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Conserver les légumes

dans une chambre froide

Parmi les investissements qui se révèlent rapidement indispensables pour quiconque exerce une activité maraîchère, figure bien évidement la chambre froide qui permettra de gérer l’écoulement des productions en limitant les pertes quantitatives et qualitatives.

Temps de lecture : 6 min

Pour un maraîcher, les premiers investissements vont vers l’accès à la terre, les abris pour les cultures comme les serres par exemple, la location ou mieux l’achat de matériel d’implantation et d’entretien. L’irrigation est très urgemment nécessaire aussi. Dès la récolte des premiers légumes se pose la question de leur bonne conservation en vue de la présentation et de la vente. L’investissement dans une chambre froide sera rapidement nécessaire aussi. Si l’entreprise risque de devoir déménager rapidement pour une meilleure sécurité d’accès aux terres, la chambre froide peut être montée sur un plateau conteneur pour faciliter le transport ultérieur.

Le matériel d’occasion remis à niveau convient bien aussi, pour autant qu’il soit adaptable aux fluides frigorigènes actuels.

Quelles conditions pour quels légumes ?

En abaissant la température des légumes récoltés, nous permettons une diminution de leur respiration et de leur transpiration. Les pertes d’eau, de gaz carbonique et donc de poids sont réduites. Les maladies parasitaires éventuellement présentes se développent moins rapidement, cela n’empêche pas de pré-trier les denrées avant la mise en frigo, ne fût-ce que pour réduire le volume à stocker.

Mais le froid peut aussi nuire à la qualité de certains produits végétaux. La pectine se dégrade, entraînant le ramollissement de la tomate sous 10ºC. Sous 7ºC, des taches brunes apparaissent sur les concombres, courgettes, aubergines et poivrons avec un ramollissement. Il en est de même avec le haricot vert sous 4ºC. L’amidon de la pomme de terre s’hydrolyse en sucres sous les 6 à 7ºC et plus encore sous 4ºC. Ces espèces légumières seront stockées à des températures plus élevées.

Certains légumes dégagent naturellement de l’éthylène, comme les tomates, les melons et les aubergines, ce qui induit un jaunissement d’autres légumes, comme les choux pommés, le brocoli, le concombre, l’épinard, le poireau et le haricot vert ou une dégradation et changement de goût vers l’amertume comme pour la carotte. Notons que des fruits comme la pomme, la poire, l’abricot, la pêche, la nectarine produisent de l’éthylène en quantité élevée.

Les légumes surfertilisés en azote se conservent moins facilement que ceux produits avec une fumure équilibrée. Les légumes les plus jeunes sont aussi les plus sensibles aux pertes de poids.

Les locaux frigorifiés

Pour économiser l’énergie, l’emplacement du frigo sera choisi de préférence en exposition nord. À défaut, une avancée du toit ombrera les parois sud pour éviter l’ensoleillement direct d’été.

Les pertes de poids et de qualité seront réduites avec un refroidissement rapide des légumes. Pour l’obtenir il est très important que l’air puisse circuler librement entre les palettes et les caisses. Pour éviter le dessèchement des légumes, le plastique perforé placé sur les palettes et caisses protégera les produits végétaux de la déshydratation. Des techniques particulières permettent de pré-refroidir les denrées avant leur introduction dans le frigo. Elles font appel au refroidissement par aspiration, par l’emploi d’eau glacée, l’hydro-refroidissement ou le refroidissement par air forcé.

L’air passe par le chemin le court et offrant le moins de résistance. La manière de disposer les palettes et donc important. Les canalisations d’amenées de l’air dans le frigo permettront un brassage des masses d’air et donc de bons échanges thermiques entre l’air froid et les denrées entreposées.

L’organisation doit permettre la gestion «premier entré = premier sorti». Un pré-triage permet d’enlever les matières inertes encombrantes (terre, etc.) et surtout les produits porteurs de maladies ou ravageurs risquant de contaminer les autres denrées.

L’évaporateur aura un delta T inférieur à 5ºC pour limiter le risque de gel des denrées les plus proches et limiter les pertes d’eau par les denrées stockées (grande surface d’échanges thermiques).

Les températures et hygrométrie conseillées

Il est difficile de trouver un compromis dans le réglage de la chambre froide, à moins que la conservation ne dure que quelques jours avec ouverture et fermeture fréquente des portes (évacuation des gaz produits), comme auprès un point de vente au détail par exemple.

Chez le maraîcher, le réglage sera proche de l’optimum et les légumes seront groupés par affinités dans des zones de stockage frigorifiées différentes.

Pour limiter les pertes par déshydratation des denrées ou au contraire pour éviter leur dégradation, l’hygrométrie de l’air des locaux réfrigérés doit être contrôlée. L’aération et l’emploi d’humidificateurs permettent d’ajuster l’hygrométrie aux teneurs conseillées (voir tableau). Lors du fonctionnement du groupe de froid, l’humidité de l’air qui se condensera ou qui givrera sur l’évaporateur sera de l’eau provenant en partie de l’humidificateur, et non uniquement de l’eau perdue par les denrées entreposées.

L’atmosphère contrôlée est une technique bien utilisée en conservation de fruits en longue durée. Elle est disponible aussi pour les légumes, mais son emploi est nettement plus rare dans les fermes maraîchères de chez nous.

La sortie du frigo

À la sortie du frigo, les denrées froides pourront provoquer la condensation de l’humidité de l’air ambiant qui est à une température nettement supérieure. Cette condensation peut devenir un facteur favorisant le démarrage de certaines maladies bactériennes ou autres. Leur évolution sera d’autant plus rapide que la température est élevée. Or, ce sont précisément les conditions favorisant la condensation. Pour éviter la condensation, il faut bien ventiler les palettes du produit froid pendant plusieurs dizaines de minutes dès la sortie du frigo.

Quelques particularités

Les choux pommés seront parés partiellement avant le stockage. Il est intéressant de maintenir les deux ou trois feuilles extérieures à la pomme ; elles ne seront enlevées que lors d’un dernier parage avant la vente. Ces feuilles auront joué leur rôle de protection contre les meurtrissures.

La conservation au champ est possible pour les poireaux, les choux de Bruxelles, les carottes, les panais. Le drainage de la parcelle est la limite pour maintenir les possibilités d’accès à la parcelle et limiter les dégradations par excès d’humidité dans le sol. Les conditions de fraîcheur et surtout d’humidité l’hiver sont de sérieuses limites à ces techniques. Le poireau est un des exemples.

La conservation en locaux isolés et ventilés mais non réfrigérés est moins coûteuse que celle en frigo. Elle convient pour l’oignon, l’échalote, l’ail, la pomme de terre. La première phase de mise en entreposage s’accompagne d’une forte aération pour sécher le produit et éliminer l’eau de surface et la condensation. Elle dure quelques jours. Par la suite, la ventilation quotidienne permet l’évacuation des gaz de respiration (CO2, eau…) et sera mise en fonctionnement quand la température de l’air externe est conforme au souhait de régulation de la température de la denrée.

Idéalement, chaque légume sera stocké dans son enceinte spécifique. Mais ce n’est pas souvent possible dans les petites fermes maraîchères. Avec les légumes les plus fréquents chez nous, nous pouvons définir 5 types de réglage de la température, de l’hygrométrie (humidité relative de l’air) et de la durée de conservation de quelques légumes (tableau).

F.

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