Un nouvel or jaune

Les consommateurs ne s’en rendent pas encore compte… Mais le prix du beurre atteint actuellement des sommets, tutoyant les 8.000€/t (7.925€/t en date du 08/09), soit environ un millier d’euros de plus qu’à l’entame de l’été. L’envolée est même nettement plus importante que ce que ce chiffre laisse entrevoir. Ainsi, mi-septembre 2023, la tonne de beurre se négociait 4.565€. Et les prix devraient encore croître à l’approche des fêtes de fin d’année, période de forte demande.
En cause ? La fièvre catarrhale ovine (FCO)… La maladie, qui ne cesse de se propager à travers le Vieux Continent, a déjà eu un impact sur les prix de la viande ovine, dont on sait que la Belgique est déficitaire. Les conséquences de l’épidémie se font maintenant largement ressentir sur la production laitière européenne et, par ricochet, ses dérivés.
Dans les pays touchés, la baisse de production est significative, même s’il est difficile d’en livrer une estimation précise. En Wallonie, le Comité du Lait fait état d’un recul de près de 6 % en août, par rapport au même mois un an plus tôt. Certains évoquent des pertes allant de 10 à 15 %, voire davantage dans quelques exploitations. Et cela, sans compter les autres impacts que peut avoir le virus sur les cheptels.
Ce déséquilibre entre l’offre – en baisse – et la demande – stable – est à l’origine de cette fulgurante croissance des prix du beurre. Cela fait craindre un impact sur le portefeuille des consommateurs, qui ne devraient toutefois en observer les premières conséquences que dans plusieurs semaines. D’une part, par l’augmentation du prix du paquet de beurre lui-même. D’autre part, par la hausse des prix des produits ayant ce nouvel or jaune pour ingrédients. En effet, l’industrie agro-alimentaire, confrontée à une matière première plus coûteuse, pourrait être tentée de répercuter l’augmentation des coûts de production sur les prix de vente.
In fine, ni les agriculteurs, qui ne tirent guère de profit de la conjoncture économique actuelle, ni les consommateurs n’en sortiraient gagnants. Cependant, la situation devrait perdurer quelque temps, le prix du beurre n’ayant pas encore atteint son pic selon certains observateurs. Même si le retour de conditions automnales devrait affaiblir les populations de culicoïdes, et donc la présence de FCO, il faudra plusieurs semaines, voire mois, pour que la production laitière revienne à la normale en Europe. Les éleveurs devront prendre le temps de soigner leurs animaux, voire de reconstituer une partie de leur troupeau pour ceux ayant été confrontés à des cas de mortalité.
Si le lait est souvent qualifié d’or blanc, le beurre serait-il l’or jaune de demain ? Suivra-t-il son cousin aux reflets brillants dont les cours ne cessent, eux aussi, de grimper sur les marchés financiers ? Il n’est pas possible de répondre à ces questions aujourd’hui, tant elles dépendent de plusieurs facteurs. Mais une chose est sûre, le beurre sera au cœur de l’attention dans les mois à venir. Ce qui permettra aussi de mettre en exergue les difficultés auxquelles sont confrontés les éleveurs, qui ne doivent pas être les grands oubliés de cette montée des prix. De leur point de vue, elle est synonyme de crise sanitaire, difficultés quotidiennes et angoisse. Ne l’oublions pas !