La salers, un complément

au travail en forêt

À respectivement 63 et 61 ans, Henri Lemaire et Marianne Thomas, sont toujours actifs. Si Henri vagabonde toujours en forêt et si Marianne s’occupe des 3 gîtes de vacances, voilà 10 ans que leurs salers font partie de leurs occupations. Elles leur ont permis de faire disparaître le stress quotidien de la traite, que ce soit du point de vue de l’horaire de traite, ou de la qualité du lait. Après 42 années de dur labeur si le nombre de vaches n’a pas augmenté, ils ont clairement gagné en qualité de vie.

La traite et les bois

C’est à leur mariage en 1977, qu’Henri et son épouse reprennent la moitié de l’exploitation familiale qui comptait 36 laitières ! « C’est un peu juste pour deux ménages », sourit-il. Après avoir travaillé le temps d’une saison chez un marchand de grain, Henri décide de suivre les traces de son père en forêt. « Il était garde forestier particulier. Mon épouse et moi avons donc commencé les travaux dans les bois. »

Ce n’est qu’en 1990 que le couple reprend l’intégralité de la ferme, soit une cinquantaine de laitières et leur suite. Il partage donc son temps entre ferme et forêt. Le travail dans les bois étant énergivore, l’exploitation sera un peu négligée. Ils sont à cette époque à une moyenne de 5.000 l/vache avec un bétail moyen et des croisements viandeux qui permettent d’écouler les veaux à un meilleur prix.

Henri et son épouse diversifieront leur activité en ouvrant des gîtes de vacances. Le premier en 1993, le second en 2006, le troisième en 2019. Une période durant laquelle Henri remplace son père à plein temps en temps que garde forestier, tandis que son épouse s’occupe de la gestion des gîtes et de la ferme. Trois ans plus tard, survient la crise du lait. À cette époque, le travail ne manque pas, et c’est la course pour la traite d’autant qu’aucun de leurs trois enfants ne travaille à l’extérieur.

Salers et bio

Ils décident donc de se réorienter. Ayant entendu parler de différentes races françaises, Henri s’informe et se rend à Basse Bodeux, chez Marc et Michèle Lacasse qui sont passés récemment en salers. Le couple Lemaire emprunte le même chemin. « Il nous fallait des vaches calmes que l’on pouvait attacher. Le couple Lemaire acquiert donc 35 mères salers et un taureau charolais. Le changement de troupeau nécessite une période de transition. C’est aussi le passage à une agriculture biologique, et à une plus faible charge à l’hectare.

Pour les nourrir, rien de plus simple : « uniquement foin ou ensilage d’herbe, un peu de grain pour les rentrer, ou à une autre occasion, par exemple le jour de noël », sourit-il encore.

Après avoir passé 5 hivers dans une étable entravée, le couple décide de construire une nouvelle stabulation sur caillebottis et paille.

Un investissement tardif

« Pourquoi construire une nouvelle étable à presque 60 ans ? Parce que nous avons toujours travaillé et que nous espérons encore le faire tant que l’on pourra. Ce n’est pas amusant d’être inactif », sourit-il.

Mais la raison principale, c’est le bail à ferme ! « De par mes activités de gestion en forêt, j’ai été amené à des problèmes de location de prairie, et quand un fermier vous demande 10.000 euros/ha pour libérer une pâture… on réfléchit. Étant propriétaire d’une grande partie de nos prairies, pas besoin de réfléchir longtemps. Si on tient compte en outre du bien-être du bétail, la facilité pour le triage dans le troupeau… On ne regrette absolument pas notre choix ».

Pour ce qui est de la reproduction, Henri utilise un taureau salers pour une reproduction partielle du troupeau. Pour le reste, un taureau blanc est à la saillie pour une meilleure conformation des veaux. Le vêlage est d’ailleurs plus facile qu’en croisement charolais.

Notons que si la salers est réputée calme, personne n’est à l’abri d’un accident. Marianne a subi un accident grave en avril 2018, mais le couple relativise et positive. Pour plus de sécurité, seuls les animaux nerveux sont écornés.

Si la chute du prix de la viande et les perspectives négatives des traités transatlantiques viennent assombrir l’horizon des éleveurs viandeux, Henri se veut toutefois optimiste. « Si le consommateur achetait davantage local, l’avenir des producteurs serait un peu plus rose ! »

Propos recueillis par P-Y L.

Le direct

Le direct