Des universitaires proposent une «loi climat» prête à l’emploi

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«L’objectif de cette proposition de loi est de remettre à plat ce qui existe actuellement en matière de gouvernance climatique et de revoir la manière dont ces différents organes s’articulent pour proposer un modèle qui fonctionne», explique le co-auteur de la proposition et professeur en droit constitutionnel à Saint-Louis, Matthias El Berhoumi. Les auteurs - flamands et francophones -, qui se sont inspirés d’exemples ayant fait leurs preuves à l’étranger, suggèrent notamment d’instaurer un «dialogue multiniveaux» qui réunisse à la fois la société civile, les autorités locales, les entreprises, les investisseurs ou encore des conseils d’avis afin de discuter des politiques en matière d’énergie et de climat, y compris sur le long terme.

La proposition de loi prévoit également de relever les objectifs intermédiaires de réduction des gaz à effet de serre à au moins 65% d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990. C’est l’une des revendications du collectif citoyen «Rise for Climate Belgium», à l’origine de la marche qui a drainé quelque 70.000 personnes le 27 janvier à Bruxelles. Toujours d’ici 2030, la proposition de loi fixe la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute en Belgique à 32% et vise à réaliser l’exigence européenne d’amélioration de l’efficacité énergétique d’au moins 32,5%, malgré les réticences exprimées par la Belgique en raison des divergences de vue entre ses Régions en décembre dernier. Afin d’améliorer la coordination de la politique climatique entre les différents niveaux de pouvoir, celle-ci serait confiée à quatre institutions. La Conférence interministérielle climat, déjà existante, serait chargée d’approuver le Plan national intégré Energie-Climat et son actualisation avec des objectifs à plus long terme. L’Agence interfédérale pour le climat, une nouvelle institution, devrait élaborer ce Plan et évaluer l’état d’avancement des politiques, tandis qu’une Commission interparlementaire sur le climat servirait d’organe permanent de concertation entre la Chambre des représentants, le Sénat et les parlements des communautés et des Régions. Le texte prévoit également la création d’un comité d’experts indépendant chargé de donner des avis éclairés sur la science du changement climatique, les risques qu’il entraîne, l’économie, la finance et les entreprises, la production et la distribution d’énergie, les villes durables, la qualité de l’air, l’aménagement du territoire, l’agriculture, la biodiversité, etc. «Ce comité d’experts aurait aussi, outre son rôle de conseil, un pouvoir d’interpellation des différents parlements quant à la cohérence des politiques menées», précise Caroline Billiet, de l’UGent.

La politique climatique ne peut en effet se faire au détriment du principe de justice sociale, précise le texte. Celle-ci «doit être socialement équitable, promouvoir la biodiversité, lutter contre la pauvreté et réduire les inégalités». Enfin, la proposition de loi institue, pour chaque parlement, un «jour du climat» lors duquel les gouvernements fédéral et des entités fédérées devraient transmettre leur rapport sur l’état d’avancement des politiques climatiques et les projets pour la période à venir.

«Notre proposition est prête à l’emploi. Nous l’avons élaborée dans le cadre du fédéralisme actuel, il n’y a pas besoin de réforme pour pouvoir la mettre en œuvre. Elle pourrait même être adoptée dès demain, y compris sous un gouvernement en affaires courantes», affirme Delphine Misonne, co-auteur de la proposition de loi et professeure de Droit, gouvernance et développement durable à Saint-Louis.

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