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Trump fait feu sur l’agriculture!

Il n’y a maintenant plus aucun doute, la guerre commerciale mondiale, voulue par le président américain Donald Trump, est bel et bien déclarée. Le locataire de la Maison Blanche bouleverse le système commercial global en lançant des croisades tarifaires tous azimuts. La dernière en date : l’agriculture devra composer avec des droits de douane à compter du 2 avril. Ce ne sera pas sans conséquences pour le secteur agroalimentaire européen alors que les États-Unis sont la deuxième destination privilégiée des produits agricoles de l’UE derrière le Royaume-Uni.

Temps de lecture : 6 min

À peine plus de deux mois se sont écoulés depuis l’investiture du président américain mais déjà, le second mandat de Donald Trump à la tête des États-Unis et sa politique fiscale agressive bouleversent le système commercial mondial.

Attaques ciblées

Après s’être attaqué à la sylviculture, à l’acier et à l’aluminium, et avoir promis la mise en place de « droits de douane réciproques » sur l’ensemble des marchandises importées, le locataire de la Maison Blanche a annoncé, le 3 mars la mise en place de droits de douane sur les importations de produits agricoles aux États-Unis à compter du 2 avril.

« Aux grands agriculteurs des États-Unis : préparez-vous à commencer à produire beaucoup de produits agricoles à vendre à l’intérieur des États-Unis », indique-t-il dans son message. Et d’ajouter : « Amusez-vous bien ! ».

Une annonce qui a semé un « vent de panique » sur les marchés agricoles mondiaux. En dix jours, le maïs a perdu plus de 11 % à la Bourse de Chicago, tombant le 3 mars à 4,36 dollars le boisseau, son plus bas niveau depuis la mi-décembre. Sur la même période, le blé plongeait de 12 %, à 5,9 dollars, tandis que le soja reculait de plus de 5 %, sous les 10 dollars, au plus bas depuis janvier. Quoi qu’il en soit, les attaques ciblées sur l’agriculture marquent une nouvelle étape dans la politique commerciale protectionniste voulue par le milliardaire new-yorkais.

L’empire contre-attaque

En réponse à cette annonce mais surtout à l’entrée en vigueur, le 4 mars, des droits de douane supplémentaires sur les importations américaines en provenance du Canada, du Mexique et de la Chine, Pékin a annoncé la mise en place, dès le 10 mars, de mesures de rétorsion ciblant particulièrement des produits agricoles des États-Unis. Dans le détail, un droit de 15 % sera imposé sur les importations américaines de poulet, de blé, de maïs et de coton. En outre, un droit de douane de 10 % sera appliqué sur le sorgho, le soja, le porc, le bœuf, les produits aquatiques, les fruits, les légumes et les produits laitiers en provenance des États-Unis.

L’empire du Milieu indique également que les marchandises qui ont été expédiées du lieu de départ avant le 10 mars et importées entre le 10 mars et le 12 avril ne seront pas soumises aux droits de douane supplémentaires. « L’imposition unilatérale de droits de douane par les États-Unis porte atteinte au système commercial multilatéral, alourdit la charge pesant sur les entreprises et les consommateurs américains et sape les fondements de la coopération économique et commerciale entre la Chine et les États-Unis », déplore le ministère chinois des Finances.

La réaction européenne, elle, se fait attendre alors que la crise diplomatique et géopolitique liée à l’invasion russe en Ukraine apparaît prioritaire. Mais nul doute que l’exécutif européen devrait réagir alors que le Vieux Continent est directement ciblé par des droits de douane de 25 % sur ses exportations (dont la date d’application se fait attendre).

Sauver le soldat agricole

Les représailles tarifaires européennes, si elles sont appliquées, devront être ciblées afin de minimiser les dommages qu’elles pourraient infliger à l’économie européenne, analyse Alan Matthews, professeur émérite de politique agricole européenne au département d’Économie du Trinity College de Dublin (Irlande).

Dans une étude publiée le 27 janvier sur son blog CAP Reform, il envisage plusieurs possibilités de riposte sans pour autant parvenir à une réponse pleinement satisfaisante. La première d’entre elles est celle, pour l’instant, privilégiée par Bruxelles : le dialogue. D’après le chercheur, cette approche consisterait à « offrir quelque chose à Trump en échange de l’exemption de droits de douane de l’UE, afin qu’il se sente satisfait d’avoir gagné » par exemple un engagement à acheter plus de soja ou de gaz américain. Toutefois, rapporte Alan Matthews, cette option ne fonctionne que si les visées du président américain sont « purement transactionnelles ».

La deuxième solution est celle de la procédure judiciaire devant l’organe de règlement des différends de l’OMC (ORD). Mais celle-ci n’apporte aucune garantie qu’une éventuelle décision d’un groupe spécial de l’organisation genevoise sera respectée par l’administration Trump, ce dernier ayant «   aussi peu de respect pour l’OMC que pour la science climatique », estime Alan Matthews. En outre, le blocage continuel par les États-Unis de l’organe d’appel de l’ORD met à mal la fonction juridictionnelle de l’OMC. Et le délai de traitement des affaires, qui peut courir sur plusieurs années, semble peu efficace sur le court terme.

Enfin, la dernière possibilité évoquée est celle des mesures de rétorsion. À ce titre, Alan Matthews met notamment en avant l’utilisation du nouvel instrument anti-coercition, adopté en novembre 2023 et jusqu’à présent inutilisé. Mais le chercheur estime que des rétorsions «   ne devraient pas non plus apporter beaucoup de soulagement   » aux secteurs particulièrement visés par les sanctions américaines, l’espace laissé par les importations de vins, de produits laitiers ou d’huiles végétales outre-Atlantique n’étant pas suffisamment significatif pour absorber la production européenne qui ne serait plus envoyée aux États-Unis.

Des conséquences sur les marchés

De son côté, la Rabobank analyse qu’« une guerre commerciale mondiale aurait des effets qui iraient bien au-delà des flux commerciaux initiaux en raison des interactions entre régions et secteurs ». Dans un document publié le 27 février, avant l’annonce par Donald Trump de droits de douane sur les produits agricoles, la banque néerlandaise examine les conséquences sur l’agriculture et l’alimentation de l’UE des potentielles taxes américaines.

Premier élément : « D’un point de vue commercial, les États-Unis sont plus importants pour l’UE que l’inverse », avance la Rabobank. En effet, les États-Unis achètent pour 38 milliards € (Md€) de produits agroalimentaires en provenance de l’UE, tandis qu’à l’inverse, l’UE n’importe que 14 Md€ de produits américains. En outre, Washington échange davantage, en importations et en exportations, avec le Canada et le Mexique qu’avec l’UE alors que les États-Unis sont le deuxième marché d’exportation de l’UE. Dans le détail, la Chine et le Japon sont des marchés d’exportation plus importants pour les États-Unis que pour l’UE.

Quelles filières agricoles touchées ?

Les auteurs ajoutent également que l’UE exporte principalement des produits alimentaires à haute valeur vers les États-Unis et qu’il est plus difficile de trouver d’autres marchés capables et désireux de payer ces produits que pour les produits de base, tels que le soja, que les États-Unis exportent vers l’UE.

Selon la Rabobank, la mise en place de ces sanctions pourrait alors entraîner des répercussions importantes pour les entreprises européennes. Cela rendra notamment les produits de l’UE plus chers et mettra à mal leur position concurrentielle. Ainsi, le secteur des machines agricoles serait le plus touché car les débouchés seraient plus complexes à trouver.

Des conséquences négatives sont également attendues pour les boissons, les fruits et légumes, les produits laitiers, mais la banque estime qu’elles seront de moindre importance en raison de leur élasticité prix.

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