Accueil Autres animaux

Les pisciculteurs wallons craignent pour leur avenir

La Wallonie ne recense à l’heure actuelle que 40 pisciculteurs professionnels. Trop peu nombreux pour satisfaire la consommation intérieure, ceux-ci s’inquiètent pour l’avenir de leur filière qui peine à attirer les jeunes, malgré l’attrait croissant des consommateurs pour un poisson élevé et transformé localement.

Temps de lecture : 3 min

Aux étangs de la Strange, à Vaux-sur-Sûre, Freddy Dubois et son épouse produisent entre 12 et 15 tonnes de truites par an. « Ce sont des truites arc-en-ciel et fario que nous élevons depuis l’œuf jusqu’à l’individu adulte d’un poids de 300 à 350 g », explique-t-il.

Les poissons sont commercialisés au sein même du restaurant de la pisciculture mais aussi auprès de particuliers ou d’autres établissements Horeca sous forme de truites fraîches ou fumées, de mousses et tartares… Une partie des truites est également destinée au repeuplement des sites de pêches. Le tout, avec un succès grandissant !

La relève se fait attendre

Cependant, le pisciculteur fait face à de nombreuses difficultés. Premièrement, la hausse du prix des aliments, frôlant actuellement 1600 €/t, impacte son activité au quotidien. L’alimentation en eau peut également faire défaut en cas de sécheresse. « Ce n’est pas mon cas, mais plusieurs confrères ont déjà été confrontés au problème », précise-t-il.

S’y ajoutent les pertes par prédation (cormorans, hérons, cigognes noires…) ou maladies. « Malheureusement, lorsque cela se produit, nous ne percevons aucune indemnité alors que d’autres pays, comme la France, ont instauré un système d’aides. »

Jean-Marie Clément et Angélique Gillet, installés respectivement à Bertogne et Paliseul, abondent dans le même sens. Et d’ajouter : « Comme en agriculture, la relève se fait attendre… Les jeunes n’intègrent que trop rarement le milieu piscicole. D’une part, les investissements sont importants ; d’autre part, on déplore un manque de formation en Région wallonne. Cela soulève de nombreuses questions et inquiétudes dans le milieu… Et ce, d’autant que la profession est souvent exercée à titre complémentaire ».

Redynamiser la filière

Un constat que le ministre wallon de l’Agriculture et de la Pêche, Willy Borsus, partage. « Les pisciculteurs wallons sont de moins en moins nombreux. Heureusement, nous pouvons compter sur eux pour assurer le repeuplement de nos rivières et étangs de pêche. Cependant, nous ne pouvons pas rester les bras croisés face à ce déclin… »

Celui-ci entend donc œuvrer pour redynamiser la filière, qui présente un potentiel de développement relativement important. « Si 250 t de poissons sont produites chaque année en Wallonie, nous en importons également pas moins de 1.000 t. C’est dire s’il existe de la place sur le marché pour une production locale et de qualité », poursuit-il.

La truite ne représente qu’environ 4 % du volume total de poisson consommé, soit 350 g par an et par habitant, alors qu’elle présente bien des qualités nutritives.
La truite ne représente qu’environ 4 % du volume total de poisson consommé, soit 350 g par an et par habitant, alors qu’elle présente bien des qualités nutritives. - J.V.

Dans ce cadre, le plan stratégique 2021-2030 de l’aquaculture wallonne adopté par le gouvernement régional s’est vu allouer un montant de 8,95 millions, cofinancé par la Région wallonne et l’Union européenne (5,3 millions via le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture).

« Ce budget doit permettre aux pisciculteurs de bénéficier de mesures de soutien à l’élevage, à la transformation et à la commercialisation. Nous souhaitons leur apporter un suivi scientifique, des conseils et expertises, des formations… Un volet concerne également le soutien aux investissements productifs et de protection », détaille le ministre. Deux autres points du plan concernent encore l’aide à la conversion vers la production aquacole bio et le versement d’indemnités de pertes et surcoûts pour cause de circonstances exceptionnelles.

Le Plan de relance de la Wallonie entend, lui aussi, accorder davantage d’importance à la filière. « Notre objectif est de créer une écloserie sur le territoire régional en vue de proposer des alevins et truitelles aux professionnels qui sont parfois contraints de se tourner vers la France ou l’Allemagne pour s’approvisionner. »

À cela, s’ajoute encore la mission de promotion des productions aquacoles wallonnes dont l’Agence wallonne pour la promotion d’une agriculture de qualité (Apaq-w) a la charge. « De quoi donner la pêche à la truite wallonne », sourit le ministre Borsus.

J. Vandegoor

A lire aussi en Autres animaux

Voir plus d'articles