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Échange d’animaux en Europe: quelles sont les règles à suivre actuellement?

Quelles sont les exigences à respecter pour transporter des animaux dans l’Union européenne ? Quelles mesures doivent être prises pour quel cas particulier ? Et quels sont les impacts sur le commerce du bétail ? Chantal Rettigner, de l’Afsca, a fait le point sur la législation en vigueur avec un focus particulier sur les maladies les plus préoccupantes comme la rhinotrachéite infectieuse bovine, la diarrhée virale bovine, la fièvre catarrhale ovine ou encore la maladie hémorragique épizootique.

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« Concernant les mouvements en Europe, il existe des exigences réglementaires. Ces dernières visent à protéger le lieu de destination, mais aussi notre pays lorsque des bêtes viennent d’un autre endroit. L’intérêt est de s’assurer que les animaux transportés ne représentent pas de risque sanitaire », a directement indiqué Chantal Rettigner, directrice du service santé animale de la politique de contrôle de l’Afsca, chef des services vétérinaires belges. Cette spécialiste a été invitée à faire le point sur « La situation sanitaire en Europe : impact sur le commerce des animaux », à l’occasion de l’assemblée générale de l’Arsia.

Rappelons que ces différentes règles sont listées selon la maladie concernée. Par ailleurs, un pays peut décider de prendre des mesures particulières pour l’une d’elles, par exemple si elle représente un risque potentiel pour son territoire. C’est, notamment, le cas en Belgique pour la besnoitiose pour laquelle le dépistage est devenu obligatoire, comme nous l’expliquions dans Le Sillon Belge du 2 mai.

IBR : les mesures selon le statut du pays de destination

Ensuite, impossible de parler de maladie sans citer la rhinotrachéite infectieuse bovine (IBR), pour laquelle notre pays poursuit l’objectif d’obtenir le statut indemne d’ici 2027. Elle est donc « sous-programme d’éradication ».

Cela signifie que si l’on décide de déplacer un animal vers un pays ayant le même statut, ou qui est indemne (par exemple, l’Allemagne), plusieurs règles doivent être suivies.

Pour un éleveur belge qui souhaite envoyer un animal vers un état indemne, la vaccination n’est pas nécessaire, mais un test d’anticorps BHV1 doit être réalisé. Toujours dans ce type de situation, concernant la quarantaine, elle varie : si les animaux viennent d’un établissement indemne, elle est d’une durée dans l’exploitation de minimum 30 jours. Le test doit, lui, être réalisé 15 jours avant le départ. Par contre, s’ils se trouvent dans un élevage non indemne, ils doivent passer par une quarantaine agréée, soit différente de celle réalisée à la ferme. Ils sont ainsi mis dans une structure à part, complètement isolés des autres bêtes. Et ce, pendant minimum 30 jours. Ils doivent aussi subir un test 21 jours après le début de la quarantaine.

C’est (un peu) plus simple si l’échange est réalisé avec un pays qui possède le même statut que nous, à l’instar de la France ou encore du Grand-Duché du Luxembourg. Si les animaux viennent d’un établissement indemne, il n’y a pas d’exigence particulière. Dans le cas contraire, ils doivent passer par la case « quarantaine agréée » minimum 30 jours. Le test doit, lui, être réalisé 21 jours après le début de la quarantaine.

« En Belgique, l’arrêté spécifie des exigences supplémentaires pour les animaux infectés ou suspectés de l’être. Ils ne peuvent aller que vers un abattoir ou un centre d’engraissement. Une règle en vigueur jusqu’à la fin du mois d’octobre ».

Objectif : établir des établissements indemnes pour le BVD

Pour la diarrhée virale bovine (BVD) « il y a eu énormément de travail réalisé en Belgique pour améliorer le statut sanitaire. Et aujourd’hui, la majorité des exploitations et animaux est indemne. Le problème est que tout ce dispositif belge n’a pas été introduit auprès de l’Europe pour être reconnu comme programme d’éradication officiel… », souligne l’experte de l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire. Conclusion ? Les élevages de notre pays sont considérés comme non indemnes, ce qui complique, évidemment les choses, surtout lorsqu’ils doivent partir vers une zone indemne, comme l’Allemagne.

Nos élevages doivent, dès lors, répondre à différentes exigences. Il n’y a pas de vaccination obligatoire, mais des tests doivent être réalisés pour être sûr que les animaux ne soient pas IPI (infecté persistant immunotolérant) et vérifier les anticorps BVD positif. Autre obligation : ils doivent réaliser une quarantaine agréée (donc dans un établissement à part, et sans contact), minimum 21 jours. Notons que d’autres mesures s’appliquent pour les vaches gestantes…

« Nous avons entendu des critiques concernant le nombre de règles chez nous, tandis que les Luxembourgeois ont plus de liberté. Mais c’est faux. Il faut prendre en compte le fait que le statut sanitaire du Luxembourg est différent. Dans ce pays, des élevages indemnes ont pu être identifiés. Avec nos collègues du SPF, de l’Arsia et la DGZ, nous sommes en train d’étudier la meilleure façon de valoriser ce qui a été fait sur le terrain. La première piste serait d’être reconnu comme état en cours de programme d’éradication officiel. Mais cela peut prendre un certain temps. Nous avons donc une autre solution, laquelle serait d’établir une liste d’établissements indemnes, soit dans lequel il n’y a pas d’IPI depuis plus de 18 mois. » Lorsque ce sera le cas, les bovins ne seront plus soumis à la quarantaine agréée encore obligatoire jusqu’à présent…

La FCO : trois vaccins disponibles

Autre maladie qui est sur les lèvres de tous les éleveurs en ce moment : la fièvre catarrhale ovine ou la « blue tongue ». Alors que nous étions indemnes, suite à une infection par le sérotype 3 en octobre, notre pays a perdu ce statut. Entre pays infectés (comme les Pays-Bas) il n’y a pas de conditions spécifiques d’échange. Cela se complique, évidemment, si l’échange se passe avec un autre état considéré comme n’ayant pas ce virus, comme le Luxembourg. Si c’est le cas, on peut procéder à l’envoi si c’est pour un abattage immédiat, si les animaux sont vaccinés ou s’ils sont envoyés durant la période saisonnièrement indemne de l’état membre, à savoir, un moment reconnu sans culicoïde, ces insectes microscopiques qui transmettent la maladie par leur piqûre.

Les choses pourraient être différentes si les bêtes partaient d’un établissement reconnu comme étant protégé. « Cela n’existe pas en Belgique, car il est très difficile de s’assurer qu’aucun culicoïde ne pénètre dans l’infrastructure en question. »

Une autre possibilité est que l’état membre de destination accorde des dérogations. Ces dernières sont consultables sur le site de l’Afsca.

Par ailleurs, il est nécessaire de souligner que trois vaccins sont autorisés contre cette maladie. Des traitements qui tombent à point nommé puisque les Pays-Bas ont notifié de nouveaux foyers de FCO dernièrement. « Cela signifie que la maladie a bien repris, de même que la période d’activité des culicoïdes. Les vaccins sont disponibles, et même si ce n’est pas obligatoire, mieux vaut prendre des dispositions adéquates. » Un conseil partagé par l’Arsia qui confirme que « la vaccination est la seule manière de protéger les animaux sensibles contre ce virus ».

La MHE : être à moins de 150 km d’une zone indemne

Dernière à être passée au crible : la maladie hémorragique épizootique (MHE). Alors qu’elle a débuté en Italie, pour aller vers l’Espagne, le Portugal et la France, elle continue à se propager à grande vitesse.

Au niveau des mesures : les animaux ne doivent pas venir d’un endroit situé à moins de 150 km d’un foyer. Cependant avec l’accord de l’état membre de destination, on peut envoyer des animaux provenant de zone infectée sans condition. « Il s’agit des règles originales, mais comme la maladie s’est répandue, l’Europe a adapté sa législation pour permettre des échanges d’animaux s’ils sont destinés à l’abattoir, s’ils sont transportés durant la période d’inactivité du vecteur, ou s’ils viennent d’un établissement protégé (donc sans culicoïde comme la FCO). » Dernièrement, une nouvelle adaptation de la législation a été votée, mais elle n’est pas encore publiée. Il y aura une permission des mouvements pour les animaux vaccinés… mais le hic est qu’il n’existe pas encore de vaccin. D’autres dérogations devraient aussi être appliquées, comme le traitement par insecticide et des tests PCR négatifs.

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