Accueil Archive

L’Européen mange des portions de forêt tropicale à son insu

Un rapport du WWF, le Fonds mondial pour la nature, pointe la responsabilité de l’Europe dans l’exportation de produits issus de la déforestation tropicale. Sa publication arrive alors qu’une loi est en cours d’élaboration à la Commission européenne, pour tenter d’enrayer ce phénomène.

Temps de lecture : 3 min

Plusieurs régions du monde sont aujourd’hui victimes de la déforestation provoquée par les importations européennes, comme l’Indonésie, l’Argentine, le Paraguay ou encore le Brésil. Ces dix dernières années, c’est l’équivalent de plus de 8,4 millions de terrains de football qui ont disparu de cette région qui abrite 10 % de la biodiversité de la planète. Les arbres abattus laissent place à de vastes zones agricoles dédiées à la culture intensive de plusieurs matières premières, comme le soja, l’huile de palme, le cacao et le café, le bœuf ou encore le bois, dont une part importante est dédiée à l’exportation.

L’Europe deuxième importateurUn nouveau rapport publié par l’ONG WWF révèle les coulisses de ces exportations à destination de l’Union européenne. Élaboré conjointement par le Stockholm Environment Institute (SEI) et l’initiative de transparence Trase, le document révèle que l’Europe est responsable de 16 % des exportations issues de la déforestation tropicale, derrière la Chine.

Entre 2005 et 2017, les importations européennes ont provoqué 3,5 millions d’hectares de déforestation, dont 80 % sont captées par 6 pays : l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la France, la Belgique et la Pologne. Durant cette période, le soja, l’huile de palme et la viande de bœuf ont constitué la majeure partie des importations. Ce sont également les matières premières dont la culture a un effet particulièrement dévastateur sur la biodiversité et la déforestation.

Dans les rayons de supermarchésComme le souligne l’ONG WWF dans son rapport, la dégradation des forêts et de la biodiversité sud-américaine s’effectue à l’insu des consommateurs, notamment en ce qui concerne des denrées telles que le soja ou l’huile de palme. Le soja n’atterrit pas directement dans l’assiette, comme l’explique Béatrice Wedeux, experte en “déforestation importée et commerce de bois illégal” pour le WWF Belgique : « Ce soja est principalement utilisé comme source de protéine pour les animaux d’élevage, les porcs, les poulets et les vaches. Il y a quelques années, on a estimé que chaque Européen consomme à son insu 61 kilos de soja, à travers des produits d’origine animale. »

En d’autres termes, nous consommons des portions de « déforestation importée » via la viande et les œufs que nous achetons dans les supermarchés. L’huile de palme entre dans la composition de certaines confiseries et chocolats, mais sert aussi à la fabrication de cosmétiques et d’agrocarburants. Les consommateurs adoptent alors sans le savoir des pratiques antinomiques de la lutte contre le changement climatique.

La Belgique dans le top 8 européenEntre 2005 et 2017, la Belgique a comptabilisé une déforestation importée annuelle de 14.800 hectares, principalement via l’importation d’huile de palme, de caco, mais aussi de soja destiné à l’alimentation des animaux : « L’utilisation du soja importé concerne les porcs et les volailles à plus de 60 %, assez peu les vaches laitières et viandeuses en Belgique. C’est vraiment de l’alimentation qui concerne les élevages hors-sol, dans les fermes industriels qui font de l’agriculture intensive et ne font pas sortir leurs bêtes à l’extérieur », explique Yves Vandevoorde, coordinateur politique au sein de La Fédération unie de groupements d’éleveurs et d’agriculteurs (Fugéa).

La Une

Voir plus d'articles
Le choix des lecteurs