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WalDigiFarm: pour valoriser et favoriser l’usage du numérique dans le secteur agricole wallon

Le secteur agricole wallon se prend en main et fédère différents acteurs majeurs de terrain. Son objectif ? Lever les freins du numérique, qui représente pour lui un outil incontestable pour le mener vers plus de durabilité, tant d’un point de vue économique, que social et environnemental. Pour ce faire, l’ASBL WalDigiFarm voit le jour et lance ses activités : formation, vulgarisation, think tank… L’ASBL souhaite regrouper des acteurs majeurs de la filière agricole wallonne et du monde numérique avec pour ambition de lever les freins de l’utilisation réelle du numérique en agriculture. WalDigiFarm est une initiative unique en Wallonie, et entend également collaborer avec ses équivalents nés dans les pays voisins.

Temps de lecture : 7 min

L’agriculture est un des secteurs prioritaires pour les projets de transformation numérique menés par Digital Wallonia. Parmi les diverses actions entreprises par l’Agence du Numérique, un partenariat a notamment été établi avec la Foire de Libramont pour y organiser depuis 2017 un Espace Smart Farming au cœur de la Foire. Aujourd’hui, c’est au travers du projet WalDigiFarm, issu et porté par le secteur agricole lui-même, que Digital Wallonia entend poursuivre son travail de transformation numérique de l’agriculture.

D’après l’étude CBC sur la « Transition numérique et durable du monde agricole » publiée en 2019, 63 % des agriculteurs wallons sont connectés et ce chiffre monte à 80 % si on ne considère que les producteurs de moins de 45 ans. Parmi ceux-ci, 47 % utilisent des outils connectés sur le terrain comme le GPS (89 %), les pluviomètres (26 %), les capteurs (19 %) ou les robots de traite ou de désherbage (7 %).

La transformation numérique est une lame de fond qui touche tous les secteurs, en ce compris l’agriculture. Couplée au renouvellement des générations, on peut s’attendre à ce que 100 % des acteurs du monde agricole wallon soient connectés à moyen terme, ce qui pose de multiples questions, constitue des réels défis mais crée également de nombreuses opportunités, entre autres pour le développement économique de la région et la protection de l’environnement. La réussite de cette transformation n’est cependant possible que si les acteurs concernés en comprennent les enjeux, s’en saisissent et deviennent les moteurs de leur propre avenir numérique.

Un projet né de plusieurs constats

Le projet WalDigiFarm est né d’une discussion en juillet 2018 entre développeurs et utilisateurs de solutions d’agriculture connectée. Ils se sont rapidement rendu compte que les freins qu’ils rencontraient personnellement dans l’adoption de ces techniques de « Smart Farming » étaient unanimement partagés. Ces constats ont été corroborés au cours du dernier trimestre 2018 lors d’entretiens personnalisés avec une vingtaine d’autres acteurs du secteur (agriculteurs, entrepreneurs…). La réflexion s’est poursuivie en 2019 pour s’enrichir des contributions de presque 80 autres acteurs des secteurs agricole et numérique et ce, tous métiers confondus.

Parmi les constats, on peut notamment relever :

–  Un défaut criant d’interopérabilité des systèmes informatiques à disposition des agriculteurs. Par exemple, les mêmes informations techniques d’une culture en Wallonie (localisation de la parcelle, surface, type de sol, date de semis, etc.) peuvent être reprises à ce jour dans trente plateformes informatiques différentes qui ne communiquent pas entre elles, auxquelles il faut rajouter au moins une trentaine d’applications qui contiennent aussi des informations géoréférencées – ou géoréférençables (stations météos, OAD…) tout aussi déconnectées les unes des autres. Un agriculteur wallon qui souhaite bénéficier de tous les outils d’aide à la décision proposés par ces plateformes doit encoder plusieurs dizaines de fois les mêmes données, ce qu’il ne fait logiquement pas. Cela constitue en conséquence une des raisons de la sous-utilisation de ces outils.

–  Le manque d’information quant au réel retour sur investissement de ces solutions, que cela soit au niveau financier ou en gain de temps de travail, et qui fait hésiter de nombreux acteurs à s’équiper de systèmes généralement onéreux.

– L’absence de réponse à de très nombreuses questions liées aux données générées / collectées par ces applications, en termes de propriété / sécurité / risque de mésusage.

– La faible intuitivité de certains de ces outils « agronomiques » en comparaison avec d’autres outils informatiques de la vie courante, qui implique des prises en main chronophages peu compatibles avec le temps disponible pour les agriculteurs en période de pointe.

–  L’écart qui peut exister entre le monde agricole et celui de l’IT, qui peut conduire au développement d’applications sans grand intérêt pour les producteurs, alors que nombreuses de leurs préoccupations pourraient être solutionnées par le numérique.

Ces acteurs en ont déduit l’intérêt de s’associer en fondant une association mixte d’acteurs du secteur agricole et du secteur numérique en Wallonie, avec l’idée de co-construire une vision qu’ils jugent idéale de l’écosystème agro numérique wallon (en débutant par le secteur des grandes cultures), et en invitant toutes les personnes partageant cette vision à se joindre au mouvement et à travailler dans la même direction, chacun avec ses propres moyens.

L’association WalDigiFarm

Pour donner un cadre à la réflexion, l’ASBL WalDigiFarm a été fondée en janvier 2019 avec le soutien de Digital Wallonia.

Le premier Conseil d’Administration compte une dizaine de personnes issues de la filière agricole wallonne (dont la moitié d’agriculteurs) et du monde de l’IT. La Présidence est assurée par Stéphan Henry (Ferme de Mehaignoul), la Vice-Présidence par Renato Primavera (start-up Quadratic et Optagri spécialisées en géomatique pour les applications agricoles), la trésorière est Caroline Devillers (Ferme du Plein Air) et l’Administrateur délégué est Sébastien Weykmans (Project Manager dans le secteur du biocontrôle).

L’association est ouverte à toute personne physique ou morale intéressée par le secteur agro-numérique, et qui s’engage à œuvrer pour son but social, à en respecter les statuts et les valeurs : Neutralité-Coopération- Pragmatisme-Proactivité-Création de Valeur.

Le montant de la cotisation (variant de 40 à 800 euros par an) a été fixé pour permettre à tout acteur d’adhérer au mouvement, qu’il soit agriculteur, start-up ou grande entreprise. L’objectif est de compter au moins 160 agriculteurs et 30 sociétés membres d’ici 2022. Les premières propositions d’affiliation ont été envoyées en octobre 2019 et l’association compte déjà à ce jour une quarantaine de membres tous secteurs confondus.

Le projet

En parallèle à sa fondation, l’ASBL a déposé une proposition de projet à la Direction des Réseaux d’Entreprises du Service public de Wallonie. Le projet, défini pour une durée de 3 ans, a pour objectif majeur de valoriser et favoriser l’usage du numérique dans le secteur agricole wallon, au travers des axes stratégiques suivants :

–  Stimuler et renforcer l’usage du numérique par l’organisation de formations et le partage d’expérience. Une thématique sera traitée de façon approfondie chaque année. La première thématique choisie est celle de la modulation intra-parcellaire des intrants en grandes cultures (ajustement des doses aux besoins réels des cultures mesurés par différents types de capteurs embarqués, dans l’optique de réduire les volumes utilisés), qui sera abordée au travers de différentes activités.

–  Jouer le rôle de think tank (laboratoire d’idées) pour la transition numérique du secteur agricole wallon. Le projet propose de réunir à intervalles réguliers l’ensemble des parties prenantes (secteur privé et public) d’une thématique concrète et des experts, avec comme objectif de réfléchir aux enjeux liés à la transition numérique agricole en Wallonie ; de proposer des recommandations imaginatives et pratiques ; de plaidoyer vers les décideurs et acteurs du secteur. Parmi les différentes thématiques qui ont déjà été relevées, on peut citer : tous les enjeux liés à la collecte, à la souveraineté et à la valorisation des données agricoles, à l’accès en open-data des données agricoles publiques ; le cadre réglementaire qui sera nécessaire pour le développement des opérations robotisées en extérieur ; les inéluctables questions éthiques liées à l’intelligence artificielle qui se poseront en agriculture comme c’est déjà le cas pour toute une série d’autres domaines.

–  Co-concevoir les futurs outils numériques nécessaires pour les métiers du secteur, en privilégiant l’interopérabilité des systèmes informatiques préexistants. Les développements technologiques récents ouvrent la voie à l’échange d’informations entre différents systèmes informatiques qui fonctionnaient jusqu’à présent « en silos ». Cette tendance très nette a encore pu être constatée lors du salon Agritechnica 2019 (salon leader mondial du machinisme agricole à Hanovre). Le projet ambitionne d’étudier à l’aide d’experts l’interopérabilité des systèmes informatiques des acteurs sur le territoire wallon qui souhaitent s’inscrire dans cette optique.

Déterminer les structures les plus adéquates pour gérer équitablement ces outils d’échange de données agricoles. L’objectif final du projet serait de constituer une société autonome d’échange de données entre acteurs du monde agricole wallon, dont les actionnaires seraient les producteurs de données (agriculteurs, mais aussi propriétaires de réseaux de stations météos, etc.). L’étude du business model est actuellement réalisée en collaboration avec le centre d’innovation et de développement d’entreprises EKLO (anciennement CIDE-SOCRAN), tout en sachant que les aspects juridiques et sociologiques seront également étudiés en détail par des experts.

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