Accueil Bovins

Diminuer son cheptel laitier pour gagner en stabilité

Réduire la pénibilité du travail en élevage peut passer par bien diverses formes: raisonner les investissements, la taille du cheptel, déléguer les travaux agricoles, privilégier le pâturages... Vincent Schyns, un éleveur de Bilstain, est de ceux qui ont pris le parti d’adapter leur exploitation à la main d’œuvre et aux terrains disponibles. Retour sur quelques réflexions qui lui ont permis de gagner en autonomie et en qualité de travail.

Temps de lecture : 7 min

Si la famille Schyns s’échine à produire du lait au pâturage depuis le milieu des années 50, Vincent est arrivé sur l’exploitation en tant qu’aidant en 1999 pour s’associer à son père en 2002. À ce moment l’exploitation dispose de 65 vaches sur 45 ha de prairies et produit près de 400.000 l à l’année. Depuis Vincent et son père n’ont eu de cesse de valoriser leurs herbages, de jour comme de nuit, tout en rationalisant leurs coûts.

Et si l’exploitation dispose d’une des premières stabulations libres (construite en 1973), en 2009, la structure sature au vu de la surcharge en bétail. Son père et lui investissent donc dans un nouveau bâtiment qui vient jouxter le premier. « Le gabarit des vaches a énormément évolué depuis les années 70. Les logettes étaient trop petites, tout comme le couloir d’alimentation. Ce dernier, de 3m, ne permettait que de donner le maïs à la distributrice. Il fallait ensuite affourager en herbe manuellement », explique Vincent. « En outre, nous devions également mettre nos citernes aux normes… »

Davantage de confort pour les bêtes

Au moment de penser son bâtiment, Vincent vise le confort de ses bêtes et construit un bâtiment en bois de 35m x 19m avec 63 logettes. La largeur des couloirs est de 3.75m, celle des logettes, 2.75m. Devant celles-ci, se trouve également un réservoir à sciure que Vincent remplit deux fois l’année. « Cela m’évite de devoir en transporter chaque semaine… je n’ai donc plus qu’à la répandre sur les logettes à l’aide d’une raclette. »

Mais pour l’éleveur, construire cette structure est une belle opportunité de repenser un couloir d’alimentation qui doit lui permettre d’affourager son cheptel pour deux jours.

Viser la qualité des fourrages !

« On avait peur de perdre en rendement en désilant 48h à l’avance, mais l’expérience nous a montré que ceux-ci sont relativement bons. Je ne le fais pas systématiquement mais ça permet de diminuer la charge de travail quand je suis seul sur l’exploitation. »

Il faut surtout que les silos soient de bonne qualité, c’est important pour l’appétence du bétail. « On peut bien évidemment courir après le top du top mais à quel coût ? Pour moi, les robots d’affouragements sont des investissements qui, pour une structure comme la mienne, n’en valent pas la chandelle. »

Et les bienfaits d’une nouvelle structure se sont rapidement fait sentir. « Mes vaches de réformes sont mieux valorisées. Un confort optimal permet une meilleure ingestion des fourrages.

Quant à l’ancienne étable, elle a été réaménagée pour accueillir le jeune bétail. « J’ai réalisé un couloir d’attente pour la salle de traite, et adapté 11 logettes aux dimensions actuelles. Car jusqu’il y a peu je trayais encore 80 bêtes. »

Garder la salle de traite fonctionnelle

Même si 2009 n’était pas la meilleure année pour réaliser ce genre d’investissement, la famille Schyns a été très raisonnable au niveau des coûts, et notamment au niveau de la salle de traite qu’ils ont gardée dans l’ancien bâtiment. « Si elle avait été construite dans la nouvelle structure, il aurait fallu penser une étable plus grande. On a calculé au plus juste et récupéré de l’espace dans l’ancienne étable… », explique l’éleveur.

D’autant que quand on entre dans la salle de traite, on note que les tubulaires de la structure sont d’origines. Les vérins datent des années 90, tout comme les distributeurs de commande… La salle de traite était initialement une 2x4 Swing Over en ligne basse, avec un décrochage automatique installé en 1990 (et rénové en 2016). Ce n’est qu’en 2005, que la structure est agrandie en une 2x7. Et pour ce faire, Vincent y a été pas après pas. « Je n’ai pas réalisé d’investissement massif. Je n’ai investi que le minimum pour maintenir la salle de traite fonctionnelle. »

« Économiquement, remplir une étable juste pour la remplir n’est pas toujours un bon calcul. Il faut davantage de terres, s’ensuit une surcharge de travail pour finalement tomber dans un cercle vicieux », estime Vincent. C’est pourquoi, très attaché à son pâturage, il a fait le choix de s’orienter vers l’autonomie fourragère. Un choix d’autant plus évident que son taux de liaison au sol a toujours été inférieur à 1.

« Je pense que toute ferme, dans la mesure du possible doit adapter sa ferme en fonction de la disponibilité des terrains et de la main-d’œuvre. En sachant que mon épouse travaille à l’extérieur et que mon père, pensionné, me donne un coup de main, je m’attends à être un jour seul. En ayant la chance d’avoir une bonne superficie pâturable et proche de l’exploitation, la réflexion s’est orientée naturellement vers le bio. Ce n’est pas un choix évident mais dans mon cas c’était envisageable. »

Réduire son cheptel plutôt que l’agrandir

« Il y a encore un an, avant la conversion, j’élevais 80 productrices pour livrer 580.000 litres par an à la laiterie. J’ai ensuite diminué graduellement le troupeau pour atteindre aujourd’hui 70 vaches. Je préfère bien soigner mes laitières qu’en avoir trop ! » Un choix également dicté par la volonté de gagner en autonomie et en qualité de travail. »

« Sur le moyen terme, je pense gagner en stabilité. Je ne serai pas plus riche en passant en bio mais j’espère éviter les grosses crises… »

S’il a craint de voir sa production dégringoler, Vincent a fait le choix de nourrir ses productrices aux tourteaux qui sont très chers. « Ma production est restée stable. Avec un bon hiver, et une bonne première coupe, j’ai pu livrer 500.000 litres de lait en gardant la même quantité de concentrés par vache.

« Il me reste deux ans pour écouler le stock de fourrages conventionnels de l’exploitation. La conversion est tellement dure que j’essaie de garder tous les atouts pour moi. Mais pour le moment, je souffre plus du temps sec que du passage au bio. Sa production risque donc de ne pas se maintenir au vu de la période sèche qui annonce et de la faible récolte de fourrage. »

Vers des animaux moins anguleux

La famille Schyns a toujours trait de la pie noire holstein mais depuis peu l’éleveur s’interroge quant à l’orientation choisir. « On insémine majoritairement du noir, mais je reste vigilant à ne pas avoir des bêtes au caractère laitier trop pointu. Je me suis essayé au croisement Montbéliard également… Je pense mettre des taureaux plus rustiques sur les laitières, afin qu’elles ne soient pas trop anguleuses. Je prête attention à la profondeur de corps, aux taux et depuis peu à la bêta caséine (l’indice de digestibilité du lait). Je me suis lancé dans le bio pour la différenciation, à voir comment je peux ensuite le valoriser. »

Quant au jeune bétail, l’agriculteur ne garde les veaux que pour les élever. Il est donc en général assez bas au niveau du jeune bétail par vache. Quelque 30 à 40 % des inséminations qu’il réalise sont en Blanc-bleu pour valoriser au maximum les veaux de boucherie. Les doses sexées vont généralement aux génisses. « Si j’ai une période avec beaucoup de génisses, je n’hésite pas à en vendre pour l’élevage. Au total, je n’ai que 45 vaches pour le renouvellement et en moyenne j’arrive à 4 lactations par vache… »

Déléguer à l’entreprise

Si Vincent a une formation en mécanique bien utile dans son quotidien d’éleveur, il n’est pas féru de grosses mécaniques pour autant ! Raison pour laquelle les travaux tels que la fauche, le ramassage des récoltes et l’épandage de lisier sont délégués à une entreprise agricole.

« Pour le lisier, avec la conversion bio, on n’a pas le droit à l’erreur. Cela nous permet d’éviter les pertes d’azote ammoniacal. D’autant qu’en ayant les prairies à proximité, on est clairement gagnant à se faire aider. ça ne me revient pas à plus d’1 €/m³.

Quant au matériel disponible sur l’exploitation, il a été acheté d’occasion. Le parc n’est pas tout jeune mais il est bien entretenu. « Cela nous évite de faire la course à l’investissement », conclut l’éleveur.

A lire aussi en Bovins

Besnoitiose : le dépistage devient obligatoire !

Bovins Dernièrement, un arrêté ministériel relatif aux mesures d'urgence à appliquer afin de prévenir l'apparition de la besnoitiose bovine en Belgique a été publié. Parallèlement, l’arrêté royal concernant les «vices rédhibitoires» a été adapté pour inclure cette maladie.
Voir plus d'articles