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Le désherbage automnal raisonné des céréales

En fonction des stades de développement atteints par les différentes céréales, il existe une série de possibilités pour lutter contre les mauvaises herbes durant l’automne. Celles-ci sont reprises

dans le tableau ci-joint.

Temps de lecture : 6 min

Semés fin septembre – début octobre, les orges d’hiver commencent à taller fin octobre – début novembre. C’est donc durant l’automne qu’il faut entreprendre le désherbage car c’est à ce moment que la majorité des mauvaises herbes va également germer et croître.

Jeunes et peu développées, les adventices sont facilement et économiquement éliminées à cette période. En revanche, au printemps, les mauvaises herbes ayant passé l’hiver sont trop développées et la culture, généralement dense et vigoureuse, perturbe la lutte (effet parapluie).

Des rattrapages printaniers sont néanmoins possibles et quelquefois nécessaires.

En froment d’hiver

Semés plus tard que les orges, les froments d’hiver, dans la plupart des situations, ne demandent pas d’intervention herbicide avant le printemps. Les raisons justifiant ce report sont multiples :

– avant l’hiver, le développement des adventices est généralement faible ou modéré ;

– grâce à la gamme d’herbicides agréés aujourd’hui, il est possible d’assurer le désherbage après l’hiver, même dans des situations difficiles ;

– les applications automnales d’herbicides ne sont presque jamais suffisantes et doivent de toute façon être suivies d’une intervention de rattrapage au printemps ;

– les dérivés de l’urée (le chlortoluron) se dégradent assez rapidement. Appliqués avant l’hiver, leur concentration dans le sol est trop faible pour permettre d’éviter les levées de mauvaises herbes qui coïncident avec le retour des beaux jours.

Dès l’automne, dans certains cas !

Le désherbage du froment se justifie avant l’hiver en présence d’adventices résistantes ou en cas de développement précoce et important. Cela peut arriver, par exemple :

– lors d’un semis précoce suivi d’un automne doux et prolongé ;

– en cas d’échec ou d’absence de désherbage dans la culture précédente ;

– lorsqu’il n’y a pas eu de labour avant le semis.

Un traitement automnal est presque toujours suivi par un complément au printemps. Le cas échéant, le désherbage est raisonné en programme.

En épeautre, seigle et triticale

Le désherbage de ces espèces céréalières peut se raisonner comme dans le cas du froment. Il est cependant possible que certains produits agréés en froment ne le soient pas dans ces cultures. Il faut donc vérifier systématiquement les autorisations.

Les molécules disponibles

Il convient de raisonner les traitements de pré-émergence (voir tableau) sur la base de l’historique de chaque parcelle concernée. Il est en effet difficile de choisir de façon pertinente un traitement sans connaître les adventices en présence. Adapté à la parcelle, ce type de traitement donne souvent satisfaction.

Le chlortoluron est un herbicide racinaire dont le comportement est fortement influencé par la pluviosité (trop de pluie induit un manque de sélectivité) et le type de sol (une teneur en matière organique élevée provoque une baisse d’efficacité). Sa persistance d’action est faible car il disparaît rapidement pendant la période hivernale. Il est très sélectif des céréales (excepté aux stades 1 à 3 feuilles) et efficace contre les graminées annuelles peu développées dont le vulpin et les dicotylées classiques comme le mouron des oiseaux et la camomille. En froment d’hiver, le chlortoluron ne peut cependant être utilisé que sur des variétés tolérantes.

Largement utilisé par le passé, le prosulfocarbe n’est plus une référence contre les graminées. Il constitue toutefois un produit de complément de choix contre un certain nombre de graminées et de dicotylées annuelles dont les VVL (violettes, véroniques, lamiers). Il est très valable contre le gaillet gratteron mais inefficace sur camomille.

La pendimethaline, l’isoxaben, le diflufenican ou le beflubutamide complètent idéalement le chlortoluron ou le prosulfocarbe en élargissant leur spectre antidicotylées aux VVL (mais pas au gaillet gratteron) et en renforçant leur activité sur les graminées. Au contraire de l’isoxaben, la pendimethaline, le diflufenican et le beflubutamide sont peu efficaces contre la camomille. Ces herbicides doivent être appliqués quand les adventices sont encore relativement peu développées (maximum 2 feuilles). L’association du diflufenican avec la flurtamone dans le Bacara élargit le spectre sur les renouées, mais surtout sur le jouet du vent.

Le flufenacet, actif contre les graminées et quelques dicotylées, doit être appliqué très tôt, sur des adventices de petite taille ou non encore germées. Il peut dès lors être pulvérisé en préémergence et juste après la levée de la culture. Disponible seul dans plusieurs spécialités commerciales, le flufenacet peut être associé au diflufenican (plusieurs produits), à la pendimethaline (Malibu) ou au picolinafen (Pontos et Quirinus) pour obtenir un spectre plus complet. Les camomilles et les gaillets peuvent toutefois échapper à ce type de traitement. Un manque de sélectivité peut être observé en cas de semis grossier et motteux. Attention, certains produits à base de flufenacet ne sont pas homologués en pré-émergence…

En orge, la lutte contre les graminées développées, repose uniquement sur deux antigraminées spécifiques applicables dès le stade 3 feuilles : le pinoxaden (dans l’Aaxial et l’Axeo) et, dans une moindre mesure, le fenoxaprop (le Foxtrot – le Puma S EW n’est pas agréé en orge) car les possibilités de rattrapage printanier sont plus que limitées (pas de sulfonylurée antigraminées en orge !). En froment, ces traitements ne sont pas recommandés.

Avadex Factor, complémentaire sur les vulpins résistants

Connu depuis les années ’60, le triallate, bien que présentant un potentiel antigraminées très intéressant, est difficile à mettre en œuvre. Pour être efficace, elle doit être incorporée dans le sol avant le semis de la culture. Cet automne, une nouvelle formulation, permettant d’éviter l’incorporation, est commercialisée. Dans Avadex Factor, le triallate est formulé sous la forme d’une suspension de capsules (CS), qui relâche la matière active petit à petit : l’incorporation n’est plus nécessaire et le produit peut être appliqué en préémergence !

Cet herbicide est donc une suspension de capsules contenant 450 g/l de triallate. Utilisable à la dose maximale de 3,6 l/ha, en pré-émergence comme en présemis incorporé, il est homologué en culture de froment d’hiver, d’orge d’hiver et d’orge de printemps. Même s’il peut présenter des efficacités intéressantes contre la véronique et le lamier, c’est un produit essentiellement antigraminées, particulièrement efficace contre le jouet-du-vent. Cela fait de lui un partenaire de choix en cas de vulpins résistants. Il ne devrait toutefois pas être conseillé seul mais plutôt comme complément d’un produit à base de flufenacet (attention, certains produits à base de flufenacet ne sont pas homologués en préémergence…).

Il convient de l’appliquer sur un sol suffisamment humide et bien préparé (sans mottes). En froment, le produit risque de manquer de sélectivité si le semis est trop superficiel.

D’après François Henriet

, dans le Livre Blanc, septembre 2019

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