Le doryphore: un insecte de nouveau présent dans les potagers!
Le doryphore est de plus en plus présent dans les champs et les potagers depuis ces dix dernières années. Quelques adultes et larves de cet insecte avaient été déjà observés en avril. Et si les conditions météo leur ont été très défavorables, depuis quelques jours, de nouveaux individus sont repérés ci et là.

Craint pour ses ravages au milieu des années 1930, le doryphore a fait l’objet de l’attention de tous au point de mobiliser les écoliers pour le cueillir et le détruire. La crise économique des années ’35 et les années de disettes de la guerre 39-45 ont laissé de cet insecte une peur collective qui s’est transmise jusqu’à aujourd’hui. Pourtant, les moyens massifs de lutte des années ‘50 et ‘60 l’avaient pratiquement fait disparaître de notre région. Il n’est revenu que depuis le début de ce siècle.
Le doryphore, Leptinotarsa decemlineata, est un coléoptère de la famille des Chrysomélidés. Les larves se nourrissent des parties aériennes de plantes de la famille des Solanacées dont la pomme de terre, la tomate, l’aubergine ou encore la morelle noire, la morelle douce-amère et le datura.
Les pupes passent l’hiver dans le sol. Au réchauffement du printemps, elles muent vers le stade adulte et remontent à la surface. Après l’approche nuptiale, la femelle pond quelques centaines d’œufs par groupes d’une trentaine. La ponte se fait en face inférieure des feuilles d’une plante nourricière trouvée jusqu’à quelques centaines de mètres du lieu d’émergence du sol. Les larves éclosent après environ une semaine d’incubation. Elles vont évoluer en dévorant le feuillage de la plante hôte durant un peu plus de deux semaines. Puis la larve, à la fin de son développement, descend s’enterrer et s’empupe. Après plusieurs semaines, un second cycle commencera. Selon les conditions de l’année, ce sera mi-juillet ou mi-août avec en conséquence un second puis un troisième cycle. À la fin de son développement, celle de deuxième ou de troisième génération de l’année devra souvent attendre l’année suivante pour recommencer un nouveau cycle.
Le doryphore adulte peut parcourir plusieurs centaines de mètres à pied, à la recherche d’une plante hôte. Il est lourdaud au vol, mais peut être emmené par le vent sur plusieurs dizaines de kilomètres.
De gros dégâts autour des foyers
Une larve de doryphore mange 35 à 45 cm² de feuillage pour son développement. C’est le nombre d’insectes par unité de surface qui fait l’importance du dommage. On estime en Belgique que 20 % de feuillage dévoré sur des jeunes plantes, 40 % au moment de la floraison et 60 % en fin de cycle végétatif sont des seuils d’intervention. En deçà de ces dommages, les pertes en tubercules sont faibles. En pratique, les foyers de doryphores sont rarement répartis sur toute la parcelle. La femelle a pondu ses œufs sur quelques plantes et les larves vont provoquer de forts dégâts autour de ces foyers, toutes les feuilles peuvent y être dévorées.
Le développement des populations de ces insectes est lié à la météo de l’année. Lors des étés froids, il faut deux à trois mois pour qu’une génération de doryphores boucle son cycle. Lorsqu’ils sont chauds, le cycle dure un peu plus d’un mois et plusieurs générations se succèdent, les populations augmentent sensiblement. Une forte population en fin d’un été permet de démarrer l’année suivante avec une grande présence de ces nuisibles dans les parcelles concernées. Les adultes qui sortent de terre sont alors à la recherche de pommes de terre sauvages ou cultivées à proximité. C’est à cet endroit que se dérouleront les pontes.
Comment le combattre ?
Dans un jardin, les cueillettes manuelles des larves suffisent à réduire les populations de doryphores. Elles sont ensuite sacrifiées dans le bocal de cueillette (congélation) ou en les donnant aux poules.
Des expérimentations avec des aspirateurs ont été testées en agriculture biologique et donnent des résultats. Cependant, il ne s’agit pas d’une technique simple à mettre en oeuvre.
Le doryphore possède des ennemis en Amérique du Nord que nous ne rencontrons guère chez nous. D’autres insectes mangent les œufs comme la punaise masquée (Perillus bioculatus) ou des carabes (Lebia grandis notamment). D’autres les parasitent comme des tachines (Doryphorophaga doryphorae). Chez nous, les pies sont attirées par la couleur rouge des larves et s’en délectent.
Les insecticides sont à éviter. D’abord, il n’y a pas de produit homologué pour cet usage en jardin. Ensuite, les professionnels ne les emploient pas afin de ne pas déséquilibrer le travail des auxiliaires (coccinelles, syrphes, chrysopes…) qui maîtrisent les populations de pucerons.
Le respect d’une rotation longue d’au moins quatre ou cinq ans est efficace en grandes parcelles. Cependant, en potagers, le doryphore adulte est capable de se déplacer de quelques dizaines de mètres pour trouver la parcelle de pommes de terre la plus proche.