de juger les plus belles vaches
d’Europe ! »
différentes nationalités sont déjà passées sous les yeux de
Bruno Toussaint. Le temps d’un concours, ce juge de
renommée internationale scrute chaque bovin avec précision, repérant le moindre défaut comme les qualités d’une future championne. Un savoir-faire qui lui a permis de travailler dans les plus grandes expositions et de se faire un véritable nom dans le milieu. Aujourd’hui, il nous dévoile les coulisses de cette fonction, mais aussi la manière dont elle a évolué au fil du temps.
Plus de 600 animaux analysés en seulement deux jours !
Pas pour l’argent, mais une fierté
Une même ligne de conduite et une impartialité indiscutable
« Le plus compliqué, c’est lorsque l’on connaît beaucoup de gens dans le milieu. J’ai déjà eu l’opportunité de juger des vaches que j’ai préparées, voire présentées lors de concours. Parfois, je sais aussi qu’elles ont obtenu d’excellents résultats dans des compétitions prestigieuses », confie-t-il.
Objectif, il tient à garder sa ligne de conduite lorsqu’il foule le ring. À chaque jugement, il analyse tous les animaux de manière identique et accorde le même temps à chaque candidate. Lorsqu’il en a la possibilité, il prend également le soin d’expliquer le classement aux éleveurs dont les vaches terminent au-delà des cinq premières de section. Un réel travail de communication et de transparence, où il faut savoir pointer les défauts tout en valorisant les qualités des participantes.
En amont des compétitions, également, Bruno avance avec une prudence de Sioux. S’il sait que, le jour J, son jugement sera impartial, il tient à éviter toute confusion des genres. « Par exemple, si j’étais allé à Agridays (voir encadré), je savais que certains de mes clients d’Inovéo allaient y participer. Je leur ai bien précisé que je ne voulais pas voir leurs animaux avant le concours. Pour le Space, à Rennes, un mois avant, j’ai préparé des bovins pour une vente d’élite et j’ai fait attention à ne pas visiter d’élevages de la région après ce travail ».
Bref, tout est fait pour que son intégrité ne soit jamais remise en cause. Et lorsqu’on lui demande si certains ont déjà tenté de l’influencer, il rétorque du tac au tac : « Ça ne servirait à rien ! ».
Des animaux adaptésaux réalités du terrain
Nourri de ses voyages et de ses rencontres dans le quotidien des fermes, il sait quels sont les types de laitières dont les gens ne veulent plus dans leur étable. En une trentaine d’années, les Holstein ont évolué et pris une quinzaine de centimètres. Pourtant, à présent, il n’est plus question d’aller dans les extrêmes avec des bovins de grande taille. Si, à l’époque, celles qui remportaient des titres étaient des vaches « tape-à-l’œil, des top models », aujourd’hui, les juges privilégient des animaux productifs et capables de s’inscrire dans le temps. Il faut également que chaque éleveur puisse s’y identifier.
« Pour moi, une gagnante de concours est une laitière capable de faire rêver tout le monde. Solide, elle doit pouvoir se déplacer dans n’importe quel système d’élevage. Les points les plus importants sont les pieds et membres ainsi que le système mammaire, ce qui permet aux bêtes d’être aptes à bien vieillir. Par exemple, j’ai eu l’opportunité d’acheter quelques animaux en copropriété, et cette année, nous allons exposer l’une d’elles à Paris. C’est la plus vieille vache du concours. À 14 ans, elle en est à sa 11e lactation et a produit 130.000 litres de lait ! Je l’avais repérée dans le sud-ouest de la France, et elle est à présent dans un élevage de cette région ».
Vous l’avez donc compris : ce n’est pas la plus grande ni la plus grosse qui repartira avec le gros lot. À ce propos, l’une des erreurs les plus courantes est justement d’inscrire un animal parce qu’il est grand, alors que pour Bruno, une jeune vache grande et frêle, c’est rédhibitoire !
Cette race s’est également développée au niveau de la qualité de ses systèmes mammaires. « À un certain moment, on est allé trop loin avec des trayons trop courts et serrés ». Maintenant, ces pis extraordinaires doivent être adaptés à tous les types de traite, du robot à la salle, avec des trayons correctement placés.
Une bonne communication
Lors des compétitions, alors que les participants attendent avec impatience les résultats, dans la tête du juge, la concentration est au rendez-vous pour établir un classement. Il repère les bovins du top 5 ou 10, ceux classés dans le 1er, le 2e ou le 3e tiers. Parfois, il arrive que le spécialiste ait un coup de cœur… Lorsqu’une participante fait ses premiers pas sur le ring, il peut rapidement y déceler une future championne.
Ensuite, place aux explications, micro en main.
« C’est une habitude. Bien qu’il y ait toujours un petit stress lorsqu’on commence. Pour certaines expositions, je peux avoir un peu le trac. Le tout, c’est de le faire partir le plus vite possible ». Ce qui l’aide ? Garder, justement, sa ligne de conduite ou s’entraîner. « Avant un gros concours, il peut m’arriver de réaliser une classe fictive dans ma voiture et de relire du vocabulaire pour enrichir mon champ lexical ».
Et bien qu’il ait déjà parcouru des milliers de kilomètres pour assurer son rôle, certains événements continuent de le faire rêver. « En général, ce sont des juges français qui y officient, mais le Salon international de l’agriculture à Paris, cela me plairait beaucoup. Il y a aussi la Nuit de la Holstein ».
Autant de rendez-vous prestigieux pour ce passionné, toujours prêt à juger les plus belles vaches de notre continent.
