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Vos engrais de ferme ont de la valeur !

Nous avons traversé une année 2022 extrêmement difficile au niveau du marché des engrais minéraux. Leur faible disponibilité, notamment celle des engrais azotés, nous a accompagné longtemps et a provoqué des prix records avec un pic autour de 1000 €/t pour le nitrate d’ammonium en été 2022, ce qui revient à 3,7 € (!) l’unité d’azote, une situation encore plus aggravée par la période de sécheresse jamais connue auparavant.

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L es perturbations de l'économie mondiale et du commerce, suite à des conflits, notamment la guerre de la Russie contre l’Ukraine, ont des conséquences directes et très lourdes à différents niveaux, entre autre sur le secteur agricole, bien évidemment non comparable à la souffrance du peuple ukrainien. Nous nous voyons donc à nouveau confrontés à une situation compliquée en termes de production agricole, ce qui souligne à quel point il est indispensable de valoriser au mieux les engrais de ferme et de mettre tout en œuvre pour optimiser leur apport de la manière la plus efficace que possible.

En ce début d’année 2023, le marché des engrais minéraux, après des nombreux mois d’oscillations, reste toujours sujet à beaucoup de mouvements. Les prix indiqués ci-après sont donc à titre indicatif et peuvent encore évoluer au cours de prochains mois. On observe une augmentation de prix pour le phosphore (+25%) et le potassium (+33 %), par rapport à janvier 2022. Seul le prix de l’urée a diminué de 30 %, mais soyez vigilants quant à son équivalent base négatif (- 46) et donc son effet acidifiant.

Il n’y a pas de changements pour les éléments calcium et magnésium vendus sous forme de carbonate. Dans la grande majorité des prairies, il n’est pas nécessaire d’apporter encore du magnésium au delà des apports par les engrais de ferme. Le prix de référence pour le calcul de la valeur des engrais de ferme provient du carbonate de magnésium. L’apport de sulfate de magnésium (Kiesérite) peut être recommandé en cultures avec des besoins plus importants en souffre (crucifères, betteraves...) et moins fertilisées par des matières organiques.

Le phosphate naturel et le phosphore soluble comme engrais de fond

Comme tous les ans, deux tableaux présentent la fertilisation des prairies permanentes et des cultures. Dans le cas des prairies permanentes, l’usage du phosphate naturel est recommandé comme engrais de fond agissant pendant plusieurs années. Il a un effet chaulant (équivalent base + 25) et le phosphore est solubilisé en condition acide. Ceci se justifie lorsque les prairies permanentes sont acides avec un pH KCl inférieur à 5,5.

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Le deuxième tableau concerne les cultures et les prairies temporaires qui sont généralement installées en rotation sur des sols dont le pH est proche de la neutralité. Les apports de phosphore soluble, sous forme de triple super phosphate (TSP), agissant rapidement, sont recommandés dans ces conditions.

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Quid des échanges?

Les échanges d’engrais de ferme entre deux exploitations, ainsi que les échanges paille / fumier vous permettront éventuellement de vous rapprocher plus d’une autonomie fertilisante au sein de votre exploitation et de pouvoir limiter vos achats d’intrants. L’asbl Protect’eau, ainsi que les conseillers d’Agra Ost sont à votre disposition pour toute aide dans les démarches d’échanges d’engrais de ferme. Restez toujours prudent à bien respecter les différentes législations (MAEC, PAC, bio, liaison au sol, PGDA...) qui vous concernent lorsque vous importez des engrais de ferme d’une autre exploitation.

La structure française Arvalis met à disposition un logiciel pour vous aider dans le calcul des équivalences, lorsque vous réalisez des échanges paille / fumier entre collègues, disponible sur www.paille-fumier.arvalis-infos.fr.

Un autre point fort des engrais de ferme consiste en leur apport en carbone. Une partie de ce carbone est source d’humus pour les sols. Celui-ci a une valeur réelle d’autant plus importante que la teneur des sols est pauvre en carbone. Les apports de carbone sont difficiles à chiffrer financièrement, mais il est vrai que l’augmentation de la teneur en humus des sols agricoles via l’apport de matières organiques joue un rôle clé dans le combat contre le réchauffement climatique. Il existe d’ailleurs différentes associations (par exemple la start-up ‘soil-capital’), qui proposent certaines formes de rémunération financière pour la séquestration du carbone sous forme d’humus dans les sols agricoles. Une référence intéressante qui souligne ce défi est le prix des certificats CO2, qui tournent autour de 80 €/t CO2 depuis un an, contre 30 € en janvier 2021.

Si la prairie permanente est un puits de carbone, les terres de cultures, labourées et travaillées chaque année avec peu ou pas d’apport de matières organiques, risquent de s’appauvrir. La fertilisation avec des engrais de ferme a donc un double effet bénéfique dans les sols cultivés: l’apport de carbone au-delà de leur apport de nutriments.

José Wahlen et Pierre Luxen

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