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Une bonne hygiène des bottes est tout sauf un détail!

Dans une exploitation agricole, les dangers en matière de biosécurité ne sont pas seulement déterminés par la gravité d’une éventuelle contamination, mais aussi par la fréquence à laquelle se produisent des actions dites « à risques ». Les tâches quotidiennes ou routinières, aussi insignifiantes semblent-elles, peuvent, par leur répétition, devenir un facteur favorable à la propagation de certaines infections. L’usage de bottes en fait partie…

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Une fois ses bottes chaussées, tout éleveur entre et sort plusieurs fois par jour de l’étable, se déplace dans les diverses zones du bâtiment et de la ferme et approche différentes catégories d’animaux. Chaque jour, lesdites bottes constituent donc un vecteur potentiel de transmission de germes au sein de la ferme. C’est pourquoi leur hygiène est tout sauf un détail !

Transmettre des bactéries et des virus

La surface des bottes retient le fumier, la litière et l’humidité, dans lesquels des millions de germes pathogènes peuvent survivre. Des bactéries telles que la salmonelle et Escherichia coli, mais aussi des virus tels que ceux de la peste porcine africaine ou de la grippe aviaire, peuvent être transmis d’une exploitation ou d’une zone à l’autre par leur biais.

Des études sur le terrain montrent que de simples particules de fumier, retrouvées sur les semelles, peuvent rester infectieuses pendant des heures, voire des jours. Cela fait des bottes, en raison de leur utilisation continue, un maillon important dans la chaîne de propagation des infections.

Dès la porte

Les plans de biosécurité décrivent souvent des principes généraux, tels que la quarantaine à l’arrivée de nouveaux animaux, les schémas de vaccination ou la lutte contre les nuisibles. Pourtant, des chaussures hygiéniques constituent souvent la plus simple et la première des barrières.

Séparer les zones « propres » et « salles » est fondamental. Cela peut se faire, par exemple, en installant un sas d’hygiène où chaque travailleur et visiteur sont tenus de changer leurs bottes avant d’entrer dans les étables. Il est également préférable de changer de bottes entre les groupes d’animaux ou les différentes parties de l’exploitation. En prévoyant des bottes spécifiques à chaque étable ou zone, on limite au maximum les risques de contamination croisée.

Des pièges à éviter…

Même pour les éleveurs expérimentés, la bonne hygiène des chaussures peut parfois constituer un défi, précisément parce que les routines s’installent rapidement et que les conditions dans l’exploitation ne sont pas les mêmes tous les jours.

En premier lieu, il est essentiel de nettoyer les bottes avant de les désinfecter. En effet, le fumier et les autres saletés forment une couche protectrice autour des germes pathogènes, ce qui empêche le désinfectant d’agir efficacement.

Entrer directement dans un bain désinfectant sans avoir préalablement nettoyé les bottes n’aura que peu d’effet. En outre, cela souille plus rapidement le bain, ce qui réduit l’efficacité du désinfectant à chaque passage et oblige à le renouveler plus fréquemment.

Une règle de base consiste à nettoyer les bottes jusqu’à ce qu’elles soient visiblement propres, afin qu’il ne reste plus de saleté susceptible d’entraver l’efficacité du produit désinfectant. Le nettoyage s’effectue de préférence avec du savon, à l’aide d’une brosse, d’un lave-bottes ou d’un nettoyeur haute pression. Dans ce dernier cas, il faut toutefois veiller à ne pas projeter le fumier trop loin aux alentours car cela pourrait accroître les risques de contamination.

Encore mieux que les bains désinfectants, il est recommandé d’utiliser des bottes spécifiques à l’exploitation. Elles contribuent à empêcher que des agents pathogènes extérieurs ne pénètrent dans l’élevage. Pour une bonne biosécurité, la cohérence est essentielle : ces bottes spécifiques doivent donc être utilisées de manière systématique par chaque visiteur afin de limiter efficacement le risque d’introduction de germes.

… et des conseils à suivre

Outre les bottes réservées à l’exploitation, il n’est pas inutile de mettre l’accent sur le fait de disposer de bottes spécifiques à chaque bâtiment. Cela signifie que l’on dispose d’une paire différente pour chaque groupe d’animaux, ce qui permet de limiter autant que possible la transmission d’agents pathogènes au sein même de l’élevage.

Il est préférable de nettoyer ces chaussures propres à chaque groupe d’âge à intervalles réguliers – à la fin de chaque journée de travail, par exemple – puis de les désinfecter soigneusement en assurant un temps de contact suffisant avec le désinfectant. Il s’agit de la seule manière de garantir l’efficacité du produit et d’éliminer efficacement les pathogènes.

Effectués régulièrement, ce nettoyage et cette désinfection permettent d’éviter l’accumulation de fumier et de saletés, ce qui améliore l’efficacité du traitement.

Les bottes doivent être nettoyées de préférence avec du savon, à l’aide d’une brosse, d’un lave-bottes ou d’un nettoyeur haute pression.
Les bottes doivent être nettoyées de préférence avec du savon, à l’aide d’une brosse, d’un lave-bottes ou d’un nettoyeur haute pression. - UGent

En parallèle, l’utilisation de bottes spécifiques à chaque étable fait gagner du temps et réduit la charge de travail. En effet, comme elles ne sont utilisées que dans une étable, il n’est plus nécessaire de les nettoyer et de les désinfecter minutieusement lorsque l’on passe d’un bâtiment à l’autre.

Ces opérations peuvent alors être regroupées en fin de journée, sans nuire à la biosécurité de la ferme. Il est ainsi plus aisé pour tout un chacun d’appliquer systématiquement de bonnes pratiques. De plus, cela évite que le manque de temps ou la précipitation ne conduise à des erreurs.

Des bottes de différentes couleurs

Pour les plus grandes exploitations qui emploient des ouvriers agricoles, il peut être pratique d’utiliser des bottes de différentes couleurs. Ce repère visuel permet à chacun de savoir immédiatement quelles paires appartiennent à quelle étable, ce qui réduit encore davantage le risque d’utilisation incorrecte et de contamination croisée. Cela améliore également l’organisation des routines de biosécurité et rend le passage d’une zone à l’autre efficace et sans équivoque.

En outre, l’utilisation de bottes joue un rôle crucial dans les bâtiments où un niveau de biosécurité renforcé est nécessaire, telles que les étables d’isolement et de quarantaine. Il est préférable que ces espaces soient physiquement séparés les uns des autres afin d’éviter que les agents pathogènes ne se propagent aux animaux sains. Dans de telles étables, des bottes distinctes et propres à celles-ci sont absolument nécessaires.

Les visiteurs et les ouvriers ne doivent utiliser ces bottes que dans ces zones spécifiques et rigoureusement s’abstenir de les porter ailleurs. Cela garantit que d’éventuels agents pathogènes ne soient pas transportés vers d’autres zones de l’exploitation. Cette précaution est essentielle pour la gestion des maladies animales et la protection de la santé du troupeau.

Un brin de discipline… et l’adhésion de tous

La discipline est la clé d’une bonne hygiène des bottes : tout repose sur la mise en pratique quotidienne de bonnes habitudes. Chacun, au sein de la ferme, joue un rôle important à cet égard ; de l’agriculteur à ses éventuels ouvriers, en passant par les visiteurs.

De bonnes discussions, une identification visuelle claire des zones dites « propres » et « sales » dans le sas d’hygiène, ainsi qu’une réévaluation régulière de la faisabilité et de la facilité des routines contribuent à en faire des réflexes.

C’est précisément parce qu’une attention particulière doit être accordée plusieurs fois par jour aux bottes qu’adopter un comportement cohérent est si efficace. Ainsi, ces pratiques deviennent des habitudes qui renforcent la biosécurité, tout en restant efficientes, réalistes et applicables pour l’ensemble du personnel de la ferme.

De nombreux avantages

En appliquant une hygiène rigoureuse des bottes, les animaux sains sont moins susceptibles de tomber malades et se développent mieux. Cela se traduit par une moindre mortalité et des lots plus homogènes, ce qui facilite la gestion et maximise le rendement. Comme les animaux malades se développent moins bien et nécessitent des soins plus fréquents, prévenir les infections contribue sans aucun doute à un fonctionnement plus efficace de l’élevage.

Cela permet également de réduire le recours aux antibiotiques. Avec, in fine , une baisse des coûts des médicaments et des frais vétérinaires, ce qui constitue une économie pour l’exploitation.

En outre, disposer d’un cheptel en bonne santé induit une baisse du taux de conversion alimentaire, ce qui se traduit par un recul des coûts liés à l’alimentation. Le troupeau requiert également moins de soins, ce qui n’est pas sans impact sur le temps de travail.

Enfin, une bonne hygiène améliore le bien-être des animaux, car ceux-ci sont moins stressés et évoluent dans un environnement plus sain. Une meilleure santé augmente non seulement leur durée de vie, mais prévient également les conséquences et pertes économiques liées à la quarantaine, à l’abattage ou à la baisse de production en cas d’épidémie. Bref, de quoi contribuer à une gestion durable de la ferme.

Une arme efficace

Si les bottes peuvent sembler insignifiantes dans le monde agricole, elles jouent en réalité un rôle majeur en matière de biosécurité.

En raison de la fréquence élevée des contacts et déplacements dans la ferme, elles constituent un facteur de risque, pouvant contaminer diverses zones de l’exploitation et ce, plusieurs fois par jour. Grâce à des protocoles clairs, à une infrastructure adaptée et, surtout, à une discipline quotidienne, l’hygiène des bottes devient l’une des armes les plus efficaces contre l’introduction et la propagation de maladies.

D’après Julia Gabrielle Jerab

UGent

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