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En soutien aux viticulteurs, un premier vignoble expérimental en Wallonie

Rencontre et explications, avec Anouck Stalport, Julien Louvieaux et Olivier Mahieu, du Carah et Condorcet à Ath, en Hainaut.

Temps de lecture : 4 min

Depuis les années 2000, la viticulture connaît un nouvel élan en Belgique. Les surfaces de vigne plantées ont atteint les 343 ha en 2017, avec pas loin du million de litres produit, et un nombre de viticulteurs qui ne fait qu’augmenter.

« Afin de suivre cette tendance et d’appuyer les viticulteurs dans leur démarche, le service d’expérimentations et d’avertissements du Centre agronomique de recherches appliquées du Hainaut a initié dès 2016 la plantation d’un vignoble de démonstration et d’expérimentations sur les terres de sa ferme expérimentale. Actuellement, aucune autre structure wallonne n’offre de soutien technique à cette communauté viticole grandissante, qui n’a pas à rougir devant ses voisins frontaliers en termes de qualité. En effet, plusieurs vins belges ont récemment été reconnus pour leur qualité dans des concours internationaux », explique Olivier Mahieu.

Le Hainaut, plus grand producteur en Belgique

Un cinquième du volume de vin belge est aujourd’hui produit dans le Hainaut, soit près de 200.000 litres en 2017. Le vignoble expérimental du Carah est situé au cœur de ce bassin de production de vin wallon. « Il vignoble va nous permettre d’étudier le comportement d’un certain nombre de cépages dans notre contexte pédoclimatique. Il offre en même temps une parcelle de démonstration représentative de ce qu’il est possible d’implanter en Belgique », ajoute Anouck Stalport.

Parmi les 23 cépages plantés dans ce vignoble à Ath, figurent le Pinot blanc, le Pinot meunier et le Pinot gris.
Parmi les 23 cépages plantés dans ce vignoble à Ath, figurent le Pinot blanc, le Pinot meunier et le Pinot gris. - M. de N.

Cépages mûrement sélectionnés

C’est pourquoi, une première sélection de 23 cépages différents a été plantée à Ath, soit un total de plus de 500 pieds de vigne : Cabernet cortis*, Monarch*, Régent*, Rondo*, Dornfelder, Pinot meunier, Pinot noir, Hélios*, Johanniter*, Muscaris*, Souvignier gris*, Seyval blanc*, Bacchus, Chardonnay, Chasselas, Chenin, Madeleine angevine, Müller-thurgau, Ortega, Pinot blanc, Pinot gris, Riesling et Siegerrebe ; les cépages interspécifiques résistants sont identifés avec un astérisque.

Ces cépages ont été soigneusement sélectionnés sur la base de leur présence sur le territoire belge, mais aussi pour leur adéquation à notre terroir et /ou leur résistance naturelle aux maladies.

En effet, dans une optique de gestion intégrée du vignoble, le choix d’un cépage adapté à notre terroir est primordial. C’est le cas des cépages interspécifiques et de nombreux cépages allemands, pourtant peu utilisés par nos voisins français, dont le choix est souvent cadenassé par leurs appellations.

Qu’est-ce qu’un cépage « interspécifique » ?

Les principaux bio-agresseurs ravageurs de la vigne en Europe ont été importés d’autres continents et principalement d’Amérique au XIXe siècle suite à l’intensification des échanges internationaux : c’est le cas du mildiou (Plasmopara viticola), de l’oïdium (Uncinula necator) ou encore du fameux phylloxera (Daktulosphaira vitifoliae).

La vigne européenne (Vitis vinifera), alors isolée sur le continent européen, n’a pas évolué avec ces organismes et n’a donc pas développé de mécanismes de défenses naturelles pour lutter contre. En revanche les espèces américaines y sont adaptées de par leur évolution génétique.

« C’est pourquoi dès le début du XIXe siècle, certains chercheurs ont eu l’idée de croiser la vigne européenne avec certaines espèces américaines, afin de conserver la principale qualité de la vigne européenne : sa capacité à produire un vin de grande qualité, et d’y associer la résistance des vignes américaines. C’est ainsi que sont nés les cépages dits interspécifiques. Neuf des 23 cépages étudiés par le Carah font partie de cette catégorie, poursuit Anouck Stalport.

Une recentralisation de la recherche…

Jusqu’alors, les principaux grands viticulteurs belges se sont référés à des experts étrangers pour l’implantation et la vinification. Mais ce n’est pas le cas de la plupart, qui se lancent sans réel support.

L’expertise développée par le Carah vise à conseiller non seulement les producteurs qui souhaiteraient se lancer dans la plantation de vignes, mais aussi les viticulteurs plus avertis.
L’expertise développée par le Carah vise à conseiller non seulement les producteurs qui souhaiteraient se lancer dans la plantation de vignes, mais aussi les viticulteurs plus avertis. - M. de N.

La nouvelle expertise développée à Ath vise à conseiller d’une part les viticulteurs qui voudraient se lancer dans l’aventure, mais aussi les plus avertis. Le Carah réalise en effet un suivi des principaux ravageurs de la vigne avec plusieurs vignobles partenaires de la région dans le but d’étudier leur développement sur notre territoire.

… et du conseil

Dans cette même optique, le Centre propose depuis 2018 un Guide Viticole spécifique à la Belgique, reprenant des conseils pour une lutte intégrée du vignoble, un calendrier viticole et un listing des produits de protection agréés en Belgique, en conventionnel et en agriculture biologique.

Réseau de piégeage par phéromones mis en place contre la Pyrale de la vigne et la tordeuse de la grappe.
Réseau de piégeage par phéromones mis en place contre la Pyrale de la vigne et la tordeuse de la grappe.

Une première vinification dès cet automne

Le vignoble expérimental du Carah étant dans sa 3e année, une première récolte va être possible dès cet automne. Et le début de saison favorable annonce des premières vendanges généreuses ! « C’est la catégorie agronomique de la Haute école HEPH-Condorcet à Ath qui prendra le relais pour la micro-vinification des raisins, avec ses élèves des sections agro-industries et biotechnologies, et fermentation, précise Julien Louvieaux.

Pour plus d’infos: http://carah.be/le-c-a-r-a-h/experimentation-agronomique-avertissements/...

Propos recueillis par M. de N.

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