Accueil Environnement

Rapport du Giec: Indispensable de revoir l’usage des terres pour le climat et la sécurité alimentaire

Il est indispensable de revoir la façon dont sont utilisées et cultivées les terres dans le monde et repenser nos habitudes de consommation afin d’assurer à la fois la sécurité alimentaire des Terriens et la lutte contre le réchauffement climatique, a averti jeudi le groupe d’experts de l’ONU pour le climat (Giec).

Temps de lecture : 4 min

Dans le «résumé à l’intention des décideurs politiques», le Giec plaide pour des actions «à court terme» contre la dégradation des sols, le gaspillage alimentaire ou les émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole.

Le texte de 1.200 pages est consacré au «changement climatique, la désertification, la dégradation des sols, la gestion durable des terres, la sécurité alimentaire et les flux de gaz à effet de serre dans les écosystèmes terrestres». Il a été rendu public ce jeudi après une série de discussions entamées vendredi dernier entre les délégations des 195 pays membres du Giec.

«Notre utilisation des terres (...) n’est pas soutenable et contribue au changement climatique», a souligné sa co-présidente Valérie Masson-Delmotte, pour qui le rapport met «l’accent sur l’importance d’agir dès maintenant».

Le temps est compté, alors que le réchauffement des terres émergées atteint déjà 1,53°C, le double de la hausse globale (océans compris), selon le rapport. La marge est étroite si l’on veut à la fois contenir le réchauffement climatique et ses effets dévastateurs sur les terres, et nourrir convenablement une population qui pourrait dépasser 11 milliards d’individus à la fin du siècle. «Le changement climatique aggrave la dégradation des sols en augmentant l’intensité des précipitations, les inondations, la fréquence et l’intensité des sécheresses, le stress thermique, les vents, l’élévation du niveau de la mer et l’action des vagues», indique le rapport. Les femmes, les enfants, les personnes âgées et les plus pauvres sont en première ligne, souligne-t-il.

Le Giec a élaboré différents scénarios pour limiter le réchauffement à 1,5°C ou bien en dessous de 2°C par rapport à la période pré-industrielle. Ils incluent des mesures d’atténuation basées sur les terres et des changements d’usage, combinant boisement, reboisement, une déforestation réduite et des bioénergies.

Les scénarios nécessitant d’importantes conversions de terres (reboisement pour capturer du CO2, champs dédiés aux bioénergies...) pour lutter contre le réchauffement pourraient avoir «des effets secondaires indésirables» - désertification, dégradation des terres, sécurité alimentaire...- avertit le rapport.

Pour le Giec, outre les indispensables réductions de gaz à effet de serre, des solutions existent du côté du système alimentaire et des habitudes de consommation, car les changer ne nécessite pas de consommer plus d’espaces.

Il préconise de se tourner vers des régimes alimentaires sains à base de plantes et de végétaux, en tournant le dos à une agriculture industrielle nocive basée sur des produits chimiques et la déforestation. Celle-ci a entraîné une hausse des émissions de gaz à effet de serre, une perte des écosystèmes et une baisse de la biodiversité.

La production de nourriture utilise 37% de la surface de la planète (25% de prairies et 12% de cultures), à l’exclusion de l’Antarctique et de la pêche, selon un rapport du World Resources Institute (WRI) publié en juillet avec la Banque Mondiale et les organismes de recherche français Inra et Cirad. L’agriculture émet environ un quart des émissions de gaz à effet de serre produites par l’activité humaine, selon ce rapport: 14% viennent de la production agricole et 10% du changement d’affectation de sols, lorsque forêts et savanes deviennent des champs.

Le WRI a calculé qu’il faudrait 593 millions d’hectares de terres arables supplémentaires pour nourrir les 9,8 milliards d’êtres humains prévus en 2050.

Actuellement, de «25 à 30% de la production totale de nourriture est gaspillée», souligne le rapport du Giec, alors qu’environ 820 millions de personnes souffrent de la faim. Si dans les régions pauvres, l’apport en protéines animales est parfois insuffisant, dans les pays riches, il dépasse les recommandations nutritionnelles de l’Organisation mondiale pour la santé. Deux milliards d’adultes sont en outre en surpoids ou obèses.

«Des régimes équilibrés reposant sur des aliments à base de plantes, tels que ceux basés sur les céréales secondaires, les légumineuses, les fruits et légumes, les fruits à coque et les graines et des aliments d’origine animale produits dans des systèmes résilients, durables et à faibles émissions de gaz à effet de serre présentent d’importantes opportunités», notent les experts. Depuis 1961, la production d’huiles végétales et de viande par habitant a plus que doublé. Celle des calories a augmenté d’un tiers.

Ce travail est le deuxième d’une série de trois «rapports spéciaux» du Giec, après celui sur la possibilité de contenir le réchauffement à 1,5°C, l’an dernier, et avant celui sur les océans et la cryosphère (banquise, glaciers, calottes polaires) attendu fin septembre, au moment où l’ONU organisera un sommet sur le climat à New York.

D’après Belga

A lire aussi en Environnement

Voir plus d'articles