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Conflit russo-ukrainien :«La commission concentre ses efforts sur les plans stratégiques nationaux»

En marge des débats sur les conséquences de la guerre qui sévit en Ukraine, les discussions au niveau du conseil des ministres européens de l’Agriculture réunis à Bruxelles le 21 mars dernier, ont également porté sur la mise en œuvre de différents éléments du Pacte Vert.

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Mais il a été largement question des fameux plans stratégiques nationaux sur lesquels le commissaire Wojciechowski s’est montré « très optimiste » quant à leur adoption « d’ici à la fin du mois de juin ».

« Aucun plan n’est encore définitivement prêt en vue de la validation » a toutefois nuancé le représentant de la commission venu présenter la première analyse de ceux qui lui ont été remis. Il a par ailleurs assuré qu’il n’y aurait aucun rejet complet. « S’il n’y a pas de gros obstacles à leur adoption, nous allons bien sûr essayer de les améliorer », a-t-il indiqué.

Aucun affaiblissement des stratégies du Pacte Vert en vue

On l’aura compris depuis plusieurs semaines, malgré les inquiétudes et les tensions suscitées par le conflit russo-ukrainien, il n’est pas question pour la commission d’un quelconque affaiblissement et encore moins d’un abandon des stratégies « De la fourche à la fourchette » et « Biodiversité » mais d’adaptations et de renforcements d’éléments des plans visant à améliorer la résilience du secteur agricole.

Car si les plans stratégiques nationaux respectent globalement les obligations légales, ils négligent les objectifs du Pacte Vert, a constaté la commission dans sa première analyse.

Le commissaire a évoqué l’agriculture biologique, qui est l’objectif visible de l’architecture verte des plans stratégiques, dont on « peut s’attendre au niveau des surfaces qui lui seront dédiées passe de 8 % à 18 % au cours de la programmation courant jusqu’à 2027 ».

Pour l’heure, la plupart des plans prévoient une augmentation de la superficie consacrée à ce mode de production, mais seuls 15 plans visent à atteindre plus de 10 % de surfaces bio, et quatre d’entre eux plus de 20 %. alors qu’un objectif européen de 25 % a été fixé pour 2030.

Par ailleurs, peu d’États membres ont décidé de fixer dans leurs plans des objectifs liés au Pacte Vert. Seuls quatre en prévoient pour les antibiotiques, trois pour les surfaces dédiées à la nature, cinq pour les pesticides et six pour les engrais.

Les États membres devront alors adapter leurs plans en fonction des remarques qui leur auront été faites. Globalement, le commissaire salue d’ailleurs les efforts entrepris mais pointe aussi quelques manquements dans certains d’entre eux.

Pour autant, le commissaire à l’Agriculture a prévenu qu’il « ne faut pas confondre vitesse et précipitation ». La commission, qui a adopté, au moment où vous lisez la présente édition, les lettres de recommandation sur un premier lot de 19 plans stratégiques nationaux, doit les envoyer le lendemain aux États membres concernés.

La commission peu enthousiaste à l’idée d’un « plan protéines végétales » européen

Alors que la guerre en Ukraine a fait de l’autosuffisance alimentaire une priorité dans l’agenda européen, 20 États membres, emmenés par l’Autriche ont plaidé pour une accélération d’un « plan protéines végétales » pour réduire les importations de soja et de maïs du continent.

Mais aussi pour lutter contre la déforestation importée, un objectif phare de la présidence française du conseil. Un enthousiasme pas ou prou partagé par le commissaire Wojciechowski qui encourage plutôt « les États membres à utiliser les outils disponibles au niveau européen, national ou régional pour appuyer le développement de protéines végétales ».

Et d’ajouter à l’issue de la réunion que « la prochaine PAC présente de nombreuses opportunités pour que les États membres puissent eux-mêmes intervenir ». Avant de prévenir qu’« à ce stade la commission ne prévoit pas d’adopter une stratégie européenne en la matière ». En revanche, elle évalue avec « beaucoup de soins » les différents outils avancés par les États membres dans leurs plans stratégiques.

La question des grands prédateurs revient en force, le débat sur les produits phyto aussi

Il est revenu pas à pas, le loup, dans les discussions ministérielles. La question est complexe et fâche en Europe.

« Nous sommes convenus d’acter politiquement la nécessité d’une véritable cohabitation, soit un équilibre essentiel entre la préservation des grands prédateurs et celle des activités pastorales, de la biodiversité, et surtout de nos éleveurs qui sont des acteurs de nos territoires, de nos productions et dont la détresse doit être pleinement prise en compte » a indiqué le ministre français de l’Agriculture à l’issue de la réunion.

M. Denormandie a d’ailleurs annoncé un accompagnement des États membres par la commission en fonction de la diversité des réalités géographiques et topographiques rencontrées par le monde rural mais aussi de la quantité et de la densité de la population de loups présents dans certaines régions.

Enfin, lors de ce conseil, la commission a décidé de reporter la publication des deux règlements mettant en application une partie des objectifs agricoles du Pacte Vert : la révision de la directive sur l’utilisation durable des pesticides et le règlement sur la restauration de la nature.

Ces deux textes étaient initialement attendus pour le 23 mars mais ils ont été repoussés à une date ultérieure « avant l’été », selon l’Exécutif. « L’incertitude géopolitique généralisée à ce stade ne permet pas à cette proposition de disposer de l’espace politique dont elle a besoin », a justifié la commission.

C’est un soulagement pour les ministres européens, nombre d’entre eux ayant exprimé leurs inquiétudes au sujet des objectifs contraignants qui seraient fixés dans la proposition à venir de la commission. Le premier projet de texte qui a pu filtrer prévoit un objectif contraignant de réduction de 50 % de l’utilisation et des risques liés aux produits phytosanitaires pour l’UE et des objectifs nationaux que se fixeraient les États membres.

Marie-France Vienne

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