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Halte aux produits

ultra-transformés !

La semaine passée, Nathalie Verschueren, nutrithérapeute, entretenait les dames de l’Union des Agricultrices Wallonnes (UAW) de la province de Liège au sujet de l’impact de notre alimentation, et plus particulièrement la consommation d’aliments ultra-transformés, sur notre santé.

Temps de lecture : 5 min

Le boulot de Nathalie Verschueren c’est de comprendre et expliquer en quoi des carences ou des excès alimentaires peuvent avoir un impact sur l’être, – et plus particulièrement les processus biologiques (biochimique, génétique, immunologie…) du corps humain –, et le devenir de notre santé. Grâce à des conseils alimentaires ou d’hygiène de vie, elle aide ses patients à retrouver un équilibre ou se prémunir d’éventuels problèmes de santé. L’un de ses conseils phares est : Halte aux produits ultra-transformés !

Nutrition et santé, un constat alarmant

Les maladies liées au mode de vie sont en recrudescence, entre l’excès d’alcool, le tabac, le stress, le manque d’activités physiques, les déséquilibres alimentaires… nous avons l’embarras du choix. « Les enfants ne bougent plus et s’alimentent mal. En 40 ans, les cas d’obésité chez l’enfant et l’adolescent ont été multipliés par 10. En 1975, le monde comptait 11 millions d’enfants et adolescents obèses. En 2016, ils étaient 124 millions, 213 millions étaient également considérés en surpoids. Les projections pour 2030 prévoient 1 adulte sur 2 en surpoids ou obèse et 1 enfant sur 6. »

Au niveau mondial, le diabète est également en explosion. « En 1980, le monde comptait 108 millions de diabétiques ; en 2017, ils étaient 451 millions et on recensait 5 millions de décès liés au diabète ou aux maladies en découlant. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, le diabète sera la septième cause de décès en 2030. »

Le cancer, peut aussi être lié à l’alimentation. « On recense 180 nouveaux cas de cancer par jour en Belgique. 5 à 10 % des cancers ont une origine génétique, le reste, c’est-à-dire 90 %, est lié à l’environnement : le tabac, l’obésité, les infections, le stress, la pollution, l’alcool… mais aussi le régime alimentaire qui est à la base de 30 à 35 % des cancers. Ce qui est vraiment triste c’est que nous travaillons sur le traitement alors qu’on pourrait travailler davantage sur la prévention, en revenant à une alimentation de base ».

Les coupables: les produits ultra-transformés

En 2030, l’obésité, les maladies cardio-vasculaires, le diabète, les maladies respiratoires chroniques et les cancers seront responsables de 70 % des décès et 56 % des maladies dans le monde.

Pour Nathalie Verschueren, les principaux coupables de ces maladies chroniques sont les produits ultra-transformés et la transition nutritionnelle que nous avons connue depuis la fin de la seconde guerre mondiale. « En 70 ans, nous sommes passés d’une alimentation traditionnelle monotone (viande, légumes, féculents), riche en aliments peu raffinés et peu transformés, à une alimentation plus diversifiée mais riche en aliments d’origine animale, en aliments très calorifiques, transformés, raffinés, recombinés, enrichis en sucres, sel et matières grasses et souvent pauvres en composés protecteurs ».

Qu’est-ce qu’un produit ultra-transformé ?

Un aliment ultra-transformé est un fractionnement excessif des aliments naturels et la combinaison d’ingrédients à l’infini. « Des aliments d’ailleurs souvent identifiés par des chiffres et des numéros que l’on ne connaît pas. Le blé peut par exemple être décomposé en farine blanche, germe, son, gluten, amidon de blé, amidon modifié, sirop de glucose, dextrose… Ces petits éléments ont ensuite la possibilité d’être recombinés, entre-eux et/ou avec d’autres aux noms obscurs, pour refaire du pain qui va conserver des mois. Hallucinant ! Aujourd’hui, beaucoup de personnes ne savent plus cuisiner. Le niveau d’éducation nutritionnelle de la population est tellement faible qu’elle n’est même pas consciente que ce qu’elle avale est mauvais pour la santé. C’est cette ignorance qui mène à faire de mauvais choix. », explique Nathalie Verschueren.

Elle pointe du doigt le marketing et les pubs à outrance : « Les industriels paient des fortunes pour de publicités qui fonctionnent très bien. Prenons l’exemple des biscuits petit-déjeuner : des grandes et surtout fausses promesses d’enrichissement. Il ne s’agit que d’arguments commerciaux. Certaines marques ont été punies pour leur publicité mensongère mais elles utilisent toujours l’argument sur leurs produits dérivés. On travaille sur le visuel, sur les petits cadeaux… et ça marche ! Je dis souvent à mes enfants : « S’il y a un beau bonhomme et un cadeau, on n’achète pas ! » ».

Nous sommes ce que nous mangeons

Ces 100 dernières années, nous avons ajouté 40 à 50 ans à notre durée de vie. Cette évolution est due à une meilleure hygiène(eau potable et assainissement), à la disponibilité en nourriture, aux meilleures conditions de vie (chauffage), à l’évolution de la science (contrôle des maladies contagieuses, antibiotiques) mais aussi à la diminution de notre alimentation. « Nous travaillons beaucoup moins à l’extérieur qu’il y a quelques décennies, nous avons donc besoin de moins d’apports et cela nous fait gagner quelques années. Le corps humain, c’est comme un feu ouvert, il fonctionne comme on l’alimente. Si on charge du bon bois, il produit de l’énergie et de chaleur mais plus il y a de bois, plus il y a aussi de cendres et de déchets, et on vieillit plus vite », dit la nutrithérapeute. Elle ajoute : « Malheureusement, nos enfants vivront peut-être moins longtemps car, leurs apports sont sans doute moindres mais, ils ont perdu les éléments de base : se mouvoir et une alimentation saine. »

« Tout cela est logique, nous sommes ce que nous mangeons. Les aliments que nous consommons sont la seule source d’énergie de notre corps mais nous mangeons toujours ce dont nous avons envie et rarement ce dont nous avons besoin. Ce qu’on ingère, c’est ce qu’on dégage. Après, ce n’est vraiment pas évident car nous sommes bombardés de fausses informations. Il y a beaucoup trop de méconnaissance. Les gens sont totalement perdus dans cette masse d’informations, de désinformations et de buzz. Le consommateur ne sait plus quoi faire. »

Néanmoins, notre cause n’est pas perdue. « On ne peut pas tout contrôler mais, on peut choisir ce qu’on met dans son assiette. On peut simplement commencer par privilégier les producteurs locaux, favoriser les circuits courts et cuisiner des produits frais toute l’année au rythme des saisons. Manger sainement, c’est manger vrai, de la vraie nourriture, des aliments naturels, peu transformés. Il faut donner la priorité aux aliments avec des listes d’ingrédients connus, courtes et faciles à lire », conclut-elle.

Propos recueillis

par D. Jaunard

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