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En 2022, le maïs fourrage a pu, bien souvent, sortir son épingle du jeu malgré des conditions sèches

L’année 2022 a été exceptionnelle sur le plan météorologique et le maïs n’y échappe pas. Du semis à la récolte, en passant par les opérations de désherbage, la fécondation ou encore le remplissage des épis… les conditions sèches ont sévi tout au long de la saison. Avec pour résultats que les récoltes de maïs ensilage et grain ont débuté avec quatre semaines d’avance et ont donné des rendements corrects à décevants associés à une qualité assez variable pour les premiers, et en recul de 15 % pour les seconds.

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Pour l’année 2022, le recensement provisoire réalisé par Statbel, l’office belge de statistique, indique une surface totale en maïs, sur notre territoire, de 241.615 ha, soit une augmentation de 4,5 % par rapport à 2021. Celle-ci atteint le niveau de l’année 2014 et figure parmi les plus élevées de ces dix dernières années.

Le maïs fourrage occupe une surface de 177.306 ha tandis que 64.309 ha sont dédiés au maïs grain (tableau 1). Par rapport à 2021, il s’agit d’une diminution de 3,2 % des surfaces en maïs fourrage et d’une augmentation de 33,4 % des surfaces en maïs grain. La diminution de surface en maïs fourrage est similaire en Flandre et en Wallonie. En grain, on note une augmentation de 31,3 % en Flandre et de 45 % en Wallonie.

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Des semis faciles… en conditions sèches

Avec un mois de janvier normal et un mois de février doux et relativement humide (77 mm de précipitations à Gembloux contre 58 mm pour la normale), le mois de mars a été sensiblement plus chaud que la normale avec un manque de précipitations significatif (6 mm au lieu de 67 mm pour la normale). Avec seulement quelques pluies durant de la première semaine, avril a été aussi très sec.

Les premiers semis ont débuté vers le 15 avril dans des conditions loin d’être idéales en raison de sols secs et de températures plutôt fraîches. Ils se sont poursuivis sans entraves jusqu’au mois de mai. Au 10 mai, une large majorité des surfaces de maïs était semée.

En raison de conditions peu favorables à la croissance, il a fallu parfois attendre la mi-mai pour effectuer les coupes du ray-grass. Les semis de maïs succédant à celui-ci ont donc été réalisés tardivement dans des conditions très sèches défavorables à une bonne germination.

Une levée et un début de croissance très lent, en conditions très sèches

En raison des conditions sèches d’avril et de début mai, la germination était fort ralentie surtout dans les premières parcelles semées où le maïs a parfois mis plus d’une quinzaine de jours pour sortir de terre. Les levées étaient hétérogènes en fonction du statut hydrique du sol. C’était parfois dû aussi à une profondeur de semis plus basse en raison des conditions sèches d’avril et des prévisions d’attaques de corvidés.

Au final, le pourcentage de levée était généralement satisfaisant mais, dans certaines situations, les manques de plantules étaient parfois importants.

Après la levée, la croissance des plantes n’a pu se faire à un rythme normal et de nombreuses parcelles ont pris du retard. Ce n’est qu’à partir de début juin que le maïs a pu véritablement accélérer sa croissance grâce aux pluies de la première décade de ce mois.

Comme en 2021, il y a eu pas mal de dégâts de corvidés. Ils se sont rapidement attaqués aux premiers semis et ont continué de visiter les parcelles bien après la fin des travaux et la levée des plantules.

De nombreux agriculteurs ont utilisé des semences traitées au Korit mais celui est moins efficace que le Mesurol et est également beaucoup plus toxique pour l’utilisateur. Il n’était d’ailleurs pas rare de constater des dégâts sur des champs dont les semences étaient traitées au Korit. Un certain nombre d’agriculteurs ont parfois dû ressemer des parcelles suites à ces dégâts.

Les pucerons se sont, quant à eux, montrés discrets en 2022. La présence de prédateurs naturels ne leur a pas été favorable, de même que les pluies orageuses de début juin.

Enfin, peu de dégâts de taupins ont été recensés en 2022 suite à la sécheresse du sol. Néanmoins, quelques attaques ont été localement observées, surtout dans le sud du pays.

Un désherbage satisfaisant… mais pas toujours facile à réussir

Suite à la sécheresse du sol, peu de traitements ont été réalisés en pré-émergence et nombre de ceux-ci ont été reportés en post-émergence. La majorité des traitements de post-émergence ont été réalisés au stade 3 à 5 feuilles visibles du maïs dans des conditions sèches et chaudes de mai qui ont nui à leur efficacité ; l’action par le sol étant fortement réduite dans ces conditions.

Dans les parcelles où les traitements  herbicides ont été réalisés au bon  moment et avec la bonne combinaison  de produits, les résultats étaient  généralement satisfaisants.
Dans les parcelles où les traitements herbicides ont été réalisés au bon moment et avec la bonne combinaison de produits, les résultats étaient généralement satisfaisants. - J.V.

Dans les cas où les parcelles ont été traitées au bon moment et avec la bonne combinaison de produits, les résultats étaient généralement satisfaisants.

Pour les agriculteurs qui ont attendu les pluies de début juin pour traiter, la lutte herbicide n’a pas toujours été couronnée de succès. Il n’était pas rare de rencontrer des insuffisances contre quelques adventices qui ont pu occasionnellement concurrencer la culture.

Des floraisons en avance

À la fin juin, les maïs peu impactés par le stress hydrique avaient une avance de 5 à 7 jours environ. Tandis que pour les autres (semis tardifs, sols filtrants…), on constatait déjà des situations difficiles peu favorables à un rendement correct.

La floraison a été précoce avec une avance d’environ une dizaine de jours. Elle a débuté dans des conditions très défavorables à la fécondation (faible humidité) ; le stress hydrique s’étant parfois déjà manifesté avant la floraison dans certains champs. Les premières floraisons sont apparues vers le 10-12 juillet pour les semis précoces. Au 25 juillet, beaucoup de parcelles avaient atteint le stade floraison femelle. Dans les situations les moins favorables, ce stade a parfois été atteint sur des maïs de petites tailles.

Le développement des épis a été fortement contrarié par la sécheresse du mois d’août avec des épis plus petits, partiellement remplis ou occasionnellement absents dans certaines parcelles. Heureusement, pour de nombreuses terres, les épis ont pu atteindre un niveau de remplissage acceptable voire satisfaisant dans les cas les plus favorables.

Des récoltes très précoces en maïs fourrage…

Suite aux conditions très sèches et chaudes du mois d’août, l’évolution vers la maturité a été exceptionnellement rapide. Dans les situations les plus critiques, des parcelles de maïs n’ayant pas développé d’épis ont parfois été récoltées vers le 15 août. Généralement, les premières récoltes de maïs fourrage ont débuté vers le 20-25 août dans des conditions sèches et chaudes et avec quatre semaines d’avance par rapport aux dates habituelles.

Les premières récoltes de maïs fourrage ont débuté vers le 20-25 août dans des conditions sèches et chaudes,  avec quatre semaines d’avance par rapport aux dates habituelles.
Les premières récoltes de maïs fourrage ont débuté vers le 20-25 août dans des conditions sèches et chaudes, avec quatre semaines d’avance par rapport aux dates habituelles. - T.D.

Malgré les avertissements diffusés, cette avance a surpris pas mal d’entrepreneurs et agriculteurs. La teneur en matière sèche de la partie tiges et feuilles a rapidement augmenté alors que celle du grain évoluait beaucoup moins vite. De nombreux agriculteurs ne voulaient pas récolter un maïs fourrage avec un grain qui n’était pas à maturité et voulaient éviter la confection de silos de maïs dans des conditions très chaudes. Dans moult situations, cela a conduit à des récoltes au-delà des 40 % de matière sèche.

A la mi-septembre, pratiquement toutes les surfaces de maïs fourrage étaient récoltées.

Généralement, toutes les plantes étaient parfaitement debout lors de la récolte. La présence de charbon et de fusariose sur tiges n’était pas rare avec des contrastes bien visibles entre variétés tandis que le charbon sur épis était peu présent.

… et des rendements corrects à décevants, avec une qualité assez variable

Alors que le rendement d’autres cultures fourragères a été fortement réduit suite au stress hydrique, les rendements en maïs fourrage (tableau 2) sont très satisfaisants sur des parcelles homogènes, en ordre et généralement semées durant le mois d’avril avec à la clé des stocks fourragers très intéressants pour l’hiver. Sur les parcelles fortement impactées par la sécheresse durant la période de culture ou semée tardivement en mai, les rendements sont parfois (très) décevants avec une qualité qui n’était pas au rendez-vous.

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On constate de fortes disparités inter et intra régions. Les disparités sont aussi de mise en ce qui concerne la qualité du maïs récolté. Dans certains cas, le faible développement des épis ou la quasi absence de ceux-ci ont conduit à de faibles valeurs nutritives. Dans les parcelles où le maïs avait un bon développement, la qualité est au rendez-vous. C’est notamment le cas sur les terres où un moindre développement des tiges était conjugué avec un développement presque correct des épis.

En Basse et Moyenne Belgique, dans les essais variétaux récoltés, la teneur en amidon est un peu plus élevée qu’en 2021. Elle atteint respectivement 37,4 % et 36,8 % en moyenne pour les variétés très précoces à précoces et demi-précoces à tardives (contre 35,3 % et 34,2 % en 2021). Les valeurs VEM sont aussi supérieures à celles obtenues en 2021 avec 941 VEM pour les variétés très précoces à précoces et avec 964 VEM en moyenne pour les demi-précoces à demi-tardives (contre respectivement 924 et 910 VEM en 2021).

Dans les essais récoltés au sud du Sillon Sambre et Meuse, tous les paramètres alimentaires sont supérieurs à ceux de 2021. La teneur en amidon est de 39,7 % (contre 35,6 % en 2021), la teneur en VEM est de 964 VEM (contre 919 VEM en 2021).

Des récoltes plus précoces également en maïs grain

Avec des conditions chaudes fin août et début septembre, la dessication a débuté rapidement avec, au final, des teneurs en humidité du grain relativement faibles à la récolte. Les récoltes ont débuté vers le 20 septembre avec une avance de quatre à cinq semaines par rapport aux dates habituelles. Dans beaucoup de situations, le stade de récolte « grain humide » (34 % d’humidité) était déjà dépassé au 15 septembre.

En maïs grain, l’état sanitaire des épis était généralement très bon au moment de débuter la récolte.
En maïs grain, l’état sanitaire des épis était généralement très bon au moment de débuter la récolte. - J.V.
Comme pour le maïs fourrage, les rendements en grain obtenus en 2022 (tableau 3) sont très hétérogènes et souvent plus faibles voire décevants suite aux conditions climatiques défavorables au développement et au remplissage correct des épis. Sur des parcelles homogènes, en ordre et ayant modérément souffert du stress hydrique, les rendements en grain sont environ 15 % inférieurs à ceux obtenus habituellement.

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La majorité des parcelles ont été récoltées avec une teneur en humidité en dessous de 30 %. Sur certains sites d’essais, les teneurs en humidité du grain sont descendues jusqu’à 23 à 25 % en moyenne, certaines variétés passant parfois sous la barre des 20 % d’humidité.

Généralement, l’état sanitaire des épis était très bon à la récolte. Par contre, la fusariose des tiges était parfois observée avec des infestations plus ou moins importantes selon la variété ce qui induit de la verse et/ou du bris de tiges.

Pour les producteurs de maïs grain à sécher, des frais de séchage élevés liés à la hausse du prix du carburant étaient un inconvénient pour cette spéculation. Heureusement, les conditions chaudes ont permis au grain de progresser très rapidement vers la maturité et d’atteindre des niveaux d’humidité exceptionnellement bas. Ceci a permis de limiter fortement les frais de séchage. La hausse du prix à la tonne (300 €/t contre 250 €/t en 2021) a aussi permis de compenser en partie la baisse de rendement. Au final, cela a permis d’atteindre des niveaux de rendements financiers qui figurent parmi les meilleurs des dix dernières années.

Michaël Mary, Jurgen Depoorter, Guy Foucart

Cipf, Centre pilote maïs

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