La conserverie itinérante et solidaire de la Province de Liège fête ses dix ans
Des producteurs locaux, un chef étoilé, un député provincial, et une ambiance chaleureuse et conviviale : tels furent les ingrédients savamment orchestrés par le Cpfar (Centre Provincial de Formation en Agriculture et en Ruralité) pour célébrer, le 14 avril dernier à Crisnée, le 10e anniversaire de la conserverie solidaire et itinérante. Un projet inspirant dont la renommée et le succès transcendent désormais les frontières de la province de Liège.

Son histoire est celle d’un réseau associatif, composé d’Asbl, de Cpas, de plans de cohésion sociale et d’initiatives citoyennes engagées dans le secteur vert, qui s’est mobilisé, en 2013, pour créer des lieux de rencontre autour de la valorisation des surplus de fruits et légumes.
Un projet d’intégration sociale original
L’objectif est alors de partager des techniques de conservation permettant à tous d’en bénéficier tout au long de l’année. C’est ainsi qu’est née l’idée d’une conserverie mobile, un outil capable de répondre aux besoins locaux, d’accompagner le public dans l’apprentissage des méthodes de conservation, et de semer les graines de l’autonomie et de la solidarité.
Le projet a bénéficié d’un cofinancement du Service Public Fédéral Intégration sociale et Lutte contre la Pauvreté, ainsi que de l’Agence du Fonds social européen (FSE). Ce soutien s’est inscrit dès la programmation 2014-2020, avec une première enveloppe financière octroyée à partir de l’année 2015.
La Province de Liège s’est, quant à elle, notamment investie en acquérant le véhicule, en l’aménageant et en le rendant opérationnel, permettant à la conserverie de prendre la route.
Trois modules de formations
Enfin, le troisième module permet aux futurs producteurs de se familiariser avec les enjeux de traçabilité, aussi bien en amont qu’en aval du processus de transformation. Ils y apprennent également les bases de l’étiquetage, un aspect essentiel à la commercialisation de leurs produits.
Des milliers de kilomètres et de personnes formées
Depuis lors, « ce sont des milliers de kilomètres parcourus à travers la province et 1.254 personnes formées, des dizaines de collaborations avec des associations (Cpas, centres sociaux, etc.), des parcours professionnels initiés, et même deux projets similaires inspirés de notre modèle liégeois qui ont vu le jour en France », comme l’a souligné le député provincial à l’Agriculture, André Denis.
Depuis mai 2023, une version fixe a vu le jour sur le site de Crisnée, offrant des équipements plus professionnels et permettant d’approfondir certaines formations qui ne pouvaient être dispensées dans l’unité mobile pour des raisons techniques.
La conserverie se révèle être un outil précieux pour accompagner les personnes en situation de précarité vers une plus grande autonomie alimentaire.
Les grands types de conservation
Celles et ceux qui souhaitent se former découvrent également les différentes méthodes de conservation. Celle par le sucre (confitures, gelées, compotes, fruits confits), repose sur sa capacité à inhiber la croissance des micro-organismes (bactéries, levures, moisissures) en créant un environnement osmotique défavorable.
On parle aussi de la conservation par le sel qui constitue l’une des plus anciennes techniques de préservation. Elle agit en retirant l’eau des aliments et en empêchant le développement des micro-organismes, qui ont besoin d’humidité pour survivre. La conservation dans le vinaigre convient, quant à elle, parfaitement pour les légumes que l’on veut utiliser comme condiments tels que les cornichons, oignons, échalotes.
On citera aussi la conservation dans l’huile et dans l’alcool, lequel dénature les protéines des micro-organismes et perturbe leurs membranes cellulaires, les rendant inactifs. À partir d’environ 15 à 18 % d’alcool, l’environnement devient hostile à la plupart des germes. Cette méthode concerne essentiellement les fruits (cerises, prunes, poires, raisins…).
Les formateurs du Cpfar ont également évoqué la conservation par déshydratation, une technique qui consiste à retirer l’eau contenue dans les aliments, afin d’empêcher le développement des micro-organismes et des enzymes responsables de la dégradation. Sans humidité, les bactéries, levures et moisissures ne peuvent pas se développer.
Ce type de conservation convient à certains fruits (pomme, poire, banane), légumes (tomate, champignons), viandes et poissons (morue séchée), herbes aromatiques (thym, menthe, origan).
Enfin, la lactofermentation (voir en p. 8) est une méthode qui gagne en popularité et s’impose comme une véritable tendance en cuisine, notamment parmi les chefs engagés dans une démarche artisanale et durable.
Un outil couronné par deux prix
Le projet a remporté plusieurs distinctions. Dès 2014, la conserverie mobile reçoit le Prix belge de l’Énergie et de l’Environnement pour son approche écoresponsable et sociale.
En 2021, son rayonnement prend une dimension européenne lorsqu’elle remporte les suffrages du jury des RegioStars Awards, un concours organisé chaque année par la commission européenne. Ce prix récompense les initiatives exemplaires financées dans le cadre de la politique de cohésion de l’UE.
Le Cpfar, un centre multifonctionnel au service de la ruralité
Les festivités organisées autour de l’anniversaire de la conserverie itinérante et solidaire ont également permis de mettre en lumière les nombreuses activités du Cpfar, fondé en 1974 et revitalisé en 2012. Depuis lors, le centre propose une offre cohérente et diversifiée de formations dans les domaines de l’agriculture, de l’apiculture, de l’horticulture, de la viticulture, en s’appuyant sur des outils innovants.
Au-delà de la conserverie mobile – véritable locomotive du centre –, les activités s’inscrivent dans un ensemble pédagogique comprenant, une miellerie mobile (voir Le Sillon Belge du 19 octobre 2023), un vignoble didactique, un potager et un rucher à vocation éducative.
C’est sur le site de Crisnée que sont hébergés divers espaces pédagogiques, où une multitude de formations sont dispensées. Parmi les projets à venir, on peut citer l’initiative Interreg « Yes WiClim », qui débutera le 1er mai. Ce programme ambitieux établira des ponts entre viticulture et enjeux climatiques, en collaboration avec des partenaires luxembourgeois, mosellans, ainsi que l’Université de Liège
.