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Arbres têtards et agroforesterie: un modèle d’avenir!

Pour la 3e année consécutive, le projet « Trognes de Wallonie » lance une vaste opération de plantation et de restauration d’arbres têtards sur l’ensemble du territoire wallon. Vous êtes agriculteur, maraîcher, éleveur ou propriétaire de terrains agricoles ? Vous souhaitez une aide technique et/ou matérielle pour planter ou restaurer des trognes en retard d’entretien ? Ce qui suit pourrait vous intéresser…

Temps de lecture : 5 min

Mais qu’est-ce qu’un arbre têtard ? Une trogne (ou arbre têtard) est un arbre qui fait l’objet d’une taille particulière. Étêté dès les premières années de sa vie et retaillé à intervalle régulier, celui-ci développe une grosse tête caractéristique.

L’invention de l’arbre têtard remonte à l’époque néolithique et coïncide avec les débuts de l’agriculture. Arbres paysans par excellence, les trognes ont fourni pendant des millénaires des ressources essentielles aux communautés villageoises : du bois de chauffage, du fourrage pour le bétail, de l’osier, des piquets de clôture…

Quelles essences tailler en têtard ?

Toutes les essences d’arbres ou presque peuvent être conduites en trognes. En Wallonie, celles qui connurent le plus de succès dans le passé sont le saule, le frêne et le charme. Le charme têtard – surnommé « l’arbre à fagots » – était surtout prisé pour son bois de chauffage. Le frêne, en plus de produire du bois bûche de qualité, offrait un excellent fourrage pour le bétail. Quant aux alignements de saules têtards, ils permettaient de désengorger les terrains trop humides tout en fournissant du fourrage, des perches et de l’osier en abondance.

À côté de ces trois arbres emblématiques, de nombreuses autres essences furent et sont encore taillées en trognes : le chêne, l’érable, le peuplier, l’aulne, le tilleul…

Pourquoi miser sur les arbres têtards ?

Après un demi-siècle de déclin significatif (1950-2000), l’arbre têtard revient aujourd’hui sur le devant de la scène. On redécouvre ses multiples atouts pour répondre aux défis actuels et futurs de l’agriculture (adaptation aux écarts climatiques, régulation de l’eau, production de biomasse, robustesse des fermes, préservation de la biodiversité, appoint fourrager, bien-être animal…). Des modèles agroforestiers innovants se multiplient à travers l’Europe et donnent des résultats prometteurs.

On peut d’ailleurs épingler huit bonnes raisons de miser sur les arbres têtards.

 Protection des sols et régulation de l’eau

La présence d’arbres têtards en bordure de champs joue un rôle essentiel pour le maintien d’un sol de qualité. En le décompactant, les racines favorisent l’infiltration de l’eau et assurent un meilleur approvisionnement des nappes souterraines. Lors de fortes pluies, elles limitent le ruissellement en surface et permettent donc de lutter efficacement contre l’érosion et les inondations.

En bordure de champ, les racines des arbres têtards décompactent le sol et favorisent l’infiltration de l’eau.
En bordure de champ, les racines des arbres têtards décompactent le sol et favorisent l’infiltration de l’eau. - J-L. Coppée

 Effets bioclimatiques

À l’instar des haies champêtres et d’autres éléments agroforestiers, les alignements d’arbres têtards contribuent à créer un microclimat bénéfique au sein des parcelles. Ils réduisent la température de plusieurs degrés en période caniculaire et limitent le refroidissement nocturne, notamment au printemps et en automne. Grâce à leur effet parasol et brise-vent, les arbres atténuent l’évapotranspiration des terres de culture et préservent les prairies de la sécheresse.

 Bien-être animal et productivité

En les protégeant contre les aléas climatiques et en leur fournissant un abri contre le soleil, le vent et la pluie, les arbres têtards contribuent de manière significative au bien-être du bétail. La production – qu’elle soit laitière ou viandeuse – s’en trouve positivement impactée.

Abri à la fois contre le vent, le soleil et la pluie, les têtards contribuent au bien-être des cheptels.
Abri à la fois contre le vent, le soleil et la pluie, les têtards contribuent au bien-être des cheptels. - J-L. Coppée

 Appoint fourrager

Au cours des dernières années, plusieurs épisodes de sécheresses estivales ont mis à mal les prairies wallonnes. Ces évènements climatiques inhabituels ont poussé certains éleveurs à se réintéresser aux haies et trognes fourragères. Conduites en têtards bas ou hauts, mangées directement par le bétail ou récoltées par l’éleveur, celles-ci ont permis dans certains contextes de complémenter le bétail sans importer de fourrage et sans puiser dans les réserves pour l’hiver.

Des essences comme le frêne, le saule et le tilleul présentent de remarquables atouts en termes d’appétence mais aussi sur le plan nutritionnel et thérapeutique (« alicaments »).

Certaines essences présentent des atouts sur le plan nutritionnel et thérapeutique pour le bétail.
Certaines essences présentent des atouts sur le plan nutritionnel et thérapeutique pour le bétail. - H. De Mori

 Protection des bâtiments

Comme les haies brise-vent, avec lesquelles ils peuvent être combinés, les alignements d’arbres têtards permettent d’intégrer harmonieusement les bâtiments agricoles dans le paysage. On estime qu’un bâtiment isolé par ce type de barrière végétale peut réaliser jusqu’à 10 % d’économie sur sa facture énergétique.

Un bâtiment isolé par un alignement d’arbres têtards permettrait de réduire de 10 % la facture énergétique.
Un bâtiment isolé par un alignement d’arbres têtards permettrait de réduire de 10 % la facture énergétique. - H. De Mori

 Auxiliaires de culture

Si les alignements d’arbres têtards jouent un rôle essentiel pour la biodiversité en milieu rural, ils constituent également un facteur de production pour l’agriculture et l’élevage. Les passereaux et les chauves-souris qui y sont inféodés limitent la prolifération de certains insectes phytophages et coprophiles nuisibles, tandis que les rapaces (diurnes et nocturnes) régulent naturellement les populations de rongeurs. On estime par exemple qu’un couple de Chevêches d’Athéna et leurs jeunes engloutissent plus de 1.500 campagnols par an.

 Production de biomasse

La valorisation du produit de la taille des arbres têtards peut prendre différentes formes en fonction du rythme d’entretien : fourrage, bois raméal fragmenté, plaquettes, bois-bûche… L’installation d’un poêle de masse, d’une chaudière à plaquettes ou à bûches au sein de l’exploitation peut parfois s’avérer très rentable. Les plaquettes produites peuvent aussi être utilisées avantageusement comme litière pour le bétail ou pour drainer les zones de passage ou d’attroupement des bêtes.

 Patrimoine historique et paysager

Au cours des siècles, les alignements d’arbres têtards ont façonné certains paysages de Wallonie en leur conférant une identité forte (Pays de Herve, Picardie wallonne, Fagne hennuyère…). Il s’agit là d’une richesse patrimoniale pour les populations qui y sont enracinées mais aussi pour les visiteurs qui apprécient les terroirs authentiques.

Pour bénéficier d’un accompagnement

Pour recevoir une aide technique et matérielle en vue de mener à bien un chantier de plantation et/ou de restauration d’arbres têtards, téléchargez le formulaire ad hoc sur www.terranostragerpinnes.be et renvoyez-le avant le 31 juillet à l’adresse suivante : herve@terranostragerpinnes.be !

Hervé De Mori

Terra Nostra asbl

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