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Émissions industrielles : levée de boucliers du secteur de l’élevage

Afin de renforcer l’efficacité de sa directive sur les émissions industrielles, la commission prépare une révision qui prévoit d’abaisser le seuil « d’unités de bétail » à partir duquel les installations de porcs et de volailles sont couvertes, et d’ajouter l’élevage bovin dans son champ d’application.

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L a commission européenne envisage, selon un projet de révision de la directive européenne sur les émissions industrielles d’étendre les dispositions de cette réglementation aux élevages de porcs, de volailles et de bovins qui « provoquent d’importantes émissions polluantes ».

Le texte propose donc d’abaisser le seuil « d’unités de bétail » (UGB) à partir duquel les installations de porcs et de volailles sont couvertes à 125 unités ou plus, et d’ajouter l’élevage bovin dans son champ d’application pour les installations de 100 unités ou plus. Pour les élevages mixtes de bovins, porcs et volailles, le seuil serait de 100 UGB et pour ceux de porcs et de volailles de 125 UGB.

Une directive

qui date de 2010

« Le cadre législatif prévu par la présente directive contribuera à réduire, entre autres, les émissions d’ammoniac, de nitrates et de gaz à effet de serre provenant de l’élevage, et à améliorer la qualité de l’air, de l’eau et du sol », justifie Bruxelles. Actuellement, la directive concerne les « élevages intensifs de volailles ou de porcs » avec plus de 40.000 emplacements pour les volailles, plus de 2.000 emplacements pour les porcs de production (de plus de 30 kg) et plus de 750 emplacements pour les truies.

Cette directive qui date de 2010 veille à l’application des meilleures techniques disponibles par les exploitants, à la surveillance et au contrôle des rejets et à la participation et à l’information du public.

Elle couvre actuellement environ 52.000 installations industrielles (raffineries, traitement et incinération des déchets, métallurgie, produits chimiques…), centrales électriques et exploitations d’élevage qui représentent ensemble environ 20 % des émissions polluantes globales de l’UE dans l’air, environ 20 % des émissions polluantes dans l’eau et environ 40 % des émissions de gaz à effet de serre.

La directive vise à prévenir ou, lorsque cela n’est pas possible, minimiser à la source les émissions de polluants par les installations agro-industrielles, afin d’éviter ou de réduire les effets néfastes sur la santé et l’environnement, en tenant compte de l’état de l’environnement dans la zone touchée par ces émissions.

Transparence

Les États membres veillent à ce que l’exploitant procède à la surveillance des émissions et des niveaux de performance environnementale associés. L’exploitant, lui, consigne tous les résultats de la surveillance, pendant une période d’au moins six ans, de manière à permettre la vérification du respect des valeurs limites d’émission et des valeurs limites de performance environnementale.

Dans le but de renforcer la transparence, la commission européenne prévoit dans son projet de révision d’obliger les États membres à garantir que les autorisations d’exploiter tout ou partie d’une installation soient mises gratuitement à la disposition du public sur Internet, accompagnées d’un résumé des autorisations et avec le soutien de l’Agence européenne pour l’environnement, Bruxelles souhaite également lancer un portail des émissions industrielles en ligne, accessible au public, qui intégrera les informations administratives communiquées par les États membres.

«Une approche comptable idéologique et déconnectée

de la réalité des exploitations»

Avec cette proposition de révision de la directive européenne sur les émissions industrielles, la commission veut « multiplier par près de dix » le nombre d’élevages bovins, porcins et avicoles qui seront couverts à l’avenir, « en visant les exploitations familiales et en les classant dans la catégorie des installations agro-industrielles », dénonce le Copa qui y voit « une approche comptable idéologique et déconnectée de la réalité des exploitations ».

Selon le Copa, en l’état, cette révision obligerait des milliers d’élevages familiaux à se conformer à un protocole d’émission « coûteux, conçu avant tout pour les grandes entreprises », regrette l’organisation.

La France et l’Espagne montent au créneau

Le commissaire à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, s’est pourtant félicité d’avoir déjà obtenu un assouplissement du texte qui prévoyait initialement un seuil à 100 UGB. Insuffisant pour les ministres de l’Agriculture français et espagnol qui se sont, eux aussi, inquiétés de ce projet lors de la réunion du Conseil Agriculture le 7 avril à Luxembourg.

Pour le ministre espagnol, Luis Planas, il est «  irréel  » qu’en ce moment, «  avec la priorité que nous avons par rapport à la production alimentaire, la Commission européenne publie ce projet  ». «  Est-ce qu’un élevage d’une centaine de vaches allaitantes dans nos montagnes en Europe est un élevage industriel ? La réponse est non !  », s’est pour sa part emporté le ministre français Julien Denormandie.

«  Au même moment, nous laissons entrer en Europe des viandes d’élevages utilisant des antibiotiques de croissance dans des fermes sud-américaines à 10.000 vaches. C’est une aberration.  »

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