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La recherche de plantes

hôtes par les insectes :

décryptage des mécanismes

En maraîchage, en particulier dans les fermes maraîchères

de taille modeste, la protection des cultures à l’égard des insectes ravageurs est une préoccupation. Que ce soit en mode

conventionnel ou en bio, les moyens de lutte disponibles

sont difficiles à mettre en œuvre et sont coûteux.

Temps de lecture : 5 min

Les insectes ravageurs d’une culture recherchent ladite plante pour les besoins de son cycle de reproduction, pour se nourrir et pour se développer. La plante hôte est un refuge pour l’insecte, de l’aliment ou un lieu de ponte.

Pour les plantes à pollinisation entomophile, les insectes permettent la pollinisation et il est donc crucial que les insectes repèrent les plantes.

La recherche de la plante par l’insecte est une étape vitale pour l’insecte mais aussi dans certains cas pour la plante. La pression sélective est donc forte.

Des mécanismes fascinants

Les mécanismes mis en œuvre par les insectes sont à la fois simples et fascinants. Interviennent des capteurs acoustiques visuels, physiques et olfactifs.

L’acoustique de la vibration d’une feuille est captée par l’insecte et lui permet de s’orienter avec précision sur des distances longues ou courtes. Les drosophiles, les cicadelles et des parasitoïdes sont des exemples de genres utilisant leurs facultés acoustiques.

La captation visuelle par les yeux et les ocelles permet aux mouches des fruits et aux abeilles de s’orienter. Les contrastes, les formes, les couleurs interviennent avec des subtilités incluant la photopériode et son influence sur le comportement.

Différents capteurs physiques (hygrométrie, température, perception des flux d’air…) permettent à l’insecte de s’orienter mais surtout d’enclencher sa recherche de l’hôte. Le doryphore réagit selon ces capteurs et de nombreux lépidoptères (papillons).

Les chimiorécepteurs des antennes de très nombreux insectes sont très performants pour détecter les informations olfactives. C’est une des pistes employées actuellement comme moyen de lutte pour prévenir les dégâts en brouillant les informations diffusées par les plantes par des émissions artificielles de substances analogues et aussi par les piégeages de comptages et d’estimation des risques.

Comment s’y prend l’insecte pour sa recherche ?

Il y a plusieurs éléments dans sa procédure. L’insecte recherche l’habitat de la plante, la plantation, la plante entière et enfin, l’organe d’accueil dans cette plante. Plusieurs mécanismes successifs sont mis en œuvre.

Les substances naturellement émises par les organes des plantes sont des attractifs bien connus. Plusieurs substances sont émises simultanément et c’est cet ensemble qui est capté par l’insecte. Ces odeurs sont transportées par le vent avec une très forte dilution au-delà de quelques centimètres autour des plantes elles-mêmes. À défaut de trouver les plantes hôtes recherchées à proximité, les femelles de certaines espèces peuvent parcourir de très grandes distances.

Pour une même espèce de plantes, des différences variétales peuvent se concrétiser par des compositions des « bouquets » d’odeurs différentes et donc une attractivité différente. Le plus souvent, les molécules sont semblables, mais ce sont leurs proportions entre ces molécules qui diffèrent.

La proximité immédiate de plantes différentes peut perturber la perception par les insectes. Le cas du doryphore est bien connu, l’attractivité de la pomme de terre est réduite en cas de présence simultanée de tomates qui sont pourtant de la même famille botanique.

Les odeurs peuvent être fortement diluées par le vent. Lorsqu’elles perdent la perception d’un bouquet d’odeur, certaines espèces d’insectes se rapprochent du sol en attendant une nouvelle perception (exemple, Delia antiqua, la mouche de l’oignon) alors que d’autres se laissent emporter par le vent jusqu’à ce que celui-ci ramène à nouveau des odeurs favorables.

Arrivé à proximité des plantes hôtes, l’insecte se basera sur ses capteurs visuels qui lui permettent de s’orienter grâce à la couleur, la forme et la taille.

Facteurs influençant la recherche de l’hôte

Le vent transporte les insectes. Les exemplaires de petite taille sont souvent interceptés par les haies bordant une parcelle maraîchère. Lorsque le vent a une vitesse supérieure à 2 m par sec soit 7,2 km/h, l’insecte est significativement perturbé dans sa recherche de l’hôte.

Les variations rapides de la pression atmosphérique perturbent les insectes et certaines espèces adoptent un comportement de fuite.

La présence d’une population d’un ravageur déjà installée est perçue par le nouvel arrivant selon plusieurs mécanismes selon les espèces. Il y a donc une régulation des populations d’une même espèce ou d’espèces au comportement alimentaire semblable.

Par contre, la présence de dégâts aux plantes dus à un ravageur avec développement de pourritures secondaires attirera d’autres espèces au régime alimentaire ou aux besoins de reproduction adaptés.

Sur la plante hôte, les insectes auront un comportement spécifique : les uns s’assureront par le toucher ou par le goût de la bonne espèce végétale et pondront sur les plantes. D’autres iront pondre dans le sol au pied de la plante.

En pratique

Les progrès dans la connaissance du comportement des insectes à l’égard des plantes hôtes progressent à grands pas.

Le comportement d’une espèce ne peut pas être extrapolé à une autre. Des mécanismes attractifs entre les plantes et les insectes sont constatés aussi pour les espèces auxiliaires qui aident le maraîcher en régulant les populations de ravageurs. Ce sont les cultures elles-mêmes, mais aussi et surtout la diversité des plantes entourant ou voisines des cultures qui seront l’atout pratique. Vu la grande diversité des espèces d’auxiliaires, les bandes fleuries, les haies, les bosquets seront composées d’espèces essentiellement locales et multi-espèces.

Par contre, les mélanges des cultures, les semis ou plantations en parcours zigzagants ne sont pas des moyens de lutte suffisants pour de nombreux cas pratiques, même si ce peut être le cas pour des cultures bien déterminées.

Les recommandations générales comme celles concernant la gestion de l’environnement des parcelles, les haies et les règles générales de base prennent d’autant plus de valeur que les moyens spécifiques sont rares et d’application malaisée. Ces méthodes particulières s’ajoutent aux mesures de base et ne les remplacent en rien.

Les filets anti-insectes sont des barrières efficaces mais bien difficiles à rendre parfaitement efficaces. En laissant quelques plantes de bordures non protégées, les insectes s’y dirigeront « par facilité » ; après le vol, il nous restera à détruire ces plantes sacrifiées. Il en est de même des plantes pièges comme la ciboulette pour la mineuse des Alliacées.

F.

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