en Belgique. Début juillet, Fabian Collard et Charlotte Storder
ont acheté un agneau Suffolk chez un éleveur en Écosse
pour la somme de 17.000 euros ! Un fameux pari sur l’avenir
de leur exploitation, le « Suffolk Élevage de Nives ».
Du Suffolk viandeux au Suffolk de type anglais
C’est en 2012 que Fabian Collard et sa compagne Charlotte Storder achètent une ancienne ferme à Nives. Disposant d’une prairie de 70 ares avec un vieux hangar, c’est tout naturellement que Fabian retourne à sa passion de jeunesse, l’élevage de Suffolk. Lorsqu’il avait 14-15 ans, il détenait une vingtaine d’animaux chez ses grands-parents agriculteurs. À cette époque, son choix s’était déjà porté sur le Suffolk, une race qu’il apprécie pour ses lignes, son élégance, son caractère calme et sa facilité de manipulation. La première année, les éleveurs se limitent à 2 moutons, achetés chez des amis. D’autres sujets viennent rapidement étoffer les effectifs et des prairies supplémentaires sont louées à la famille. La ferme compte aujourd’hui une dizaine de hectares, 4 chevaux dont s’occupe Charlotte Storder et 120 moutons, dont une soixantaine de brebis. Les animaux acquis en Belgique sont plutôt de type viandeux. Pour passer au type anglais, plus long, plus haut, plus lourd, les jeunes sélectionneurs n’ont pas hésité à se rendre Outre-Manche, dans le berceau du Suffolk de type anglais.
Des Suffolk de qualité Outre-Manche
C’est en Angleterre, en Écosse et en Irlande que l’on trouve les meilleurs élevages de Suffolk de type anglais, explique notre hôte. La sélection y est pratiquée avec beaucoup de rigueur dans des petits élevages de 10-15 bêtes. Depuis 2016 nous en avons visité plusieurs poursuit Fabian Collard et nous avons acheté des animaux chaque année, lors de visites des exploitations ou via Internet, dans des ventes aux enchères ou directement chez des éleveurs. L’an dernier, 25 femelles ont été acquises Outre-Manche pour agrandir le troupeau et remplacer les brebis d’origine belge par des Suffolk anglais de race pure. Cinq agnelles viennent encore d’arriver d’Irlande. Des béliers anglais ont aussi été achetés pour accroître le gabarit de la descendance et améliorer la qualité du troupeau.
Achat d’un agneau exceptionnel
Une nouvelle étape vient d’être franchie en juillet dernier avec l’achat d’un agneau de 6 mois pour la coquette somme de 17.000 euros ! Cet agneau dénommé Strathbogie Wonder, provient de l’élevage écossais Strathbogie Pedigree Livestok (père Crewland King Pin et mère Strathbogie). Il était destiné à la vente aux enchères de Lanark où il aurait été vendu plus cher encore vu son pedigree remarquable, précise notre hôte.
Covid 19 oblige, les éleveurs n’ont pas pu se rendre dans l’élevage pour l’achat. C’est donc via des photos et vidéos sur Internet qu’ils ont découvert l’animal et fait son acquisition. Mais nous connaissons l’élevage et son propriétaire déclare F Collard. De plus, le milieu des sélectionneurs Suffolk écossais ou irlandais n’est pas très grand et tout le monde se connaît et connaît la réputation des éleveurs. L’achat a donc été réalisé en toute confiance.
Et ils n’ont pas été déçus à l’arrivée de l’animal : il se démarque déjà de ses congénères, notamment par sa taille et sa tête spécifique. Vu l’investissement, les éleveurs ont assuré l’agneau via un courtier français et une compagnie d’assurance anglaise car il n’existe aucun produit de ce type dans les compagnies actives en Belgique. Vu le prix de l’assurance – 1.700 euros – l’animal est assuré pour un an, le contrat étant révisable tous les ans.
Pour rentabiliser cet achat et limiter les risques, les éleveurs vont faire prélever le sperme de ce jeune bélier par un vétérinaire flamand spécialisé dans la reproduction. Une vingtaine de brebis seront directement inséminées avec du sperme frais et le reste sera congelé. Les paillettes congelées seront vendues ultérieurement, lorsque l’animal aura fait ses preuves.
Les éleveurs comptent garder ce bélier 3-4 ans ce qui devrait permettre d’améliorer la qualité de leur troupeau.
Notoriété de l’élevage
L’investissement dans cet animal d’exception vise donc à accroître le potentiel et la qualité des animaux et partant la notoriété de l’élevage. Comme l’explique Fabian, plus la qualité des animaux augmente, plus la demande augmente et plus on vend et on exporte. L’élevage a déjà acquis une certaine renommée. Cette année, ils n’ont pas eu assez d’agnelles et d’agneaux à vendre tant la demande était importante. Et du côté des antenais, 16 ont été vendus (en plus des 30 conservés pour accroître le cheptel) mais on aurait pu en vendre 25, déclare l’éleveur. Pour 2021, ils enregistrent déjà des commandes certifiées, avant même la mise des brebis aux béliers. Ces réservations sont évidemment liées au pedigree des animaux.
Facebook : un outil essentiel pour vendre à l’étranger
Les ventes se font en Belgique et à l’étranger, en Italie, Roumanie, France. Quinze bêtes sont parties en Italie au printemps dernier. Pour la vente et l’export, notre site Facebook est très important, explique l’éleveur car il permet de se faire connaître à l’étranger. On y publie de nombreuses photos des animaux. Et on a beaucoup de visites du site en Italie, Turquie, Roumanie, Espagne… déclare Charlotte ; Stoder. Pour les éleveurs de ces pays, les animaux vendus par Fabian et Charlotte sont plus abordables au niveau du prix que les animaux d’Outre-Manche. Le prix des agneaux varie entre 500 et 1.000 euros à l’élevage de Nives alors qu’ils atteignent facilement 2.000 euros, voire même plus lors des ventes aux enchères Outre Manche (voir aplat). Et le transport est plus aisé et plus court en distance et durée. En effet, les transporteurs qui livrent les animaux venant d’Angleterre, d’Écosse ou d’Irlande limitent les livraisons à la Belgique et au nord de la France. Ils ne se rendent pas plus loin pour des raisons de bien-être animal notamment. Ils livrent chez l’éleveur qui a acheté le plus grand nombre d’animaux du chargement, à charge pour les autres acquéreurs de récupérer leurs animaux dans cet élevage. Les acheteurs italiens, roumains, préfèrent donc limiter le transport des animaux en les achetant en Belgique et éviter ainsi une étape supplémentaire pour ramener des animaux d’Outre Manche, étape qui pourrait être préjudiciable à l’état de santé des animaux.
Conduite de l’élevage
Les brebis, cyclées avec des éponges, sont mises au bélier fin juillet début août. Les éleveurs possèdent 4 béliers pour les saillies. Chaque bélier est placé dans un groupe d’une quinzaine de femelles. Cette année, un groupe de 20 brebis sera inséminé avec du sperme de l’agneau acheté en juillet dernier. L’échographie des brebis est réalisée 8-10 semaines après la saillie, par un inséminateur français travaillant en Belgique. Les agnelages ont lieu fin décembre-début janvier, une période très intensive car les mises bas nécessitent une surveillance rapprochée. Le Suffolk n’est pas une race qui agnèle seule, précise notre interlocuteur. Et vu le prix des agneaux et brebis, les éleveurs suivent les animaux de très près. Lorsque les jeunes ne se présentent pas correctement, Charlotte Storder intervient pour les replacer correctement. La prolificité varie de 1,6 à 1,7 agneau/an/brebis. Les agneaux sont sevrés à 3 mois. Les éleveurs inscrivent tous les animaux de l’élevage mais ne font pas les pesées d’agneaux pour éviter une surcharge de travail et pour ne pas stresser les animaux. Fin février début mars, les potentiels acheteurs viennent repérer et réserver les agneaux et agnelles qu’ils souhaitent acquérir. Les jeunes quittent l’élevage un peu plus tard, au sevrage. Cette année, 10 agnelles et 16 agneaux ont été conservés car la demande d’antenais est importante. Les agneaux passent l’hiver dans l’élevage et sont vendus comme antenais au printemps suivant. Les antenaises sont mises au bélier à 1an et demi, pour ne pas couper leur croissance. Les brebis sont en général réformées après 4 ou 5 ans et vendues pour la reproduction. Il existe un marché pour ces « vieilles » brebis précise l’éleveur car elles sont moins chères que les antenaises, elles-mêmes moins chères que les agnelles.
Du fourrage de qualité
Les brebis et béliers sortent en prairie au printemps, rapidement rejoints par les agneaux et agnelles conservés à l’exploitation. Pour éviter les parasitoses et maintenir de bonnes performances de croissance, les agnelles ne sortent qu’en journée et passent la nuit dans la bergerie. En prairies, les éleveurs pratiquent le pâturage tournant. Les animaux sont rentrés fin novembre. Ils reçoivent du préfané et un aliment concentré. Du foin est distribué aux brebis au sevrage. Comme les moutons sont exigeants, l’éleveur fauche tôt, dès la fin mai pour produire un fourrage de qualité, court et fin. Le préfané est conservé en balles enrubannées. Les animaux sont logés dans une bergerie en béton et bois, construite en 2016. Auparavant, ils étaient logés en tunnel et dans 2 anciennes petites bergeries.
Soins et tonte des animaux
Sur le plan sanitaire, les brebis sont vermifugées 2 fois par an et les agneaux, toutes les 6 semaines. Le cheptel est vacciné contre la langue bleue. Quant à la tonte, un tondeur passe à 3 reprises dans l’exploitation. Les brebis gestantes sont tondues début décembre, environ 15 jours avant la mise bas. Les brebis sont tondues au printemps et les agneaux et agnelles en avril, un peu après les brebis.
La conduite de l’élevage et la sélection nécessitent pas mal de boulot, notamment en hiver lors des mises bas, époque où la surveillance doit être assurée nuit et jour. Aidés de leurs 2 enfants qui donnent les biberons aux agneaux, les éleveurs – qui travaillent aussi tous deux à 4/5 dans d’autres activités – s’investissent toutefois sans compter, passionnés par cette activité qu’ils comptent bien encore développer. C’est sûr, dans le milieu du mouton, on n’a pas fini d’entendre parler du « Suffolk élevage de Nives ».
Plus d’infos : Facebook : suffolk élevage de Nives.
