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Magasins D’ici: Réduire son empreinte environnementale en aidant les producteurs à améliorer la leur!

Enseigne de produits locaux active depuis 2013, D’ici fête ses 10 ans. L’occasion de faire le point sur une décennie de développements, mais aussi d’implémenter un nouveau projet bénéfique au distributeur comme à ses fournisseurs etses clients : l’Eco Impact.

Temps de lecture : 8 min

Le premier magasin D’ici a ouvert ses portes avec pour objectif de contribuer au développement d’un comportement d’achat en faveur d’une consommation alimentaire locale et responsable. « On souhaitait montrer qu’il était possible de proposer un commerce alimentaire connecté aux producteurs, avec une ambition sociétale forte et l’espoir d’inspirer d’autres projets. L’idée était aussi de proposer des prix qui rémunèrent les producteurs tout en restant abordables pour les clients. On est clairement dans un ménage à trois : distributeur/producteurs/clients », explique Frank Mestdagh, cofondateur gérant de D’ici.

Une vision large du circuit court

Pour la marque, la notion de circuit court va plus loin qu’un nombre de kilomètres ou d’intermédiaires. Il s’agit plus particulièrement d’une relation transparente entre plusieurs acteurs de l’économie obéissant à 4 critères : la création de liens sociaux et de coopération, l’équité dans les échanges financiers, une approche participative et une logique pédagogique. Les circuits courts représentent une approche économique multiforme : novatrice, collaborative, contributive et donc sociale dans une dimension de partage. « C’est une philosophie qui passe aussi par un environnement de travail adéquat. On fait en sorte que le consommateur se réapproprie son alimentation, qu’il sache où et comment c’est fait ».

Frank Mestdagh espère bien mobiliser  ses fournisseurs autour de son projet  d’affichage environnemental.
Frank Mestdagh espère bien mobiliser ses fournisseurs autour de son projet d’affichage environnemental. - D.J.

2 magasins et 200 producteurs

La marque D’ici comprend aujourd’hui deux magasins, l’un situé à Naninne et l’autre, ouvert depuis 2021, à Wépion. Ceux-ci proposent 2.400 produits locaux en provenance de 200 producteurs. « Le premier magasin a ouvert en 2013 avec 70 producteurs. Nous y avons assez vite adjoint un potager qui est toujours d’actualité ainsi qu’un verger. Ce magasin était rentable après 2 ans. Un restaurant a alors été ouvert afin de pouvoir faire goûter les produits du commerce ».

En 2016, un nouveau magasin ouvre ses portes à Hannut mais, il les referme après 1 an. « On s’est remis en question et nous avons constaté que nous n’étions peut-être pas tout à fait au point au niveau du fonctionnement de l’équipe. Nous avons entamé une réflexion sur le management participatif et la durabilité ».

À la sortie de la crise Covid, en 2021, un nouveau magasin voit le jour à Wépion. Malheureusement la crise économique de 2022 pointe le bout du nez. Néanmoins, les gérants restent positifs malgré les crises et entrevoient une reprise du chiffre : « À la fin juin, on était à +5 % à Naninne et + 8,5 % à Wépion par rapport aux chiffres 2022 ». L’enseigne investit dans l’avenir puisqu’elle a récemment acquis un terrain en vue d’y installer un 3e magasin d’ici 2025.

D’ici souhaite aussi objectiver et augmenter sa durabilité et cela passe notamment par l’espoir d’obtention d’une certification B Corp et le déploiement du projet Glimpact pour une mesure de l’impact environnemental de tous les produits proposés à la vente.

Vers une certification B Corp

« En entamant la démarche de certification B Corp, on a formalisé le fait qu’on voulait être une entreprise à mission positive. Cette certification est octroyée à des sociétés qui veulent avoir un impact sur la planète tout en se préoccupant de leurs salariés et clients. En bref, nous avons répondu à une batterie de questions concernant des exigences environnementales, sociétales, de gouvernance, mais aussi de transparence envers le public. Celles-ci nous ont aussi permis de voir de quelle façon nous pouvons encore nous améliorer à différents niveaux ».

Le projet Glimpact

Depuis octobre 2021, D’ici s’est également lancé dans un projet de taille : évaluer et afficher l’empreinte environnementale de tous les produits alimentaires locaux distribués dans ses magasins.

Pour ce faire, le magasin collabore avec Glimpact. Cette start-up propose aux productrices et producteurs d’auditer leurs produits pour comprendre leur empreinte environnementale. Pour ce faire, elle a développé son propre outil d’évaluation, basé sur une méthodologie scientifique : la méthode PEF (Product Environnemental Footprint). En analysant 16 catégories d’impact, et toutes les étapes du cycle de vie d’un produit, on obtient ainsi un « score » de référence.

Une méthode commune, harmonisée et scientifique

Développée sous l’égide de la Commission Européenne au début des années 2010, mise en œuvre à partir de 2018, la méthode PEF permet de comprendre quel niveau du cycle de vie d’un produit (conception, transport, fin de vie…) a le plus d’incidence. « L’empreinte environnementale ne se réduit pas à sa seule empreinte carbone. Si c’est le cas, on passe à côté des deux tiers d’impact d’un produit ou d’une organisation. Il faut mesurer d’autres facteurs, tels que les ressources en eau, les émissions de particules fines, la toxicité, ou encore le type d’emballage. La méthode impose de mesurer 16 catégories d’impact et les lie aux limites de la terre, c’est-à-dire les limites au-delà desquelles la planète ne peut plus supporter ces déséquilibres et rentre dans une phase de déstabilisation. Chacun des axes est analysé à la loupe afin de fournir un score le plus précis possible. L’intérêt de la méthode est qu’elle peut se décliner pour une organisation comme un produit mais, surtout, qu’elle constitue une base commune, harmonisée et scientifique qui a fait l’objet d’un consensus. Elle a le mérite d’exister et tout le monde devrait s’y référer. Ceux qui ne l’appliquent pas sont dans l’erreur. Depuis le 16 décembre 2021, la Commission Européenne recommande d’ailleurs aux États membres d’utiliser la méthode PEF pour tout ce qui est durable, comme repris dans sa déclaration environnementale. Glimpact est basé sur cette méthode et nous avons développé la technologie qui la rend accessible à tous les acteurs industriels et autres », explique Christophe Girardier, CEO et cofondateur de Glimpact.

«Faire croire au consommateur qu’en changeant le packaging, on va changer le monde est du greenwashing. L’emballage intervient pour moins de 5 % dans l’impact d’un produit.  Ce qui a de valeur, c’est de pouvoir démontrer ce qu’on a fait et montrer ce que ça change », dit Christophe Girardier de Glimpact.
«Faire croire au consommateur qu’en changeant le packaging, on va changer le monde est du greenwashing. L’emballage intervient pour moins de 5 % dans l’impact d’un produit. Ce qui a de valeur, c’est de pouvoir démontrer ce qu’on a fait et montrer ce que ça change », dit Christophe Girardier de Glimpact.

Gagnant-gagnant

La collaboration de D’ici avec Glimpact a comme particularité qu’il s’agit de la première fois qu’un distributeur met en place la méthode pour lui-même et la déploie ensuite auprès de ses producteurs. « D’ici n’est pas le premier à faire de l’affichage environnemental, mais c’est bien le premier à l’appliquer dans le respect strict de la méthode PEF », affirme le cofondateur de Glimpact.

L’évaluation et le diagnostic de l’empreinte environnementale globale des magasins D’ici ont d’abord été réalisés sur base de ses émissions directes et indirectes. Il en est ressorti que les produits achetés et revendus par l’enseigne représentent 92 % de l’impact environnemental. C’est donc en aidant ses fournisseurs à réduire l’impact de leurs produits qu’elle pourra réduire son empreinte environnementale globale.

« Le profil des magasins D’ici n’est pas différent des autres. Ceux qui n’en parlent pas ne sont pas sérieux. Dans leur cas précis, la catégorie « viandes, poissons, œufs et alternatives » représente 47 % de l’impact des produits achetés par l’enseigne alors qu’elle constitue seulement 15 % du chiffre d’affaires », précise Christophe Girardier.

« En tant qu’acteur de la distribution, nous pouvons agir sur les 8 % qui nous concernent directement, ce que nous allons bien sûr faire, mais, pour le reste, nous ne pouvons pas bouger seuls. Nous n’avons pas d’impact sur les produits que nous choisissons. Cependant, nous pouvons aider les producteurs à objectiver l’impact de leurs productions. La démarche n’est pas faite pour juger mais pour leur donner la possibilité d’identifier les leviers sur lesquels ils peuvent agir pour s’inscrire dans une démarche d’amélioration », indique Franc Mestdagh.

L’outil a déjà été testé pendant plus d’un an auprès de certains producteurs. En pratique, ceux-ci sont mis en contact avec Glimpact auprès duquel ils confient en toute discrétion leurs données d’activités. « Nous utilisons ces données ainsi que des données de référence de base et nous leur appliquons notre algorithme. Cela donne lieu à un score environnemental global. Plus il est élevé, plus l’impact est important. Celui-ci peut être comparé au sein d’une même catégorie de produits », explique Christophe Girardier. Les producteurs accèdent aux résultats et identifient les leviers d’action. « Nous offrons à nos fournisseurs l’établissement du diagnostic et du score. Ensuite, ils peuvent poursuivre le cheminement avec Glimpact et travailler sur des leviers d’écoconception, c’est-à-dire que la société peut les guider dans la création de nouveaux produits plus durables », poursuit Frank Mestdagh.

Déploiement de l’affichage environnemental d’ici 2025

L’objectif de l’enseigne est d’évaluer l’ensemble des 2.400 produits proposés à la vente d’ici janvier 2025. Cette évaluation se formalisera par l’affichage d’un QR code offrant la possibilité aux consommateurs de consulter l’éco impact des produits. Ceux non évalués seront stoppés. « On souhaite vraiment engendrer une prise de conscience car, sans ça, il n’est pas possible de se remettre en question. Les clients pourront choisir en connaissance de cause et ce choix pourra également inciter les producteurs à agir. Nous sommes dans un cycle vertueux.

L’affichage des résultats obtenus se fera via un QR code en magasin.
L’affichage des résultats obtenus se fera via un QR code en magasin.

Ce qui nous a convaincus de mettre en place cette démarche est, qu’en mesurant tout cela, on peut facilement réduire de 15 % notre impact. Cela passe juste par une prise de conscience et quelques changements. Si on peut simplement inciter quelques acteurs à faire de même, ça serait génial. Nous sommes tous concernés pas la situation écologique et c’est un cadeau qu’on devrait se faire mutuellement. De plus, aujourd’hui tout cela se déroule sur base volontaire mais, demain, ça deviendra sans doute obligatoire. Alors, pourquoi ne pas anticiper ? ».

Delphine Jaunard

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