Les baux de plus longue durée : un fermage majoré mais sous quelles conditions?
À l’occasion de la précédente parution, nous avions eu l’occasion d’examiner les réglementations régissant les baux convenus pour une première période d’occupation d’au moins 9 années et inférieure à 18 années. Il est renvoyé à la précédente parution à ce sujet. Le sujet d’aujourd’hui concerne les baux d’au moins 18 ans mais inférieure à 27 ans.

Abordons dès à présent les baux dont la première période d’occupation est fixée, par les parties, à raison de 18 années au moins tout en étant inférieure à 27 années. Le bail de 27 ans, dit de longue durée, reçoit en effet un régime propre et bien particulier. Nous l’examinerons à l’occasion de la prochaine parution.
Un bail écrit, gage de sécurité
Il est assez rare qu’un bail d’une durée supérieure à 18 années ne soit pas écrit. Un tel arrangement suppose généralement la rédaction d’un bail écrit. Ceci étant précisé, il se peut qu’un bail de 18 années au moins soit oral. La difficulté est alors d’apporter la preuve de la durée de la première période d’occupation, en cas de difficultés / contestations. On rappellera que l’ancien article de la loi sur le bail contenait ceci : « À défaut de pareil écrit, celui qui exploite un bien rural pourra fournir la preuve de l’existence du bail et de ses conditions par toutes voies de droit, témoins et présomptions compris ». Bien qu’il ait été reformulé / remanié à la suite de l’apparition de la nouvelle législation dès 2020, il semble pouvoir être considéré que l’existence du bail et ses conditions puissent encore être établies par toutes voies de droit.
Concernant le fermage, on ne fait pas ce que l’on veut
Si le bail est écrit, il pourra être rédigé par un acte sous-seing privé ou par un acte notarié. La distinction est d’importance eu égard à la majoration éventuelle du fermage. Il est en effet fréquent que, si une période de 18 ans au moins ait été convenue par les parties, c’est notamment en raison, du point de vue du bailleur à tout le moins, de la possibilité de la perception d’un fermage majoré.
Chacun sait que la question des fermages en matière de bail à ferme est réglementée : on ne fait pas ce que l’on veut. Il est référé, à ce sujet, à la loi du 4 novembre 1969 sur la limitation des fermages, telle que modifiée par celle du 7 novembre 1988, de même qu’au décret wallon du 20 octobre 2016 limitant les fermages. Le décret du 2 mai 2019 modifiant la législation en matière de bail à ferme contribue également à la réglementation en matière de fermage.
La majoration sous conditions
– (2) le bail doit avoir une durée minimale de 18 ans. Cette durée sera donc, pour ce qui concerne l’objet de la présente parution, d’au moins 18 ans, sans toutefois pouvoir atteindre 27 ans.
– (3) le bail authentique doit constater une première période d’occupation. Pour reprendre les termes d’une doctrine récente (littérature juridique scientifique), « une majoration ne peut être appliquée au bail de longue durée consenti à un preneur qui ne se trouve pas en première période d’occupation. Dans ce cas, la concession d’un tel bail requiert la résiliation préalable du bail en cours et l’indication non équivoque de la volonté des parties » (E. Beguin & A. Caprasse, Le Bail à Ferme et droit de préemption, Larcier, 2020, p. 195).
Ces conditions toutes remplies, le fermage pourra légalement être majoré. La question est maintenant de savoir de combien…
La réponse dépend de la durée convenue et de la nature du bien loué. On peut résumer la chose de la façon suivante :
– bail de 18 ans : majoration de 36 % pour les terres et 18 % pour les bâtiments ;
– bail de 21 ans : majoration de 42 % pour les terres et 21 % pour les bâtiments ;
– bail de 24 ans : majoration de 48 % pour les terres et 24 % pour les bâtiments ;
– bail de 25 ans ou plus : majoration de 50 % pour les terres et 25 % pour les bâtiments.
La possibilité d’une exonération fiscale
Il sera encore précisé que les baux de 18 ans au moins, convenus par acte authentique constatant une première période d’occupation (conditions identiques à celles relatives à la majoration du fermage reprises ci-dessus), peuvent donner suite à des avantages fiscaux pour les bailleurs dans le sens d’une exonération fiscale des revenus des biens immobiliers ruraux donnés en location. Il est renvoyé, à ce sujet, à la loi sur le bail à ferme et au Code de l’Impôt sur les Revenus (C.I.R.).
avocats au Barreau de Tournai