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Doc Shot incomplet sur les faux laits

Ce jeudi 16 mai à 22h30, sur La Une, la Rtbf nous présenta un film sur la poudre de lait réengraissée à l’huile végétale. Le sujet était très intéressant, mais il comportait quelques imprécisions. Erwin Schöpges de Fairebel, grand défenseur des producteurs laitier, nous révélait que, depuis quelques années, l’industrie transformatrice réengraissait du lait écrémé avec principalement de l’huile de palme à destination de l’Afrique où cette pratique, interdite chez nous, est permise.

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Première imprécision ; ce n’est pas que depuis quelques années que ce commerce existe mais bien depuis plus de 30 ans. Deuxième imprécision ; ce n’est pas du lait écrémé qui est réengraissé mais bien du LEP. Qu’est le LEP ? Dans le jargon industriel, le LEP est du lait écrémé oui, mais du Lait Écrémé Pauvre. C’est-à-dire du lait écrémé sans caséine. C’est du lait écrémé qui ne contient que de la protéine sérique. Le lait qui contient la caséine, appelé « lait présure » par l’industrie, reste dans nos pays riches.

Quand l’artisan fait du fromage, après caillage et tranchage du caillé, il se libère un jus appelé lactosérum, c’est la protéine soluble, soit un cinquième de la protéine du lait. Pendant des siècles, ce lactosérum fut donné aux cochons et, depuis 30 ans, on le vend aux Africains. L’industrie transformatrice, par ultrafiltration, sépare le lait à protéines nobles de celui à protéines solubles.

Ce dernier est du lait et en a le goût, mais c’est du lait écrémé pauvre, ce fameux LEP, commercialisé à 3cents/litre quand les producteurs vendent leur lait départ ferme à 40-45 cent/litre. On ajoute de l’huile végétale bas de gamme à ce liquide sérique. Cet ersatz permet de faire du profit en concurrençant et détruisant déloyalement la production locale africaine. L’industrie arrive à faire de l’argent sur le dos de la misère, c’est honteux !

Je me souviens, dans les années 90, qu’un Africain était venu visiter la ferme. Déjà, il se plaignait de la concurrence déloyale de l’Europe qui envoyait, dans son pays, ses poules pondeuses réformées, dont personne ici ne voulait consommer la chair maigre, vidée de toute substance. Elles coûtaient moins chers que la production locale. Ce visiteur en avait goûté, il n’aimait pas et préférait le poulet bicyclette comme il disait. C’était plus cher mais bien plus savoureux. Pourquoi bicyclette ? Faites avec vos mains le mouvement des pattes d’un poulet local qui court autour des cases et vous comprendrez. Ce type de poulet est une référence dans ces pays !

L’Afrique est la poubelle alimentaire de l’Europe ! Et elle paye pour avoir ces déchets, ce qui, honteusement, augmente encore le PIB de nos pays industrialisés.

Mais revenons à notre documentaire… Celui qui avait un peu honte quand on le voyait, accompagné d’un garde du corps pour le protéger, contrôler un magasin, c’était Momar Ndao, le président de l’association des consommateurs du Sénégal. On le comprenait mal mais il disait textuellement : « … on a pris les valeurs ajoutées importantes dans le lait pour faire du fromage, du beurre, etc. Ce qui va rester, c’est un peu de lactosérum. Maintenant, c’est investi avec de l’huile de palme, des choses comme ça. Le Sénégal, pour lui, il achète du lait, pour lui ce n’est pas du lait réengraissé ! Donc voilà, tant que ça semble être du lait et que ça coûte moins cher, ils achètent ! Il ajoute : nous n’avons pas à être la poubelle de l’Europe ! »

Il a raison ! Honte à nous ! Et merci à la Rtbf pour ce documentaire révélateur.

Lu vî Gustave

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