Les bonnes questions à (se) poser avant l’acquisition d’un nouveau tracteur
Face à la pléthore de modèles, séries et marques de tracteurs proposés sur notre marché, pas facile de choisir. Comment s’y retrouver dans ce labyrinthe ? Quels sont les critères à considérer sur le plan technique ? Quelles sont les exigences propres à l’exploitation, aux utilisateurs ? Et bien sûr, quelles sont et pourraient être les utilisations futures du nouvel élu ? Autant d’éléments pratiques détaillés par Vincent Cipers, à l’occasion d’une journée d’études organisée par le comice agricole d’Arlon.

Parmi les critères de choix à considérer lorsque le moment est venu d’investir dans l’acquisition d’un nouveau tracteur, la puissance de l’engin est la première caractéristique évoquée : 100, 150, 200, 250 ch ? Mais au fait, de quelle puissance parle-t-on ?
La puissance, mais encore ?
Autrefois, un tracteur de 100 ch d
Puissance maximale
La valeur la plus importante à considérer lors de l’acquisition d’un nouveau tracteur est la puissance maximale, qui est la puissance réellement utilisable par le tracteur.
Il est bon de savoir que les moteurs modernes délivrent leur puissance maximale à un régime bien inférieur au régime nominal, soit aux alentours de 1.500-1.700 tours/min.
Pour quelles activités ?
En Belgique, contrairement à ce que l’on observe dans d’autres pays européens, les agriculteurs ont un usage multiple de leur(s) tracteur(s) : l’utilisation n’est jamais à 100 % en transport ou exclusivement pour des travaux aux champs.
Le futur acquéreur doit clairement identifier pour quel type d’activités il entend utiliser le nouveau tracteur afin de bien cerner où la puissance de traction envisagée doit être particulièrement disponible :
– aux roues pour la traction moteur ;
– à la prise de force. Vincent Cipers relève que, selon les modèles et ou les marques, on les pertes moyennes de puissance entre le moteur et la prise de force s’élèvent à quelque 8 à 16 %. Les documentations commerciales fournissent rarement cette information. Il appartient donc aux acquéreurs potentiels, d’obtenir cette information par d’autres voies (la DLG Allemagne, par exemple). « Un Institut indépendant d’envergure européenne trouverait une utilité évidente pour l’établissement de telles mesures » ;
– pour une utilisation hydraulique (pompe à débit continu ou load sensing…). Dans ce cas, il faudra s’assurer, à l’heure du choix, que le transfert de la puissance moteur vers le système hydraulique se déroule le plus efficacement possible.
Le boost
Attention à bien interpréter ce que signifie la puissance dite boost. Certains tractoristes annoncent des gains de puissance de 15, 20, 30, jusque 50 ch disponibles dans certaines conditions d’utilisation bien définies – qui ne se retrouvent pas toujours décrites dans les documentations commerciales – et pour une durée limitée dans le temps.
La majorité des « boost » n’entrent en action que lorsque les tracteurs ont au moins une vitesse de 15 ou 18 ou 20 km/h, c’est-à-dire dans des situations où la valeur du couple du moteur du tracteur est beaucoup plus basse que dans des conditions de travail au champ, à 3-4 km/h.
Une raison pour laquelle les tracteurs dotés de tels boost sont conçus sur la base d’une puissance de 150 ch, en prévoyant que dans 10 à 30 % des situations, le tracteur dispose d’une puissance supplémentaire de 15 à 50 ch pendant une période de temps limitée, et certainement pas en permanence.
Ce boost peut s’avérer intéressant lorsque le tracteur est utilisé pour du travail du sol, pendant 80 % de son emploi, et pour des trajets sur la route, avec de temps en temps une grosse charge à tirer, pendant 10 à 15 % du temps. Dans ce mode d’utilisation, la disponibilité d’un boost se justifie. Par contre, il serait faux de prétendre qu’un tracteur de 150 ch et disposant de 30 ch de boost sera l’engin idéal pour le dédier à du travail du sol ; de fait, dans 90 % de ses heures, il ne sera pas capable de développer les « 150 ch + 30 ch » qui seraient nécessaires !
La transmission, choix délicat !
Le choix de la transmission est probablement la décision la plus difficile à prendre. Plus la composante hydraulique est importante, plus la conduite est confortable et précise, mais… quelque peu aux dépens de l’efficacité du transfert de la puissance moteur vers la puissance utile aux roues, à la prise de force ou au système hydraulique.
La boîte mécanique
« Beaucoup de clients nous reprochent de ne plus proposer des tracteurs de 150 ch, équipés d’une boîte mécanique toute simple, sans relevage électronique, pour des usages bien spécifiques dans l’exploitation. À cela, je réponds que le marché belge ne représente que 1 à 2 % des ventes de nouveaux tracteurs en Europe. Comment imaginer convaincre les fabricants de faire du cousu main pour une demande marginale de notre petit marché belge, hollandais ou luxembourgeois !
Les avantages de cette transmission sont bien connus : moins chère, transfert efficace de la puissance moteur, peu d’électronique, réparable dans tout atelier, même peu spécialisé, etc.
Au rang des inconvénients, on notera le faible choix quant à la vitesse d’avancement précisément souhaitée, la coupure du couple au moment du changement de vitesse (très pénalisant lors de certains travaux), l’embrayage classique, l’inverseur mécanique, la présence de leviers encombrants, l’absence de « dialogue » entre la boîte et le moteur, la moindre efficacité en consommation, etc.
La boîte semi-mécanique à passages sous charge
L’adoption d’une boîte powershift présente de nombreux atouts par rapport à la transmission mécanique : davantage de possibilités d’adaptation de la vitesse… sous charge, pas de coupure du couple pendant le travail, inverseur électrohydraulique, embrayage multidisques en bain d’huile, transfert efficace de puissance, moins de leviers en cabine, positionnement du bouton de commande plus ergonomique, etc.
« C’est une très bonne solution pour l’utilisateur qui n’a pas le budget, le souhait ou une totale confiance dans les transmissions à variation continue, commente M. Cipers. Le choix est très vaste choix parmi toutes les marques et gammes de puissance. En outre, nombre de ces boîtes sont aussi robotisées, autrement dit, même du passage d’une gamme mécanique à l’autre, c’est l’électronique qui gère le régime moteur, et au transport, cela simule presque le fonctionnement d’une boîte à variation continue. C’est donc une excellente solution pour 75 à 80 % des exploitations en Belgique.
En comparaison avec le « tout mécanique », il y a fatalement aussi quelques désavantages : un prix plus élevé, un coût d’entretien majoré également, une huile de boîte de qualité supérieure et une technologie plus complexe pour l’atelier de réparation.
La boîte à variation continue (CVT)
L’évolution des pont-moteurs hydrauliques au cours de ces 15 dernières années a permis la concrétisation de cette transmission, rêve de nombreux constructeurs.
Attention : on observe des différences d’efficacité des transmissions CVT entre les différentes marques de tracteurs présentes sur le marché. Chaque constructeur a développé sa propre solution pour faire travailler ensemble les parties hydraulique et mécanique de cette transmission à variation continue et cela engendre des différences d’efficacité qui s’étagent entre 70-75 % et 90 %, traduisant des pertes de puissance de 10 % jusqu’à 25 %.
Les exigences spécifiques
Et encore…