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En vue de leur possible commercialisation, les phyto passent l’épreuve de l’agréation

La mise sur le marché d’un nouveau pesticide est souvent assimilée, par les firmes phyto, à un parcours du combattant. En effet, une fois la substance active approuvée par l’Europe, l’usage du produit qui la contient doit encore être autorisé par les États membres. En Belgique, c’est au Comité d’agréation des pesticides à usage agricole qu’incombe cette charge. Mais comment fonctionne-t-il ? Quelles sont ses compétences ? Comment est-il financé ? Maarten Trybou, son président, répond à ces questions.

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Depuis sa création en 1958, le Comité d’agréation des pesticides à usage agricole s’est réuni 1000 fois. Pour célébrer ce jubilé, cette structure – qui dépend du Service public fédéral Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement, et, en particulier, de la Direction générale (DG) Animaux, Végétaux et Alimentation – organisait une journée d’information afin de présenter son mode de fonctionnement.

Sur base de critères scientifiques

« Voici 70 à 80 ans, tout produit de protection des plantes, quels que soient ses effets, pouvait être commercialisé sur le sol belge. Lorsque le besoin de créer une procédure d’autorisation pour les produits phytopharmaceutiques s’est fait ressentir, le Comité d’agréation est né », rappelle Maarten Trybou. Sur base de critères scientifiques et fixés par la législation belge, ses membres procèdent, depuis près de 60 ans, à l’évaluation des dossiers soumis par les firmes phytopharmaceutiques souhaitant commercialiser leur produit en Belgique.

Mais le travail du Comité ne se limite pas à autoriser, ou refuser, la mise sur le marché d’un pesticide. Au rythme de l’évolution des connaissances et des lois européennes et belges, il procède également à une révision des autorisations accordées.

Le Comité poursuit un seul but : n’autoriser que les usages pertinents pour lesquels l’exposition est acceptable et sans effet néfaste sur la santé ou l’environnement.

« En Belgique, la répartition des compétences entre l’État fédéral et les entités fédérées, responsables notamment de l’Agriculture et de l’Environnement, est relativement complexe. Le Comité rassemble donc des services issus de divers horizons, ce qui permet de prendre des décisions efficaces et cohérentes à tous les niveaux de pouvoir », poursuit-il. Aux représentants fédéraux et régionaux s’ajoutent encore les services d’inspection compétents.

Lorsqu’il se réunit (17 fois par an, en moyenne), le Comité traite entre 70 et 80 dossiers dont 50 nécessitent une évaluation (nouveaux produits, réagréations en fonction des nouvelles connaissances, demandes d’extension, mesures d’urgence…). Les autres demandes n’entraînent aucune discussion. À l’issue de chaque réunion, le Comité, qui demeure un organe consultatif, remet un avis au ministre.

Selon la législation en vigueur, ce dernier rend alors sa décision quant au futur du produit évalué. « Mais en pratique, la prise de décision est déléguée au Comité. »

Faire appel aux experts

Afin d’élargir ses compétences, le Comité fait appel à des experts en méthodologies d’évaluation européennes et nationales. Ainsi, le Centre wallon de recherches agronomiques (Cra-w) est responsable d’évaluer l’efficacité des produits. L’Institut de santé publique (ISP) se charge quant à lui du volet toxicologie humaine.

Les autres éléments du dossier sont gérés au sein du Service Produits phytopharmaceutiques et Engrais. C’est le cas de l’aspect résidus dans les végétaux et les animaux, pour lequel il existe une législation particulière. Le comportement du produit phyto dans l’environnement et son écotoxicité sont également évalués en interne. « Ce volet a longtemps été délégué à des partenaires extérieurs mais face à sa complexité grandissante, nous avons choisi de former nos propres experts », précise M Trybou. Enfin, analyser les propriétés physico-chimiques (stabilité, efficacité, sélectivité) des pesticides est encore une des tâches dévolues aux experts du Service.

Maarten Trybou insiste sur la cohérence dont doit faire preuve le Comité : « Tous les dossiers doivent être traités de la même manière ! ».
Maarten Trybou insiste sur la cohérence dont doit faire preuve le Comité : « Tous les dossiers doivent être traités de la même manière ! ». - J.V.

Le Service intègre aussi des gestionnaires de dossiers spécialisés par type de demande selon les procédures européennes et nationales. Les services d’inspection de l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire collaborent également avec le Comité et l’informent des pratiques de terrain.

Evaluer et gérer le risque

Tout au long du processus d’analyse et de prise de décision, le Comité s’attelle à respecter deux principes fondamentaux : évaluer le risque, conformément aux directives européennes, éventuellement complétées par la législation belge, et le gérer. Le but : n’autoriser que les usages pertinents pour lesquels l’exposition (des utilisateurs, des consommateurs de denrées traitées et de l’environnement au sens large) est acceptable et sans effet néfaste sur la santé ou l’environnement.

« S’il existe un risque quelconque, le Comité peut imposer des mesures de réduction du risque pour encadrer l’usage autorisé. Nous pouvons également prescrire que certaines obligations, tel le port de vêtements de protection, soient mentionnées sur l’étiquette du produit. »

Après évaluation, un acte et un rapport d’autorisation sont envoyés au demandeur. Les utilisateurs peuvent également les consulter sur le site www.phytoweb.be.

Une fois qu’une autorisation a été délivrée pour un produit, le Comité assure son suivi. Tout dossier peut être réexaminé à tout moment, que ce soit lors de la soumission de données adverses par les détenteurs d’autorisation ou sur base des résultats de données de monitoring des eaux… « Lorsque cela s’avère nécessaire, les autorisations peuvent ainsi être ajustées. »

M.V. et J.V.

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