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Rapport 2023 de l’Observatoire du foncier agricole wallon : «les chiffres de 2022 marquent un ralentissement de la hausse des prix»

L’accès à la terre, son prix, question existentielle pour celles et ceux qui la travaillent et jouent, au fil des années, un numéro de funambule sur la corde raide de l’économie. Le 26 juillet, le ministre Willy Borsus, entourés d’experts, a fait le point sur les dernières tendances et annoncé le lancement de l’agence du foncier agricole wallon et l’introduction du droit de préférence.

Temps de lecture : 7 min

Le ministre régional s’était ainsi entouré de Marc Thirion, directeur de la DAFoR (Direction de l’Aménagement foncier rural), Renaud Grégoire (notaire et porte-parole de la Fednot) et Éric Meganck (Inspecteur général faisant fonction du Département des Comités d’acquisition) pour présenter les chiffres clefs (et très attendus) issus du rapport 2023 de l’Observatoire du foncier agricole wallon.

L’Observatoire en un coup d’œil

Le marché est sous pression, les prix montent… Et c’est donc dans ce cadre que le gouvernement wallon a décidé de mettre en place un observatoire « afin d’acquérir des données relatives aux différentes opérations foncières, en analyser les chiffres sous l’éclairage de différents indicateurs. C’est aussi de devenir un outil d’aide à la décision » a posé M. Thirion.

Pour présenter les chiffres clefs de l’Observatoire du foncier wallon, le ministre régional s’était entouré de Marc Thirion, directeur de la DAFoR (Direction de l’Aménagement foncier rural), Renaud Grégoire (notaire et porte-parole de Fednot) et Eric Meganck (inspecteur général faisant fonction du Département des Comités d’acquisition).
Pour présenter les chiffres clefs de l’Observatoire du foncier wallon, le ministre régional s’était entouré de Marc Thirion, directeur de la DAFoR (Direction de l’Aménagement foncier rural), Renaud Grégoire (notaire et porte-parole de Fednot) et Eric Meganck (inspecteur général faisant fonction du Département des Comités d’acquisition). - M-F V.

La collecte des données a commencé en 2017, et ce sont les études notariales et les comités d’acquisition qui notifient à l’Observatoire l’ensemble des informations relatives aux biens immobiliers agricoles (constitués d’au moins une parcelle cadastrale bâtie ou non bâtie située totalement ou partiellement en zone agricole au plan de secteur et/ou déclarée totalement ou partiellement au SIGeC) qui ont fait l’objet d’une opération foncière.

36.368 €, le chiffre clef

Pour l’année 2022, 8.636 notifications d’opérations immobilières ont été envoyées à l’Observatoire, nous apprend M. Thirion. Parmi lesquelles 6.146 ventes et acquisitions, 753 donations en pleine propriété, 45 échanges et 9 apports en personnes morales.

Les 6.146 ventes notifiées l’année dernière représentent une superficie totale de 8.330 hectares. Le montant total des ventes est de 1.027.177 €, ce qui donne un prix moyen de vente de 167.177 € et un prix moyen par hectare de 123.346 €.

Les données collectées concernent tous les biens immobiliers agricoles, il s’agit donc de parcelles bâties et non bâties, situées totalement ou partiellement en zone agricole.

Le caractère bâti d’un bien immobilier et l’affectation au plan de secteur influencent considérablement le prix moyen à l’hectare. Afin de cerner au mieux l’évolution du foncier rural, l’Observatoire réalise un focus sur les seules ventes de biens immobiliers agricoles situés entièrement en zones agricoles au plan de secteur et ne comportant aucune parcelle cadastrale bâtie.

En 2022, ce prix de vente moyen à l’hectare des biens immobiliers agricoles non bâtis entièrement situés en zone agricole au plan de secteur était de 36.368€.

Tassement de la hausse des prix

Il s’agit d’une hausse de 4,07 % par rapport à 2021, où le prix était de 34.945€/ha contre 30.521€/ha en 2020, soit une augmentation 14,49 % entre 2020 et 2021.

Globalement, entre 2017 et 2022, le prix de vente moyen à l’hectare de biens immobiliers agricoles non bâtis situés entièrement en zone agricole a augmenté de 33,7 %, passant de 27.205 €/ha à 36.368 €/ha, ce qui équivaut à une évolution moyenne de 6 % par an.

L’Observatoire nous apprend par ailleurs que c’est en région limoneuse que s’est concentrée la majeure partie des ventes en 2022 puisque 2.382 opérations y ont été enregistrées, ce qui représente 38,8 % des ventes totales de l’année.

C’est la région sablo-limoneuse du Brabant wallon qui présente le prix moyen le plus élevé avec 81.797 €/ha. A contrario, les terres les moins chères se situent en haute Ardenne (région agricole exclusivement située en province de Liège) avec un prix moyen de 12.304 €/ha (voir tableau en page suivante).

Parmi les tendances que l’Observatoire du foncier agricole a pu mettre en avant, on relèvera, enfin, la part croissante, mais toujours minoritaire, d’acheteurs qui sont des personnes morales (en hausse de 16,9 % entre 2017 et 2022). À l’inverse, les achats de terres agricoles par des agriculteurs à titre principal en personne physique diminuent mais restent conséquents, de l’ordre de 40 %.

32-prix de vente moyen des biens immobiliers-web

« Les chiffres de 2022, année où, selon l’institut des comptes nationaux, l’inflation s’est située à 10,3 %, marquent un ralentissement dans l’accroissement des prix » a pointé le ministre Borsus.

Il s’agit « d’une accalmie qui est, du reste, similaire à ce que l’on constate dans d’autres segments de l’immobilier » a renchéri le notaire Renaud Grégoire.

Et d’ajouter que cette nouvelle tendance est « assez remarquable après des années de très grosses augmentations. Il y a une forme de tassement, mais quand il faut vendre, cela se vend, même si cela prend plus de travail qu’il y a un an et demi ou deux ans ».

Création de l’Agence du foncier agricole wallon

L’amélioration de l’accès au foncier. Le sujet est aussi sensible qu’épineux, et, faut-il encore le rappeler, la Déclaration de Politique Régionale 2019-2024 l’avait d’ailleurs inscrite dans les priorités du gouvernement wallon, au même titre que la mise en place de soutiens pour encourager et accompagner l’installation des jeunes en agriculture, et faciliter la transmission d’exploitations, aussi hors cadre familial.

Willy Borsus est revenu sur le travail important mené fin 2022 dans le cadre des « Assises de la terre », mêlant analyses, propositions d’experts et comparaisons des régions autres que la Wallonie, dans le but de soutenir l’accès acquisitif ou locatif à la terre agricole et de dégager des pistes concrètes pour la politique foncière wallonne.

Ces réflexions ont amené le gouvernement wallon à créer une agence du foncier agricole wallon au sein de la DAFoR où elle aura pour mission d’améliorer l’accès à l’information sur les règles relatives aux mises à disposition des biens immobiliers agricoles publics. Elle accompagnera les propriétaires publics dans la mise à disposition de leurs biens immobiliers agricoles dans le cadre du bail à ferme.

Le ministre a pu noter à cet égard une certaine méconnaissance de la réforme de 2019, que ce soit au niveau des notaires, des propriétaires, des agriculteurs, des pouvoirs publics.

Et de citer, par exemple, les possibilités de majoration de fermage ou les divers avantages fiscaux des baux de longues durées. L’agence permettra de vulgariser la législation sur le bail à ferme afin de la mettre à disposition de tous.

La région wallonne a estimé qu’environ 60.000 ha de terres, soit 8 % du marché,  appartiennent à divers pouvoirs publics, un chiffre qui ouvre  quelques perspectives au secteur agricole.
La région wallonne a estimé qu’environ 60.000 ha de terres, soit 8 % du marché, appartiennent à divers pouvoirs publics, un chiffre qui ouvre quelques perspectives au secteur agricole. - M-F V.

Quoi qu’il en soit, le texte, adopté en première lecture le 13 juillet dernier, doit encore faire l’objet de diverses consultations formelles mais cette agence du foncier agricole pourrait devenir une réalité fin de cette année.

Introduction du droit de préférence pour la Région wallonne

Outre l’agence du foncier agricole, le ministre régional a annoncé la création du droit de préférence pour la région wallonne qui permettra à cette dernière d’acquérir « par préférence » donc, les biens immobiliers agricoles vendus par les propriétaires publics afin de les mettre à disposition d’agriculteurs, via un bail à ferme.

À ce propos, la région wallonne a estimé qu’environ 60.000 ha de terres, soit 8 % du marché, appartiennent à divers pouvoirs publics, un chiffre qui ouvre quelques perspectives au secteur agricole.

Et les outils wallons ne manquent pas, via le Plan de relance wallon, pour donner un coup de pouce à la transmission des exploitations.

Car si 68 % des terres sont toujours acquises par des acteurs du monde agricole, l’emprise des sociétés s’étend.

« Il est de plus en plus difficile d’acquérir une terre et donc de devenir agriculteur si on n’est pas issu du milieu agricole tandis que la transmission des terres se complexifiera encore à l’avenir » pointe Marc Thirion.

Le ministre régional a ainsi cité le projet d’accompagnement porté par la Fja, la Fugea et Terre-en-vue, ainsi que celui porté par la Fwa, Transmiferme.

M. Borsus a en outre rappelé l’existence de deux nouveaux modes de baux, de courte durée. Le bail de transmission (permettant au propriétaire de s’engager sur un nombre limité d’hectares) et le bail de projet (dans le cadre d’une diversification spécifique telle que du maraîchage…) qui sont destinés à « attirer vers le bail à ferme un certain nombre de propriétaires qui ont tendance à le quitter ou à s’en détourner ».

Enfin, la région wallonne a décidé de soutenir les projets « Install » de la Fugea, « Cap Installation » de la Fja et « GoFerme » de la Fwa, afin d’accompagner l’installation en agriculture.

Marie-France Vienne

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