Investir dans de nouvelles technologies: comment être sûr de faire le bon choix?
Nous en parlons régulièrement dans ce journal : en élevage, et en agriculture en général, de nouvelles technologies fleurissent sans cesse sur le marché. Robots, intelligence artificielle, imagerie 3D… il y a parfois de quoi en perdre la tête ! Dès lors, face à ces outils souvent décrits comme « innovants », comment être sûr de faire le bon choix et d’en tirer un réel bénéfice ? Béatrice Eon de Chezelles, du Crédit agricole, et Yannick Péchuzal, de l’Institut de l’élevage français, ont apporté des pistes de réponse à l’occasion du Sommet de l’élevage.

Plusieurs outils passés au crible
Calculer le temps économisé grâce à ces équipements
Dès lors, comment être certain de « bien » investir ? Tout d’abord, chaque éleveur souhaitant acquérir un nouvel équipement doit se poser la question de sa rentabilité économique. À l’Institut de l’élevage français, Yannick Péchuzal, économiste et spécialiste en élevage bovin laitier, a proposé de calculer le retour sur investissement. Un concept utilisé dans l’industrie et l’agroalimentaire, mais encore peu en élevage. En le mesurant, il est possible de savoir en combien de temps le capital investi est compensé par l’augmentation des résultats. Dans ce calcul, il faut aussi prendre en compte le temps que ces outils peuvent faire gagner à l’éleveur.
« De plus, les gains de retour sur investissement peuvent s’additionner sur l’exploitation ». Prenons le cas d’une ferme laitière. Cette dernière compte 130 vaches, avec une production de 9.000 litres par animal. Les agriculteurs ont décidé d’acquérir un robot de traite et un robot d’alimentation. Grâce à eux, c’est environ 970 heures de travail économisées par an, soit 50 à 60 % d’un temps plein salarié. « Puis, pour l’éleveur, il s’agit d’une astreinte très structurante en moins », souligne l’économiste. Une automatisation des tâches plus que bienvenue.
Anticiper en innovant sans une rentabilité à la clé
Le retour sur investissement peut également passer par une économie d’intrants, comme c’est le cas avec le distributeur automatique de concentrés qui permet la mise en place d’une alimentation de précision. Le tout sans oublier, évidemment, le gain au niveau de la performance de la ferme. « Il existe également des investissements peu onéreux avec des retours sur investissement très rapides et un impact important. À ce propos, on pourrait citer les détecteurs de chaleurs et de mises bas ».
Enfin, certaines technologies ne permettent pas de réaliser de réelles économies… Néanmoins, leur intérêt est réel. À ce propos, l’économiste cite les nouvelles maternités modulables pour les truies. D’abord conventionnelles, elles peuvent ensuite se transformer pour donner plus de liberté à la femelle. En Belgique, nous vous présentions d’ailleurs, dans l’édition du 9 octobre, Johan De Wilde, à Jodoigne, dont le choix s’était porté sur ce matériel pour son nouveau bâtiment.
Évidemment, mettre en place ces cages engendre un coût, tandis qu’il n’y a pas vraiment de profit financier direct à en tirer. Cependant, les éleveurs porcins en sont majoritairement convaincus. Avec elles, ils anticipent l’arrivée de nouvelles normes et font un pas de plus vers davantage de bien-être animal.
Des clôtures virtuelles aux robots pour poulets…
En France, 20 % des éleveurs de bovins laitiers interrogés lors d’une enquête envisagent de s’équiper d’un robot d’alimentation. Et pas de jaloux… des robots, il y en a un peu partout !
Il y a également les drones capables d’aider à surveiller les bovins, sans obliger le propriétaire à se rendre dans les prairies. Des prés bientôt sans fil ? Cela se pourrait avec la clôture virtuelle. « C’est typiquement le genre d’innovation sur laquelle nous portons notre attention et que nous promouvons au Crédit agricole », souligne Béatrice Eon de Chezelles. Pour ce dispositif, l’animal porte un collier équipé d’un capteur GPS. S’il sort de la limite, il reçoit un léger choc électrique. Cette technologie a d’ores et déjà fait ses preuves. Attention cependant puisqu’elle n’est pas adaptée aux zones où la prédation est présente. Un loup, par exemple, ne sera pas arrêté par ce type d’équipement.
Quant à l’intelligence artificielle, elle peut assister l’agriculteur par exemple en surveillant la pousse de l’herbe ou en lui proposant des conseils agronomiques personnalisés. Néanmoins, l’IA a ses limites… Pour être performante, elle doit être nourrie par de nombreuses données, ce qui demande aussi du temps. Ainsi, pour elle comme pour tout autre investissement, mieux vaut bien réfléchir avant de se lancer dans une technologie parfois séduisante sur le papier, mais peut-être peu ou pas encore adaptée au terrain.






