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Le rumex, une lutte de tous les instants

Lutter contre le rumex en prairie peut s’avérer compliqué. À tel point que ladite lutte reste une problématique importante pour le monde agricole. C’est dans ce cadre que le CPL Végémar a mis en place une plateforme démonstrative dans une prairie de fauche à La Reid. Maxime Hautot, du Centre provincial Liégeois, dresse le bilan des différents traitements appliqués.

Temps de lecture : 10 min

Bien choisir son produit est d’une importance capitale lorsque l’on lutte contre le rumex. D’autant que c’est une problématique que les éleveurs se doivent de prendre à bras-le-corps, tant les risques de salissement des prairies touchées sont chaque année très élevés. Maxime Hautot, du CPL Végémar, revient sur les différents schémas herbicides comparés afin d’aider les agriculteurs dans leur choix de produits.

Dégâts de sanglier : une porte d’entrée

Les matières organiques telles que lisier, fumier et compost épandues sur les prairies sont un vecteur important de dissémination du rumex par les semences adventices que ces fertilisants peuvent véhiculer. Les animaux ayant consommé auparavant des fourrages contaminés par des plantes de rumex portent souvent des semences. Par ailleurs dans le cas de la plateforme, un autre trouble-fête est de la partie.

En arrière-saison, les prairies peuvent subir des dégâts de sanglier. Or, le gazon retourné n’est autre qu’une porte d’entrée pour le rumex qui trouve alors des conditions idéales à sa germination. C’est ainsi que la prairie se resalit.

« Il est grand temps que le politique prenne la problématique du sanglier à bras-le-corps car le monde agricole en a suffisamment soupé de tous ses problèmes », estime me Maxime Hautot. « Les éleveurs essayent de bien gérer leur prairie, ils désherbent, sursèment et, en fin de saison, les hardes de sangliers reviennent inlassablement. Résultat ? Tout le travail est à recommencer la saison suivante.

« Car la lutte chimique, c’est une chose, mais elle n’est rien sans le rebouchage des trous dans le gazon ! Si vous désherbez et que derrière le gazon ne se régénère pas, le travail sera toujours à refaire », note M. Hautot.

Hormones et sulfonylurées

Sur la plateforme démonstrative, les schémas mis en place sont ceux que l’on retrouve principalement sur le marché, explique M. Hautot.  Ils ont été appliqués en fin d’été car la période fin août-début septembre, est généralement la plus propice pour la réalisation des traitements. La plateforme de La Reid a permis de passer en revue les produits actuels et de tenir compte des changements récents notamment le 2,4-D qui revient au goût du jour, l’occasion de voir également quelles anciennes références tiennent encore la route.

Pour lutter contre le rumex en prairie, deux types de produits sont principalement utilisés : les hormones et les sulfonylurées.

Les hormones sont l’un des herbicides les plus anciens. Et de rappeler : « Ce sont des substances mimétiques des hormones naturelles des plantes. La structure chimique de ces molécules naturelles a été modifiée pour mimer leur action et cibler les plantes à détruire. »

Les hormones s’avèrent particulièrement phytotoxiques pour les dicotylées à large feuille et beaucoup moins pour les monocotylédones à feuilles étroites, comme les céréales à paille, mais également les graminées prairiales. Leur action ? Elles perturbent la croissance de la plante. Les parties tige-feuilles et racines vont être touchées très rapidement, et le végétal va se recroqueviller de manière caractéristique. Les hormones ont donc une bonne efficacité contre les plantes comme le rumex, dont les racines très puissantes, forent profondément dans le sol.

Notons que ces substances ont une action efficace et rapide. Toutefois, l’on peut parfois observer des repousses. Tout dépend des conditions d’application et de la dose qui a été appliquée. Les conditions d’application de ces produits sont assez strictes et peuvent être un point faible du produit. Mieux vaut donc privilégier les périodes d’application par temps poussant, dans un intervalle de température allant de 12 à 24 ºC. Au printemps, dans les régions plus froides, l’utilisation d’hormones n’est pas toujours efficace. Inutile donc de l’utiliser par vent du nord ou d’est car la bise stresse trop les plantes… il est parfois difficile de positionner le traitement avant la repousse de l’herbe. En ce qui concerne l’humidité, trois à quatre heures sans pluie sont suffisantes. Remarquons encore que ce type de produit permet de traiter des jeunes semis, dès la troisième tale.

Outre ces produits, on a les sulfonylurées, des inhibiteurs de l’ALS, une enzyme spécifique aux végétaux. Elles sont très efficaces, et ce à très faible dose, et agissent de manière durable dès qu’elles sont appliquées dans de bonnes conditions et que le produit est bien assimilé. On observe en outre, très peu de repousses l’année suivante. Le programme Allié montre qu’on peut être efficace avec seulement 25 g par ha, soit des doses de pharmacien !

Notons que le spectre des « sulfos » est parfois assez limité et que c’est un produit systémique ! Le produit va donc être renvoyé vers les racines, c’est ce qui fait sa très bonne efficacité. Le désavantage ? Il peut être phytotoxique et freiner la prairie, donc à déconseiller au printemps, avant la première coupe, celle où l’on doit engranger le plus de fourrages possible… Mieux vaut donc positionner le traitement en septembre, en fin de saison. « On est alors en phase de sève descendante, ce qui favorise encore le côté systémique du produit ! »

Désherbage sélectif

Sur la plateforme, les chercheurs ont très peu travaillé en mono-produit. « Au plus on va mettre de matières actives différentes, au plus on a de chances de détruire le rumex par plusieurs modes d’action. C’est toujours plus facile d’attaquer un ennemi tenace à plusieurs de front surtout en ce qui concerne les hormones ! »

La parcelle témoin est une situation intéressante puisqu’elle a une densité de rumex de 17 plantes par 10 m². Or, c’est à partir d’1 rumex par 5 m² que l’on conseille de désherber. Outre le rumex, l’on retrouve aussi du plantain, du pissenlit, des mourons… synonymes de sols riches, souvent fertilisés au lisier.

À noter que les applications se sont faites le 7 août juste après la sécheresse. « Le traitement de printemps n’a pas été appliqué puisqu’il y avait de forte chance qu’il ne fonctionne pas. Juste après cette période de stress pour la plante (la sécheresse), certains rumex étaient déjà fortement développés alors que l’on préconise toujours un traitement au stade rosette… », note M. Hautot.

Enfin, il est aussi essentiel de raisonner son traitement en termes de coût par hectare. Des différences importantes existent avec des produits avec un prix d’achat onéreux mais dont on utilise qu’une très faible dose. À l’inverse, certains produits nécessitent parfois de fortes doses à l’hectare, ou de l’associer à un autre produit afin d’être totalement efficace. Il est nécessaire de bien faire son calcul avant de traiter afin d’éviter de mauvaises surprises en termes de coût.

Retour sur les différents traitements exposés.

Primstar (1,5l/ha) et Starane Forte (0,5l/ha)

Le chercheur voit une efficacité immédiate à ce traitement. Toutefois, après la fauche du 20 septembre, du rumex réapparaissait, soit par redémarrages, soit par de nouvelles germinations de graines tombées au sol.

« En termes de matières actives, elles ne sont pas très diversifiées : fluroxypyr + florasulam. La dose appliquée ne suffisait manifestement pas à contrôler une forte infestation comme celle de cette plateforme démonstrative. »

Damex Forte Super (2l/ha) et Tomahawk 200 (1,8l/ha)

Le traitement suivant met en présence le Damex Forte Super, mélange de 2,4-D et de MCPA, et le Tomahawk 200 pour amener du fluroxypyr (200g/l) au traitement. Les deux premières nommées sont d’anciennes hormones qui fonctionnent toujours bien. Elles ont d’ailleurs une très bonne efficacité, et ce, directement après traitement mais on remarque quelques repousses. S’il y a davantage de fluroxypyr, il n’y en a pas encore assez pour une telle infestation.

Le chercheur remarque que le Tomahawk est tombé sous la nouvelle législation en termes de zone tampon. Sa zone tampon est de 2m avec une réduction minimale de 75 % du risque. C’est un point faible pour le produit. « Il faut faire attention à de nombreux paramètres pour établir son schéma mais les zones tampons deviennent souvent très contraignantes.

Allié (25g/ha)

L’Allié possède une matière active très efficace sur le long terme. « Mais il ne faut pas être pressé ! », note le scientifique. La vitesse d’action du produit est très lente. Environ 3 semaines sont nécessaires avant de voir clairement les symptômes de destruction du rumex. La vitesse d’action du produit est très lente. Environ 3 semaines sont nécessaires avant de voir clairement les symptômes de destruction du rumex. Par contre, pas de miracle, si on traite à l’Allié et que les sangliers passent, les semences qui traînent à la surface vont re-germer. Gros problème toutefois avec ce produit : le ralentissement de la végétation qui se produit ! Il faut attendre 10-15 jours après l’application. Mais lors d’une application en arrière-saison, on ne voit pas trop de différence de production de fourrage.

En termes de zone tampon, il ne peut être appliqué à moins d’1m avec une technique réduisant la dérive de minimum 50 %.

Notons qu’en termes de désherbage du rumex, on peut être satisfait du schéma, même s’il n’est vraiment pas souhaitable de traiter un jeune semis avec ce produit ! En ce qui concerne la rémanence, il détruit le trèfle, et peut encore agir et détruire le trèfle qui serait éventuellement sursemé suite au traitement.

Bofort (2l/ha) et Primus (75ml/ha)

« L’une des références dans la lutte contre le rumex ! Lors de nos comptages, on n’a plus vu du rumex après traitement ! » affirme Maxime Hautot. Ce sont des hormones, avec les mêmes matières actives que précédemment mais l’aminopyralide du Bofort vient donner un coup de main salutaire. Cette matière active très efficace a un gros défaut : elle entraîne des résidus dans les fumiers et les lisiers. Elle n’est donc agréée ni en prairie de fauche, ni dans les prairies attenantes aux étables. Comme pour l’Allié, elle a une forte rémanence et détruit le trèfle, rendant même impossible le sursemis de légumineuses. Mais force est de constater que ce schéma est conseillé en prairie pâturée fortement infestée… en rebouchant évidemment les trous et en attendant le délai suffisant !

L’ajout de Primus donne un effet synergique, vient élargir le spectre d’action et empêche ainsi la survie de certaines mauvaises herbes.

Et d’insister : « Le rumex, vous ne le détruirez pas en un an, c’est une lutte de tous les instants ! On traite une fois, et on adapte les traitements ultérieurs souvent nécessaires. Le reste, c’est de la gestion. Il faut prendre le problème à bras-le-corps et traiter toutes les parcelles, même les plus éloignées ! Le risque de ramener des semences par le biais des fourrages de ces parcelles est trop important ! »

Cirran (2l/ha) et Bofix (4l/ha)

Le Cirran est un produit relativement récent mais qui remet sur le devant de la scène des matières actives connues de longue date comme le 2,4-D et le MCPA. Si on ne voyait plus trop le 2,4-D, force est de constater qu’il est toujours très efficace. Il se complète très bien avec le Bofix. En alliant les deux produits, on obtient un traitement qui a une excellente efficacité. en termes de dose, il est l’un des schémas testés les plus concentrés, qui ne laisse aucune chance au rumex, pourvu qu’on l’applique dans de bonnes conditions à savoir entre 12 et 24ºC, et en évitant de le faire en plein soleil. Enfin, utilisé seul, le 2,4-D se montre sélectif du trèfle en prairie.

Notons que si les autres produits ont une zone de risque de 1 m au niveau de la zone tampon, ici la zone à respecter est de 5m.

Bofix (4l/ha), Starane Forte (0,5l/ha) et Primus (75 ml/ha)

Le seul traitement présenté qui met trois produits commerciaux en présence. Cela devient très technique et peut parfois devenir plus coûteux au plus on ajoute de produits différents. Disposer de 3 produits différents à mélanger peut rebuter certains agriculteurs cherchant avant tout à se simplifier la vie. Mais ce schéma présente aussi l’avantage de conjuguer 4 substances actives.

Ce schéma est composé de 325 g/ha de fluroxypyr, de 800g/ha de MCPA, de 80 g de clopyralid, et de 3,75 g de florasulam. Il donne un résultat très satisfaisant en diminuant drastiquement la population de rumex encore présente lors de la visite de la parcelle. Une zone tampon de 5m est encore à respecter.

Harmony Pasture (30g/ha)

L’Harmony Pasture est le dernier traitement. Son principal avantage : cette sulfonylurée respecte le trèfle blanc, mais ce dernier est tout de même freiné durant deux semaines après le traitement avant de bien repartir par la suite. Le traitement est fort similaire à l’Allié : il faut attendre longtemps pour voir les effets mais ceux-ci sont durables dans le temps. Il présente toutefois, l’avantage de pouvoir être positionné plus tôt sur la parcelle, dès la fin août. Il présente toutefois le désavantage d’être inefficace contre le pissenlit, d’où la nécessité de l’associer parfois avec des produits à base de MCPA.

P-Y L.

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