vignerons du Brabant wallon,
et même de Belgique, est à présent clôturée : résultats de l’étude de faisabilité et plan financier ont été présentés
mi-février et une coordinatrice vient d’être engagée !
Tous ces vignobles représentent plus de 70 ha sur la province (cela augmente chaque année), avec quelques belles locomotives axées sur le bio, voire la biodynamie (Domaine W), du plus grand au plus modeste…
Pour financer ce succès, les investissements consentis sont très importants et l’amortissement se compte en dizaines d’années, ce qui implique de suivre la voie de la qualité pour produire du vin haut de gamme. Ils expliquent aussi pourquoi les vignerons wallons se sont spécialisés dans les bulles qui peuvent atteindre plus vite la rentabilité. « Le prix de revient est quasi équivalent au vin tranquille, mais le prix de vente est, lui, nettement plus élevé. Sans compter un rendement plus important à l’ha », indique Christophe Heynen, Master of Wine et patron de Gustoworld qui distribue plusieurs vins wallons.
Depuis 2018, l’Ifapme Perwez a accompagné ce développement en créant plusieurs formations à la gestion d’une entreprise viti-vinicole, d’une part, et aux techniques de viticulture, d’autre part. Plusieurs dizaines de stagiaires suivent ces formations chaque année, formations qui se donnent également à Villers-le-Bouillet et Mons désormais.
Afin de répondre à une demande croissante en termes de matériel ou de services, l’Ifapme Perwez et l’Agence de développement local, ainsi que quelques personnes qui intervenaient à titre privé, ont constitué en 2021 un groupe de travail afin d’étudier la faisabilité d’une coopérative pour proposer aux viti-viniculteurs du Brabant wallon une mutualisation des services et du matériel particulièrement onéreux, utilisés sur une durée relativement courte par les viticulteurs de la Province.
L’objectif est bien évidemment de développer une structure sur la commune de Perwez, en circuit court, réfléchie, valorisant le cadre et les acteurs locaux. Dans ce contexte, une étude préliminaire auprès de tous les vignerons de la province, avait permis de recueillir un retour positif de 12 viticulteurs, représentant ensemble près de 25 ha et 100.000 bouteilles, principalement en vin blanc et effervescent.
L’étape suivante consista dans un premier temps à confier une étude de faisabilité à un bureau indépendant belge (Nicolas Parmentier/Vinolis) spécialisé dans la création de vignobles afin d’estimer le budget nécessaire à tel projet et de calculer la cuverie nécessaire.
Ce rapport indiquant que le projet était réaliste (voir ci-après), il fut suivi d’une phase de définition plus détaillée de ce dernier tandis que le plan d’affaires a été réalisé par Benoît Haag (Winch Project). Les deux phases ont pu être menées grâce à l’implication du Gal Culturalité Hesbaye brabançonne et de la commune de Perwez qui ont obtenu une aide de la Région wallonne pour engager une personne à mi-temps à partir du 26 février, personne qui va devoir à présent aller à la rencontre des acteurs du terrain.
À noter que le bourgmestre perwézien Jordan Godfriaux entend fermement initier et soutenir l’émergence d’outils agricoles innovants pour cette filière en plein essor. La démarche est assez rare que pour être soulignée.
Pour quoi faire ?
Lors d’une réunion publique d’information à la mi-février de cette année, Nicolas Parmentier et Benoît Haag sont venus présenter le fruit de leurs réflexions devant une assemblée d’une cinquantaine de vignerons, dont certains venaient d’autres provinces.
Après un rappel du contexte par Étienne Rigo, ancien vigneron et par ailleurs échevin à Perwez, les deux hommes ont donc passé en revue les conditions pour faire sortir de terre dans l’entité un chai moderne et professionnel équipé pour produire des vins tranquilles et effervescents, d’une capacité de 3.000 hl (soit l’équivalent d’une production de 60 ha environ). Le Cellier de Perwez (c’est son nom) n’aurait pas de vignes, mais fournirait à tout viticulteur dès 0,5 ha des services de vinification de ses raisins, l’élevage (le vieillissement) du vin, le stockage ainsi que le suivi administratif et même l’accueil d’événements.
Mutualiser le processus de vinification permettrait à chacun de produire des vins effervescents même avec une petite superficie. Le chai sera dès lors équipé de grandes cuves pour les producteurs les plus grands, et d’une très grande quantité de très petites cuves pour tous ceux qui ne sont en mesure que de produire, quelques centaines de bouteilles. Sans compter que le coût de construction d’un chai est très important et difficile à amortir pour les petites exploitations de plus en plus nombreuses.
Cette entreprise prestera donc des services pour ses vignerons clients et actionnaires… Elle permet de mutualiser des outils et des moyens, de disposer d’équipements et de services de qualité mais partagés. Chaque projet aura un statut flexible et adapté. D’une capacité de 3.000 hl, il permettra de traiter 40 hl par apport par jour.
Ce volume permettra en vitesse de croisière de générer 1,7 million d’euros de recettes htva, pour un coût d’exploitation estimé à 1,5 million. Après six années, le plan financier prévoit que le résultat cumulé redevienne positif.
Un budget de l’ordre de 5 millions a été prévu pour la construction de ce chai d’un nouveau genre. Il sera financé en partie par les coopérateurs (20 à 25 sont espérés qui régleront l’équivalent de 3 euros par bouteille), en partie par les pouvoirs publics et par des emprunts bancaires. Il ne s’agira donc pas d’un financement par crowdfunding, privilégié par d’autres aujourd’hui. Le plan financier prévoit de faire repasser en positif le résultat financier après six années.
Basé sur le principe d’un coopérateur = une voix, ce modèle permettra de développer un modèle durable d’entreprise qui accorde la priorité à l’équité et à l’égalité, tout en générant des emplois et de la prospérité à long terme. Les premières vendanges des coopérateurs du Cellier sont attendues à l’automne 2026 et les premières bouteilles l’année suivante. Patience donc.
Avec qui ?
C’est tout frais, car l’information date du lundi 26 février : Laetitia Vankerkoven a été engagée par la commune de Perwez pour coordonner le projet à mi-temps pendant deux ans, et c’est plutôt une très bonne nouvelle, car son expérience sera précieuse. Après son diplôme de bioingénieur à Gembloux (spécialité protection végétale), Lætitia a décroché un diplôme d’œnologue à Montpellier (elle fait partie de l’Union des œnologues de Belgique) et travaillé dans diverses propriétés françaises dans le Rhône et à Bordeaux, avant de revenir en Belgique et de repartir rapidement dans les Hauts de France pour coordonner le projet des Cent-Trente (voir les130.com), que nous vous présenterons prochainement.
Ce projet énorme lui a donné l’occasion d’acquérir de l’expérience en tant qu’œnologue-maître de chai : « Je me suis occupée de toute la partie production », explique-t-elle. Elle poursuit : « Du dimensionnement des bâtiments, du choix des fournisseurs, des différents process, de la vinification. Nous avons ainsi transformé un grand hangar dans la Somme, entre Amiens et Saint-Quentin, à une bonne heure de la frontière belge. Ce fut super intéressant, j’ai fait trois vendanges avec eux, mais mon mari était toujours en Belgique, nous faisions la navette et j’ai fini par rentrer. J’ai aussi envie de faire partie de ce mouvement de développement des vignobles en Belgique. »
« Si cela peut paraître un peu flou pour certains qui découvrent le projet, souligne le bourgmestre, cette personne sera entourée d’experts et de coopérateurs, elle sera la locomotive des prochains mois. Nous avons réalisé un sondage après la réunion de février pour identifier ceux qui veulent monter dans le train, ils sont déjà nombreux. »
« Il est également très important de souligner, renchérit Marie Langhendries du Gal culturalité, que nous sommes aux prémices de quelque chose de nouveau en Wallonie, et plus largement en Belgique. Nous allons cristalliser, renforcer à une échelle locale toutes les compétences des vignerons de Wallonie, les expériences, les bonnes pratiques, ce qui fonctionne ou pas, et rassembler en un centre le travail actuel de recherche sur ces sujets. »
Nous avons repris contact avec Nicolas Parmentier quelques jours après la réunion, et celui-ci a souligné la volonté politique associée à celle d’experts qui ont réfléchi, il s’est également réjoui de savoir le projet sur de bons rails. « Je crois très fort qu’au-delà de l’outil de vinification, nous allons devenir un pôle d’expertise et d’expérience en Wallonie, c’est une dimension qui me motive, à aller au bout de ce projet avec autant d’expériences et de retours à partager. »
Infos : coopvitiperwez@gmail.com
