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«Climat et CO2, une vaste escroquerie»: une mise au point s’impose

Je suis choqué des propos que j’ai pu lire dans les voix de la terre de la semaine passée dans l’article nommé « Climat et CO2, Une vaste escroquerie ». Je suis stupéfait qu’on puisse encore sous-entendre aujourd’hui que la production de gaz carbonique anthropique n’est pas une des causes du réchauffement climatique. Je précise bien « n’est pas une des causes » car le sujet est trop vaste et complexe pour s’étendre sur la question dans un article. Ce genre de propos peut être trompeur pour un lecteur peu instruit sur le sujet et ils peuvent faire plus de dégâts que de bien.

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On ne peut être que d’accord avec le fait que l’Homme représente une infime partie de la biomasse mondiale. La source de l’article (https ://www.pnas.org/content/115/25/6506) semble plus que fiable. Cependant ce qui en est déduit devient tendancieux. Ce n’est pas parce que l’Homme n’est qu’une infime proportion de biomasse sur Terre qu’il produit peu de CO2 et qu’il ne peut pas être tenu pour responsable du réchauffement climatique. Peut-on comparer la production de gaz carbonique d’un kilo de levure brassicole à la production de CO2 d’un kilo de cellule humaine ? Bien entendu que non puisque le métabolisme de l’un et de l’autre ne fonctionne pas de la même façon.

Dans l’article, il est écrit « Si on part du principe que chaque organisme vivant émet pour la bonne marche de son métabolisme autant de CO2 toutes proportions gardées en ce qui concerne la taille, […] ». Ce principe de base sur lequel repose votre thèse est donc erroné. Je prendrais comme exemple encore une fois les petites levures brassicoles, présente non seulement dans le cycle de production de la bière (anthropique) mais également partout autour de nous dans la biosphère. Ces levures produisent énormément de CO2 lorsqu’elles sont actives et qu’elles se reproduisent mais lorsque la nourriture vient à manquer, leur production de CO2 chute brutalement et pourtant ces levures restent bien vivantes. Dans la nature, une grande majorité d’organismes sont capables de vivre en produisant moins de CO2 par unité de biomasse que l’Homme comme cette levure.

De plus, la thèse qui est démontrée dans cet article est argumentée par deux sources dont l’une est plus que mauvaise (Wikipédia) et l’autre ne parle même pas de la thèse défendue (je parle ici de l’article scientifique). Je tiens également à souligner que ce dernier insiste notamment sur l’impact de l’Homme sur le reste du monde vivant en expliquant que l’Homme a été responsable de l’extinction de masse du Quaternaire, il y a plusieurs milliers d’années alors que nous étions beaucoup moins de 7 milliards d’Hommes sur Terre.

Ceci me fait également réfléchir à la tournure de phrase utilisée. Je prends pour exemple « A la lecture de ce billet vous disposerez de tous les arguments pour soutenir que finalement l’homme dont les écologistes malthusiens dénoncent la surpopulation n’entre que pour infime partie dans cette biosphère et cette biomasse dont il est dit et répété qu’elle est en danger ». Dans cette phrase, un ton hautain est pris de manière à faire comprendre que la surpopulation mondiale n’est en réalité pas un problème. Or, comme je l’explique ci-dessus, il a déjà été prouvé que l’Homme, même si sa population est très peu développée, peut entraîner une extinction majeure sur Terre.

Ce courrier fait donc paraître avec un ton plutôt léger que tout ce qu’on nous raconte depuis des années voire des décennies au sujet de l’impact de l’Homme sur son environnement (que ce soit au niveau des gaz à effet de serre de la biodiversité ou de son biotope), n’est en réalité qu’une vaste blague et qu’on se fait du souci pour rien. Pire encore, on y comprend qu’on veut nous prendre notre argent sous forme de taxes pour justifier que nous respirons. Je trouve ces propos plutôt graves face à la situation écologique mondiale actuelle. Aujourd’hui, j’ai 25 ans et je ne suis pas certain que dans 100 ou 200 ans nos descendances seront capables de vivre sereinement sur Terre.

Je trouve encore plus grave d’utiliser cette formulation et ce ton pour comparer les mesures sanitaires actuelles prises par notre gouvernement à de potentielles mesures de maîtrise de la population mondiale. Si aucune mesure n’avait été prise à partir du 13 mars 2020, une grande partie de la population serait plus que probablement décédée à cet instant. Même si ces mesures sont sujettes à discussions, même si une partie de la population souffre, même si après coup on aurait peut-être dû faire autrement, quand il faut prendre des mesures, elles doivent être prises pour limiter la casse.

Actuellement, aucune mesure de gestion de la population mondiale n’a été prise, un peu comme en décembre 2019 où on a préféré ne pas croire à une possible arrivée d’un virus invisible mais pourtant très dangereux. Or, quand il sera trop tard pour prendre ces mesures ce sera encore la population qui trinquera. Nous sommes dans une phase d’explosion démographique. Nous sommes plus de 7 milliards sur Terre et ça ne va pas s’arrêter là. Jusqu’à quel point pouvons-nous encore nous reproduire ? Il y a un moment où il faudra bien stabiliser cette courbe démographique (toute association avec la production de CO2 mise de côté).

Après cette longue réflexion, je me demande encore ce que vont penser ces personnes qui ne réfléchissent pas sur notre condition humaine et d’humanité mais qui vont prendre connaissance de cet écrit trompeur, détourné voire propagandiste. C’est un mot fort mais qui s’y applique bien car l’utilisation de l’autorité scientifique pour soutenir des arguments qui ne sont pas en adéquation avec cette autorité afin de modifier ou d’appuyer l’opinion de quelqu’un relève de la propagande.

Je suis professeur de sciences en secondaire et ma mission est d’instruire les citoyens de demain à comprendre ce monde si complexe pour (inter)agir au mieux avec lui. J’estime que ces propos vont à l’encontre de tous ce que j’essaie d’instruire à mes élèves. Il démonte tout mon travail et celui de mes collègues.

Jean-Philippe Renson

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