Un château de cartes pour dénoncer une Pac fragilisée
Plusieurs syndicats agricoles se sont rassemblés, le 20 mai dernier près du rond-point Schuman à Bruxelles, autour d’une mise en scène pour dénoncer les menaces pesant sur le budget de la Pac dont le financement est jugé de plus en plus précaire.

Alors que la commission travaille à la révision du cadre financier pluriannuel pour la période 2028-2034, les inquiétudes grandissent en raison de la possible fusion des deux piliers historiques de la Pac, le Feaga (paiements directs) et le Feader (développement rural), au sein d’un mécanisme centralisé. Une option jugée dangereuse par plusieurs syndicats agricoles qui redoutent une dilution des moyens et une perte de lisibilité.
« Sans financement clair, tout le système agricole européen risque de s’écrouler », alerte Lode Ceyssens, président du Boerenbond. Au-delà des enjeux budgétaires, c’est le modèle agricole européen lui-même qui semble remis en question. Pour Daniel Coulonval, président de la Fédération wallonne de l’agriculture (Fwa), le malaise est plus profond. Il pointe un manque persistant de reconnaissance pour un secteur stratégique, déjà fragilisé par des accords commerciaux comme celui en négociation avec le Mercosur. Le Copa-Cogeca demande, quant à lui, une Pac solidement dotée, protégée contre la renationalisation et indexée sur l’inflation.
Un appel à préserver un modèle agricole vivant
La ministre Anne-Catherine Dalcq a tenu à manifester son soutien aux manifestants en réaffirmant l’importance de préserver un modèle agricole durable, familial et rémunérateur. L’action menée par les agriculteurs s’est voulue symbolique et pédagogique, rappelant que l’agriculture reste un pilier fondamental du projet européen.
C’est dans ce contexte que la Fugea a fait également entendre sa voix. Face à l’enchaînement des crises, elle appelle à une réforme structurelle pour garantir la pérennité de l’agriculture et préparer le renouvellement générationnel. En Wallonie, 8.000 fermes seront à transmettre dans les prochaines années, et seules 25 % ont un repreneur identifié. L’urgence est réelle.
Le syndicat wallon insiste sur la nécessité de remettre la régulation des marchés au cœur de la Pac. Elle plaide pour une réforme ambitieuse de l’OCM afin de garantir des prix stables et justes, socles essentiels du revenu agricole. Elle défend également un budget européen fort, clairement défini à l’échelle de l’UE, à l’abri d’une logique de renationalisation, et indexé sur l’inflation pour faire face aux besoins croissants sur le terrain.
La distribution des aides doit, selon elle, être profondément réorientée. Il s’agit de cibler les soutiens vers les agriculteurs actifs, de plafonner les aides, de renforcer les mécanismes de soutien à la transition agroécologique, aux petites structures, aux jeunes installés, ainsi qu’aux filières en difficulté. La Fugea réclame en outre une stratégie européenne de gestion des crises climatiques, sanitaires et économiques, via une réserve de crise publique, efficace et réactive, rejetant le recours à des assurances privées inadaptées à l’échelle du secteur.