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La directive Greenwashing enfin adoptée pour mieux protéger les consommateurs

Ce 6 mars, la première directive européenne afin de lutter contre les pratiques de greenwashing a été publiée. Celle-ci vise à « donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition verte grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et grâce à une meilleure information ». L’objectif ? Favoriser une économie circulaire, durable et respectueuse de l’environnement, en permettant de prendre des décisions d’achat en connaissance de cause.

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« Vert », « écologique », « respecte la nature », « protège l’environnement », « neutre en carbone ». Les allégations environnementales utilisées par les entreprises sont multiples et largement utilisées comme argument de marketing.

Dans une étude réalisée en 2020, la Commission européenne avait constaté que 53,3 % des 150 allégations environnementales examinées étaient vagues ou trompeuses. L’étude avait également identifié plus de 230 labels « verts » au sein de l’UE, dont les niveaux de transparence, de contrôle et de fiabilité variaient considérablement.

Grâce à la nouvelle directive adoptée en mars, le législateur européen vise à atteindre l’objectif fixé en mettant en œuvre un certain nombre d’amendements renforçant la protection des consommateurs contre les pratiques commerciales qui empêchent les achats durables en les induisant en erreur, à savoir les pratiques de greenwashing (c’est-à-dire les allégations environnementales trompeuses), les pratiques d’obsolescence précoce (à savoir les défaillances prématurées des biens) et l’utilisation d’étiquettes et d’outils d’information sur le développement durable non fiables et non transparents.

Cette loi devrait à terme être complétée par la directive green claims (voir plus loin) qui est encore en cours de négociation.

Plusieurs pratiques considérées désormais comme déloyales

La directive fixe, tout d’abord, des interdictions détaillées en ce qui concerne les allégations environnementales, en apportant des modifications à la directive 2005/29/EC relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs.

Afin de leur permettre de prendre des décisions d’achat respectueuses de l’environnement, celle-ci modifie l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2005/29, qui énumère les éléments pouvant faire l’objet de pratiques commerciales trompeuses interdites. Les « principales caractéristiques du produit » pour lesquelles les pratiques commerciales trompeuses sont illégales comprennent désormais expressément les « caractéristiques environnementales ou sociales » du produit ainsi que « ses accessoires, les aspects liés à la circularité, tels que sa durabilité, sa réparabilité ou sa recyclabilité ». Cette qualification explicite en tant que « caractéristiques principales » souligne l’importance que le législateur leur accorde dans le processus de décision des consommateurs avant l’achat d’un produit.

En outre, la liste des pratiques commerciales spécifiques visées à l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2005/29, considérées comme trompeuses, est élargie. La pratique commerciale qualifiée comme telle consiste à formuler « une allégation environnementale relative aux performances environnementales futures sans engagements clairs, objectifs, accessibles au public et vérifiables inscrits dans un plan de mise en œuvre détaillé et réaliste qui inclut des objectifs mesurables et assortis d’échéances (…), et qui est régulièrement vérifié par un tiers expert indépendant, dont les conclusions sont mises à la disposition des consommateurs ».

De nouvelles interdictions concernant les pratiques commerciales

Enfin, la liste des pratiques commerciales qui doivent être considérées comme déloyales en toutes circonstances (appelée « liste noire ») est étendue à sept pratiques d’obsolescence précoce et à quatre pratiques de greenwashing. Cette extension comprend notamment les interdictions suivantes :

– Afficher un label de développement durable qui n’est pas fondé sur un système de certification ou qui n’a pas été mis en place par des autorités publiques.

– Présenter une allégation environnementale générique au sujet de laquelle le professionnel n’est pas en mesure de démontrer l’excellente performance environnementale reconnue en rapport avec l’allégation.

– Présenter une allégation environnementale concernant l’ensemble du produit ou de l’entreprise du professionnel, alors qu’elle ne concerne qu’un des aspects du produit ou qu’une activité spécifique de cette entreprise.

– Affirmer, sur la base de la compensation des émissions de gaz à effet de serre, qu’un produit a un impact neutre, réduit ou positif sur l’environnement concernant ces émissions. Cette interdiction, en particulier, a suscité beaucoup de discussions. Elle n’interdit pas l’utilisation de systèmes de compensation des émissions de carbone, ni même la publicité pour ceux-ci. Mais on ne peut plus affirmer que les compensations de carbone auraient un impact neutre, réduit ou même positif sur l’environnement et donner ainsi l’impression que l’impact environnemental d’un produit ou d’un service serait neutralisé par cette compensation.

Modifications pour les droits des consommateurs

Plusieurs modifications sont également apportées à la directive 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs. Ainsi, des informations spécifiques sur la durabilité et la réparabilité d’un produit, parfois très contraignantes et difficiles à mettre en œuvre, sont exigées de la part de l’entreprise pour tous les types de biens avant la conclusion du contrat. Parmi celles-ci, on peut notamment citer :

– Les informations sur l’existence et sur la durée de la garantie commerciale de durabilité accordée par le producteur.

– L’existence et la durée de la période pendant laquelle le producteur s’engage à fournir des mises à jour pour les biens comportant des éléments numériques.

– L’indice de réparabilité du bien ; des exigences harmonisées seront mises en place à cet égard au niveau de l’UE. À défaut d’existence d’un tel indice, d’autres informations de réparation, telles que la disponibilité de pièces de rechange ou d’un manuel de réparation devront être fournies.

Quel mpact pour les entreprises ?

Les modifications apportées à la directive (CE) 2005/29 auront un impact significatif sur les allégations environnementales utilisées par les entreprises. L'allégation publicitaire fréquente relative à la neutralité carbone sera ainsi considérée comme déloyale, quelles que soient les circonstances spécifiques de l'affaire, si la neutralité carbone est obtenue par la compensation carbone. Les déclarations environnementales liées à des engagements futurs ne seront possibles qu’à des conditions particulièrement strictes.

Liens avec le projet de directive green claims

Ces exigences seront par ailleurs encore renforcées en cas d’adoption du projet de directive green claims. Celle-ci vise à lutter contre le greenwashing en fixant des critères minimaux que les entreprises utilisant des allégations sur les avantages et les performances environnementales de leurs produits ou services doivent respecter. Ceux-ci concerne également les systèmes d'étiquetage environnemental. Toute allégation environnementale de ce type devra être justifiée conformément à un ensemble minimal de critères définis dans la directive et devra être vérifiée de manière indépendante par un vérificateur accrédité.

La directive en projet vise à réglementer la manière dont les allégations environnementales sont justifiées et communiquées, ainsi qu'à contrôler la prolifération des labels environnementaux, afin que les consommateurs disposent d'informations environnementales fiables, comparables et vérifiables.

Adopter ces mesures à partir de septembre 2026

Les États membres sont désormais tenus de transposer la directive greenwashing en droit national avant le 27 mars 2026 et d’appliquer les mesures adoptées à partir du 27 septembre 2026. Avant cette transposition en droit national, elle n’aura pas d’effet direct sur les activités des entreprises. Toutefois, il est important de garder à l’esprit le fait que de nombreuses pratiques commerciales qui ne sont pas conformes à la nouvelle directive peuvent être considérées comme trompeuses et dès lors illégales en vertu de la législation actuelle. On rappellera à cet égard l’existence de lignes directrices sur les allégations environnementales adoptées par le SPF Économie en juin 2022 qui, bien que non contraignantes, visent à interpréter les articles VI.93 à VI.100 du Code de droit économique relatifs à l’interdiction des pratiques commerciales déloyales trompeuses et les appliquer aux pratiques de greenwashing.

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