Certains ont suggéré d’augmenter le degré d’auto-approvisionnement de toutes les sources de protéines, en mettant l’accent sur celles qui font le plus défaut (tourteaux ou farine de soja), grâce à l’augmentation de la production communautaire.
Plusieurs États membres ont rappelé qu’il était crucial de garantir des conditions de concurrence loyales et équitables au niveau de la politique commerciale de l’UE.
Pour de nombreux pays, dont la Belgique, la production de protéines dépend enfin de la demande du consommateur. Il est donc indispensable que les filières européennes de protéines tant végétales qu’animales bénéficient de débouchés rentables.
David Clarinval regrette le blocage des écologistes sur les NBT
« L’objectif d’une autonomie protéique permettra de donner des perspectives commerciales supplémentaires aux agriculteurs » a souligné le ministre David Clarinval à l’issue de la réunion, avant d’évoquer le rôle que pourraient jouer les NBT pour augmenter les rendements des protéagineux dans l’UE tout en conservant un « haut niveau de sécurité alimentaire dont les récents événements géopolitiques ont démontré la portée ».
On le sait, ce dossier revêtait une importance cruciale pour la Belgique qui avait axé sa présidence sur les thèmes de l’innovation, de la recherche et du développement, « des dimensions qui doivent permettre d’apporter des solutions aux agriculteurs » a rappelé M. Clarinval.
Pourtant, « aucune majorité n’a malheureusement pu se dégager au sein du conseil, tout comme en Belgique où nos collègues écologistes s’y opposent » a encore regretté le ministre fédéral.
La commission entre minimisation et temporisation
Conscient des attentes des États membres, le commissaire Wojciechowski a précisé que l’UE importait « seulement 23 % de ses aliments protéinés ».
Le principal problème, a-t-il prévenu, est que dans « le segment des aliments pour animaux à haute teneur en protéines, l’Europe en importe 66 % » et même « 90 % pour ce qui est du soja », le tout provenant d’un nombre limité de fournisseurs.
Il a rappelé que la commission « vient de finaliser une étude sur les stratégies alimentaires utilisées dans différents systèmes de production animale dans l’UE », laquelle conclut que la solution pour réduire la dépendance aux importations est une combinaison de différents leviers.
Et de citer l’augmentation de la part des protéines dérivées de l’herbe dans l’alimentation des ruminants, l’élargissement de la production de cultures protéagineuses et d’oléagineux, ou encore le développement des variétés qui améliorent leur profil nutritionnel.
Pour M. Wojciechowski, la question pourra être abordée dans le cadre de la future Pac dont elle pourrait devenir un élément « cardinal », proposant notamment de réfléchir à « un soutien spécifique aux exploitations mixtes ». Une question qui, comme un éventuel nouveau « plan protéines », reviendra à son successeur… Une façon de botter une nouvelle fois en touche.
Soutenir le secteur de l’élevage
Mais qu’en est-il au niveau belge ? « Il faut rappeler que les principales protéines disponibles en Europe, c’est herbe » nous a signifié en marge de la réunion le ministre David Clarinval pour qui soutenir ce secteur revient à soutenir celui de l’élevage et le rendre « le plus performant possible ».
Au-delà du soutien aux éleveurs, le ministre fédéral encourage la notion de diversification pour développer la production de protéines végétales tant à destination de la consommation animale qu’humaine. Une orientation bénéfique pour l’environnement et les sols.
Les importations ukrainiennes s’invitent à la réunion
La question des importations ukrainiennes s’est logiquement invitée à la réunion puisque les ambassadeurs des États membres et les eurodéputés de la commission du Commerce international du parlement ont approuvé, respectivement le 8 et le 9 avril, la prolongation des mesures commerciales autonomes pour l’Ukraine d’une année supplémentaire, jusqu’en juin 2025, donc.
Le texte propose tout d’abord d’élargir au second semestre 2021 la période de référence permettant de calculer le seuil de déclenchement du mécanisme de « frein d’urgence » automatique, conformément à la proposition du conseil du 27 mars. Autre nouveauté issue de cette proposition : la période d’activation de cette mesure de sauvegarde automatique passe de 21 jours à 14 jours.
Mais le blé tendre et l’orge ne sont encore une fois pas intégrés au dispositif, contrairement à la volaille, aux œufs, au sucre, à l’avoine, au gruau, au maïs et au miel.
La commission promet toutefois d’intensifier son contrôle sur les flux d’importations de céréales, en particulier le blé, pour éventuellement mettre en place des mesures d’urgence en cas de déséquilibre.
Situation extrêmement tendue sur le marché du blé
Le dossier n’a pas manqué de faire réagir nos ministres de l’Agriculture présents à Genk.
« Nous connaissons, au niveau du marché du blé, une situation extrêmement tendue qui s’illustre par un prix très bas, autour de 150 €/tonne, ainsi que d’importants stocks, que ce soit chez nous ou dans d’autres pays européens » a ainsi souligné Willy Borsus qui a demandé à la commission de donner « un signal fort » , par exemple « en soutenant les filières traditionnelles de commerce et d’acheminement du blé ukrainien vers les marchés historiques que sont l’Afrique et d’autres parties du monde » afin de sortir de l’impasse.
Si la présidence belge s’est montrée relativement satisfaite du compromis, le ministre fédéral a regretté, quant à lui, que « l’on n’ait pu aller plus loin au niveau des céréales ».
Malgré cet accord obtenu de haute lutte, les débats devraient donc se poursuivre alors que l’agriculture sera l’un des enjeux principaux de la future adhésion de l’Ukraine à l’UE.
Marie-France Vienne