivi de Prosaro – donne des résultats parmi les meilleurs cette anné. L’an dernier, vu la pression fongique, ce type d’intervention donnait des résultats certes bons, mais légèrement en retrait par rapport aux meilleurs traitements 32+55.

Propos recueillis par Jérémy Vandegoor

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