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Libramont, une histoire éternelle

Ils s’ouvrent à nouveau les carnets de chaleur et le temps tellement enroulé sur lui-même et si tenu que la moindre parole l’agite infiniment. Les rais de lumière, luisants et creux on s’y agrippe comme un enfant prendrait une marguerite par le cou. Libramont, sa foire revient exposée aux poussières de l’été et au vent qui passe. L’espace de quatre jours…

Temps de lecture : 6 min

Libramont, la vitrine d’un monde agricole en transition, où « commence un monde durable » devenu « un credo, une ambition, le fil rouge de toutes nos activités de sensibilisation et d’échanges » aime à rappeler Natacha Perat, administratrice de la Foire en parlant encore « d’espace de solutions » pour la définir.

Deux pôles, un village, trois exemples emblématiques

Ces solutions, parlons-en. Pour les chevilles ouvrières de la Foire, elles visent une triple performance. Tout d’abord économique, afin d’assurer une autonomie alimentaire à un prix soutenable par le citoyen et un prix décent à l’agriculteur. Environnementale ensuite afin de contribuer positivement à la restauration de la planète et à la réduction des impacts du changement climatique. Sociale, enfin, pour rendre la profession attirante pour les jeunes générations.

Les organisateurs attendront, cette année encore, environ 200.000 visiteurs  qui partiront à l’assaut des quelque 700 exposants déployés sur le champ de foire.
Les organisateurs attendront, cette année encore, environ 200.000 visiteurs qui partiront à l’assaut des quelque 700 exposants déployés sur le champ de foire. - M-F V.

Autant d’éléments que les organisateurs ont voulu illustrer, pour la présente édition, sous forme de trois exemples qualifiés « d’emblématiques ».

Pour la première fois, la Foire proposera, sous la forme d’un pôle, des vitrines de pratiques culturales portées par un collectif d’acteurs institutionnels et de terrain (l’administration wallonne, Greenotec, Natagriwal, le Cra-w et Fourrages Mieux).

Les visiteurs pourront découvrir des essais culturaux, des outils d’aide à la décision (Oad), le pâturage d’intercultures par les ovins, l’observatoire wallon de la pousse de l’herbe (projet « Sunshine » développé par le Cra-w) combinant données de terrains, satellites et modèles de croissance.

Autre nouveauté, le pôle « OneHealth », dans le Hall 1, qui combine les pôles de santé animale et végétale afin de démontrer l’interaction entre culture et élevage.

« On y retrouvera les professionnels de ces écosystèmes et des acteurs actifs dans la protection de toutes les santés » a précisé Natacha Perat devant la presse.

Les concours, qu’ils soient bovins, équins ou ovins,  demeurent un important pôle d’attractivité de la foire.
Les concours, qu’ils soient bovins, équins ou ovins, demeurent un important pôle d’attractivité de la foire. - P-Y L.

Les organisateurs ont déployé, en voisinage immédiat, le pôle digital, convaincus que le numérique permet de passer d’une agriculture intensive en intrants à une agriculture intensive en savoirs.

Enfin, sur 800m², le Village Biosourcé, porté par un collectif d’acteurs spécialisés dans le biosourcing offrira un programme multiformats qui touchera aussi bien à la sensibilisation, la vulgarisation et au débat afin d’assurer la transition vers un monde plus durable.

La Wallonie, laboratoire de l’agriculture européenne ?

Mais que ce serait la Foire de Libramont sans son passé, ses racines et les moments forts qui ont jalonné son histoire, même récente.

À quelques jours de l’ouverture de la Foire, son président Jean-François Piérard a cité le professeur Olivier De Schutter, ancien rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, lequel avait déclaré, lors de la séance inaugurale de 2022, que « les changements climatiques et l’érosion de la biodiversité allaient contraindre l’agriculture wallonne à se réinventer, mais que son caractère familial et lié au sol la mettrait dans une position plutôt favorable ».

Il est vrai qu’avec sa diversité de modèles et de territoires, son caractère familial fort, son respect du lien sol-plante-animal-humain qui améliore son autonomie, notre région pourrait bien devenir un laboratoire de l’agriculture européenne.

Pour ce faire, elle doit performer à plusieurs niveaux. Economique, d’abord, pour assurer l’autonomie alimentaire de la population et un prix décent au producteur. Environnemental, ensuite, pour restaurer les écosystèmes et améliorer la biodiversité. Social, enfin, pour rendre la profession attirante pour les jeunes générations et retisser les liens avec la société.

Érosion du nombre d’exploitations… et du cheptel

Et pourtant, nombreux sont les nuages qui s’accumulent à l’horizon depuis quelques années. Faut-il encore rappeler que le nombre d’exploitations subit une lente érosion année après année ? Statbel, l’office belge des statistiques, nous apprend ainsi qu’en 2021, la Belgique abritait 36.012 exploitations, dont 12.728 en Wallonie « contre plus de 20.000 en 1990 » a rappelé, pour sa part, Jean-François Piérard.

« En 30 ans, on a multiplié par deux la superficie moyenne des exploitations, actuellement de 58,2 hectares contre 25 hectares en 1990, tandis que l’on divisait par deux leur nombre » a précisé le président de la Foire.

Le cheval toujours au coeur de la Foire de Libramont !
Le cheval toujours au coeur de la Foire de Libramont ! - P-Y L.

Plus inquiétant, on assiste pour la première fois à une baisse, certes légère, de la SAU et des cheptels d’animaux. Une tendance particulièrement prégnante en haute-Ardenne, terre de la Foire et d’élevage, où les exploitations de bovins ont enregistré une chute de 63 % par rapport à 1990. C’est dire toute l’importance de la transmission a insisté M. Piérard, celle des terres, de savoirs et de valeurs pour ne pas risquer… la fin de l’agriculture.

« L’Agriculture, une Histoire sans faim ? »

Pour les organisateurs de la Foire, la Wallonie semble néanmoins tout à fait prête à soutenir et générer le développement d’agro-éco-systèmes durables et résilients, en maintenant la productivité pour assurer l’autonomie alimentaire de la population tout en optimisant les cycles du carbone et de l’azote pour contribuer à apporter des solutions aux défis climatiques et environnementaux.

Cette agriculture nourricière, locale, autonome et transmissible permettra-t-elle de faire de l’agriculture, « une Histoire sans faim » ? Par cette interrogation presque existentielle, les organisateurs espèrent… nourrir la réflexion et la curiosité des visiteurs grâce à des débats, des conférences, des animations et une série de parcours.

Allées, pitch et parcours

Un parcours sera dédié au bio et permettra de découvrir la qualité et la diversité du paysage bio wallon, tant du côté des producteurs que des visiteurs qui auront l’opportunité d’acheter de nombreux produits à déguster sur place ou à emporter.

Le parcours « famille » revient avec une foulitude d’animations proposées dans la désormais célèbre « Ferme enchantée » qui a été relocalisée pour cette édition.

Le centre d’enseignement agronomique de la province de Liège (La Reid) et l’Awé, installés sur 2.000 m², proposera aux familles une immersion dans un univers mettant en valeur les métiers et les produits issus du monde agricole. Ce sera l’occasion, pour les petits et plus grands d’approcher différentes races d’animaux et d’apprendre les bons gestes les soigner. Quant aux enfants, ils pourront à nouveau s’initier à la conduite d’un tracteur… en version mini.

Le Hall 3 accueillera des conférences, d’animations et des… pitch, un concept visant à capter brièvement l’attention d’un public qui est déjà sollicité de toutes parts, afin de lui faire passer un message et lui donner envie d’approfondir un sujet ultérieurement.

La formation étant un maillon indispensable à la transmission, les organisateurs ont décidé d’accueillir plusieurs centres de formation, avec notamment un parcours informatif et ludique intitulé « Envie d’agronomie ? Venez nous aider à semer des graines de curiosité ! » proposé par le centre d’enseignement agronomique de la province de Liège et des ateliers participatifs animés par l’Ifapme, sur des sujets tels le fonctionnement d’un moteur connecté à un ordinateur, de l’hydraulique et de l’électricité.

 

Pôle lait et la « Transhumance »

On notera aussi le pôle « Lait » situé dans le Hall 1, vaste espace de rencontres, d’échanges et de solutions pour tous les acteurs de la filière et ses secteurs dépendants (matériel de traite et d’élevage spécifique, services, conseils, laiteries, génétique animale, animaux en exposition, organismes d’encadrement, bio-méthanisation).

Et qui dit secteur laitier, santé animale et élevage, dont l’Allée qui est consacrée à ce dernier, dit « Transhumance », un moment très attendu qui sera suivi du « Défilé Général », le dimanche 30 juillet.

Profil du sol et sa préservation

À l’autre bout du champ de foire, une alliance menée par le réseau Terraé, ainsi que par la « House of Agroecology », proposera un profil de sol, dont l’objectif est de vulgariser et d’accompagner les agricultrices et agriculteurs dans la mise en place de pratiques respectueuses et de préservation des sols.

Marie-France Vienne

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