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La transition climatique se cultive

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Le nouveau Baromètre de la transition publié par le SPF Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement dresse un constat sans détour : la Belgique n’est pas sur la bonne voie pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Les émissions ont certes diminué de 31 % depuis 1990, mais il faudrait doubler le rythme de réduction pour espérer respecter les engagements climatiques. Même constat pour la consommation d’énergies fossiles, en baisse de seulement 10 % en 30 ans. Sans une accélération massive des politiques publiques et un approfondissement des mesures, la trajectoire climatique du pays restera hors d’atteinte.

Cette évaluation, qui s’appuie sur plus de 100 indicateurs, de la consommation d’énergie à l’usage des sols, en passant par l’évolution des forêts et la taille des cheptels, souligne la complexité de la transition. Chaque secteur est concerné, mais tous ne progressent pas au même rythme. Et si certains, comme les transports, peinent encore à se réinventer, d’autres, à l’image de l’agriculture, montrent des signes tangibles de mutation. Les émissions issues de l’élevage diminuent, la consommation énergétique agricole se stabilise, et des pratiques plus durables s’installent, portées par la montée en puissance de la recherche et des filières locales. Ces évolutions restent fragiles, mais elles illustrent une volonté d’agir. Loin d’être un simple secteur émetteur, l’agriculture s’impose comme un espace d’expérimentation et de solutions, capable de conjuguer production et séquestration, économie et écologie.

Le Baromètre rappelle que la capacité naturelle des sols à absorber le carbone s’est fortement réduite depuis 1990. Or c’est là que se joue une partie essentielle de la neutralité climatique. Restaurer cette fonction d’absorption passe par une politique agricole ambitieuse (réhabilitation des sols, agroforesterie, prairies permanentes, haies, rotation des cultures, gestion raisonnée des effluents) qui sont autant de leviers à mobiliser pour inverser la tendance.

L’agriculture ne peut pas tout, mais sans elle, rien n’est possible. Encore faut-il que cette contribution soit pleinement reconnue. Les agriculteurs belges ne peuvent porter seuls la charge d’une transition que l’ensemble de la société doit assumer. Car si la neutralité climatique demeure un objectif collectif, elle repose avant tout sur des décisions concrètes, sur la terre et dans le temps long. Le Baromètre appelle enfin à une stratégie cohérente, lisible, inscrite dans la durée. Une politique capable de dépasser les échéances électorales pour offrir de la visibilité à ceux qui investissent, innovent et produisent. C’est à ce prix que notre pays pourra transformer une contrainte en opportunité, et faire de son agriculture non pas un symbole du retard, mais le socle de sa transition.

Marie-France Vienne

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