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La hausse du prix du beurre ne résout pas la crise laitière

La récente flambée du prix du beurre ne sort pas de la crise les producteurs laitiers, qui obtiennent toujours des prix inférieurs à leurs coûts de production, a averti jeudi l’European Milk Board (EMB). L’organisation regroupant des producteurs laitiers a organisé une action symbolique devant la Commission européenne pour demander un instrument légal, dans l’UE, de réduction volontaire des volumes de lait.

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Les prix du lait se sont redressés ces derniers mois, venant d’un plancher de 25 centimes le litre en 2016 pour s’établir autour des 35 centimes actuellement. Et pourtant, ce niveau reste encore insuffisant pour couvrir les frais de production des éleveurs, selon l’EMB qui a publié une étude fouillée sur les coûts de production dans cinq pays européens (Allemagne, Belgique, Danemark, France et Pays-Bas).

En outre, la forte augmentation du prix du beurre ne profite que partiellement aux producteurs laitiers. Dans le prix, « il y a en fait une différence entre la rémunération de la graisse et la rémunération de la protéine. Au final, cela reste insuffisant », explique Silvia Däberitz, directrice de l’EMB. Selon l’étude de l’EMB, réalisée par le bureau d’études agricoles allemand BAL sur base de données officielles et d’un échantillon représentatif d’exploitations laitières, le coût de production moyen d’un kilogramme (ou litre) de lait en Belgique atteignait en 2016 41,37 centimes d’euro, loin des 26,70 centimes payés en moyenne aux éleveurs.

En d’autres termes, le prix du lait en Belgique ne couvrait en 2016 que 65 % des coûts de production. Ceux-ci comprennent les charges liées aux semences, aux frais de vétérinaires, aux engrais, aux aliments pour le bétail, aux frais généraux, au fermage, etc. Il est également tenu compte d’une rémunération « équitable » pour le producteur laitier.

Dans l’autre sens, la valeur de la viande bovine et les aides octroyées aux agriculteurs sont déduites des coûts. La situation était comparable au Danemark, où les coûts de production étaient l’an dernier de 39,77 centimes le kg, en France (41,02 centimes/kg), en Allemagne (41,17 centimes/kg) et aux Pays-Bas (42,66 centimes/kg). « Cette étude montre que nous ne sommes pas payés pour le travail que nous faisons. Si nous voulons une agriculture et du lait de qualité en Europe, il faut payer le prix », résume Sieta van Keimpema, productrice de lait aux Pays-Bas et vice-présidente de l’EMB.

Forte de ces chiffres, qui permettent d’objectiver la situation des agriculteurs, l’EMB réclame la mise en place, dans l’Union européenne, d’un mécanisme permanent permettant, en cas de crise, de limiter ou de réduire la production laitière pour une durée limitée, afin de faire remonter les prix. « Les producteurs laitiers ne veulent pas de subsides. Ce dont nous avons besoin c’est d’un mécanisme légal qui permette d’éviter les crises », poursuit Sieta van Keimpema. L’EMB a ainsi mis au point un « programme de responsabilisation face au marché » destiné à être appliqué lorsque le marché du lait connaît un déséquilibre. Ce programme prévoit des mesures de surveillance du marché (via l’Observatoire du marché laitier) et des mesures d’intervention.

En cas de crise, les éleveurs européens seraient incités voire, dans le pire des cas, contraints à réduire leur production durant une certaine période. Pour porter ces revendications, plusieurs dizaines d’agriculteurs européens ont organisé une action symbolique devant le Berlaymont, jeudi matin à Bruxelles. Autour d’une figure de vache squelettique, les producteurs ont laitiers ont symboliquement montré qu’après des années de crise, il ne leur reste plus « que la peau sur les os ».

Plusieurs agriculteurs européens ont également pointé du doigt l’industrie agroalimentaire et la grande distribution qu’ils accusent de se réserver des marges bénéficiaires exagérées. Plus tôt dans la matinée, plusieurs membres de l’EMB avaient pu rencontrer des responsables de la Commission européenne pour leur faire part de leur point de vue. Les producteurs laitiers ont averti qu’ils reviendraient dans les prochains mois si leur voix n’était pas entendue.

(Belga)

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