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Réconcilier l’agriculture, la biodiversité et le changement climatique?

Le 16 mai, l’Assemblée générale de Belplant s’est tenue à la Citadelle de Namur. Le thème de cette année, « Le règlement sur l’utilisation durable des produits de protection des plantes permet-il de réconcilier l’agriculture, la biodiversité et le changement climatique ? », a permis aux orateurs d’exprimer des points de vue parfois opposés mais aussi d’évoquer des pistes de solution.

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Avec son ambitieux « Pacte Vert » et la stratégie « De la ferme à la fourchette » qui l’accompagne, la Commission européenne tient à devenir la référence mondiale pour une agriculture plus durable, plus neutre sur le plan climatique et plus riche en biodiversité. Le projet de la nouvelle réglementation sur « l’utilisation durable des produits de protection des plantes » ou « SUR » vise principalement à réduire l’utilisation et les risques liés aux produits phytopharmaceutiques et à généraliser l’application de la lutte intégrée. L’Europe voudrait également utiliser à plus grande échelle les nouvelles technologies, comme l’agriculture de précision.

Ne pas laisser les agriculteurs sans solution

Au cours de l’assemblée générale de Belplant, l’Association belgo-luxembourgeoise pour la protection des plantes, plusieurs intervenants ont fait part de leur point de vue sur la meilleure façon d’atteindre les objectifs de la SUR et du Pacte Vert.

Par l’innovation, par exemple, et une gestion politique stable. L’accès rapide à l’innovation agricole contribuerait non seulement à la transition vers une agriculture durable, mais aussi à la réalisation de l’objectif européen d’une plus grande résilience des systèmes alimentaires.

« Les agriculteurs européens doivent disposer de la boîte à outils la plus large possible pour protéger leurs cultures », estime le président de l’association, Sylvain Moissonnier. Et d’ajouter : « En moyenne, il faut compter 12 ans pour qu’une innovation agricole arrive sur le marché. La pression exercée par les ravageurs ou les maladies est permanente, année après année. On ne peut tout simplement pas laisser les agriculteurs sans solution le temps qu’une innovation appropriée émerge ».

Il estime également qu’un cadre réglementaire solide et un système opérationnel efficace et performant sont nécessaires ; ce dernier devant permettre d’apporter des solutions opportunes sur le marché.

Et concrètement ?

Pour Belplant, diminuer les risques que présentent les produits de protection des plantes tout en assurant la sécurité alimentaire des consommateurs ne sera possible que par l’innovation. Les technologies numériques modernes (telles que l’imagerie par satellite, les capteurs de terrain et l’intelligence artificielle) constituent un élément essentiel de l’approche intégrée que préconise par l’association.

C’est pourquoi, d’ici 2030, le secteur européen de la protection des plantes s’est engagé à investir 10 milliards dans l’innovation et 4 milliards dans le développement des produits de protection des plantes d’origine naturelle. À ce jour, le secteur a déjà investi 44 % de cet engagement sur les produits de protection des plantes d’origine naturelle, soit 1,8 milliard d’euros.

De plus, en matière d’économie circulaire, la Belgique s’adjuge la position leader. Depuis 1997, AgriRecover collecte les emballages plastiques vides de produits phytosanitaires, avec un taux de collecte de 90 %. De nombreux pays européens peuvent et vont s’en inspirer.

Des risques réduits… et des inquiétudes

Le ministre fédéral de l’Agriculture, David Clarinval, a, pour sa part, rappelé fermement que les agriculteurs sont des acteurs de la solution et qu’ils jouent déjà depuis des années un rôle important dans la transition écologique. « Pour compléter la boîte à outils, il faut stimuler la recherche d’alternatives durables et efficaces. Les législations doivent être ambitieuses mais réalistes car il est également question de souveraineté alimentaire », détaille-t-il.

Dans la foulée, Dany Bylemans, du centre de recherche flamand pcfruit, a fait part des défis auxquels les chercheurs sont confrontés pour éliminer les insectes nuisibles, tout en préservant les insectes utiles et en garantissant un prix correct pour les producteurs. « Nous devons mieux communiquer avec les consommateurs qui n’acceptent aucun risque, même si ceux-ci ont été incroyablement réduits au cours des années », a-t-il plaidé.

Présentant la vision de plus de 130 organisations non gouvernementales, Sylvie Meekers (Canopea, anciennement Inter Environnement Wallonie), a, quant à elle, indiqué vouloir plus de transparence concernant les différents produits de protection des plantes utilisés par les agriculteurs et les particuliers pour clarifier la présence de substances actives dans les foyers et les eaux de surface. Et de souligner : « We agree to disagree. Mais nous sommes contents d’avoir reçu la possibilité d’exprimer nos inquiétudes concernant les produits phytosanitaires ».

La SUR est-elle la solution ?

In fine, qu’en est-il de la réponse à la question centrale « La SUR est-elle apte à réconcilier l’agriculture, la biodiversité et le changement climatique ? », sujet central de la soirée. La réponse est donnée par Peter Jaeken, en sa qualité de secrétaire général de Belplant.

« Notre association adhère pleinement aux objectifs généraux du Pacte Vert et nous nous engageons à atteindre trois grands objectifs d’ici 2030 : l’innovation, l’économie circulaire, et la protection des personnes et de la planète. Ces engagements aideront les agriculteurs et leur fourniront plus de solutions dans leur boîte à outils. Laissez-nous juste le temps d’opérer le changement ; 2030, c’est demain ! Nous demandons à l’Europe d’investir davantage pour rendre les procédures d’autorisation plus efficaces. Pas plus laxistes, mais plus efficaces. Tout le monde en profitera, que ce soit les agriculteurs, le secteur des produits de protection des plantes, la biodiversité et le climat. »

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