2024, une année en demi-teinte pour les filières bio
C’était une première en 2023, mais le phénomène s’est répété en 2024… Une nouvelle fois, le nombre de ferme bio et la superficie qui leur est dédiée ont reculé en Wallonie. Toutes les filières ne sont cependant pas logées à la même enseigne ; certaines affichant une belle progression. Et ce, d’autant que la situation ne résulte pas uniquement de déconversions…

Au 31 décembre 2024, la Wallonie recensait 1.988 fermes sous contrôle bio (100 % bio ou mixte bio-conventionnel), soit 15,5 % des exploitations régionales. L’an dernier, pour la seconde année consécutive, ce nombre a reculé, suite à la perte de 26 fermes (-1,3 %). Comment expliquer cela ? Le nombre de nouvelles entités créées n’a pas compensé les arrêts, que ce soit par déconversion ou pension du chef d’exploitation, détaille Ariane Beaudelot, auteure du bilan annuel dédié à ce mode de production publié mi-mai par Biowallonie, la structure d’encadrement du bio.
Notons toutefois qu’en dix ans, 701 nouvelles exploitations ont fait le choix de l’agriculture biologique (figure 1).
La surface agricole utile (SAU) consacrée au bio suit la même tendance et recule de 1,9 % (-1,2 % en 2023). La SAU sous contrôle bio atteint 90.583 ha (- 1.792 ha), soit 12,3 % de la SAU totale wallonne (figure 1). Sur ce total, près de 5.050 ha sont en cours de conversion. Depuis fin 2010, les surfaces bio ont été multipliées par deux dans notre région.
Ajoutons encore que la surface agricole moyenne d’une ferme bio est de 45,6 ha, soit environ 13,5 ha de moins que la moyenne wallonne.
Les fruits et légumes confirment leur bonne forme
Après avoir chuté de 9 % en 2023, les cultures légumières rebondissent du même pourcentage. Cela représente un gain de 211 ha, pour un total de 2.664 ha, soit une superficie similaire à 2021 et 2022 mais aussi une multiplication par quatre, en dix ans, de la surface dédiée. Sans surprise, les légumes qui occupent le haut du classement en termes de superficie sont le pois et le haricot, destiné à l’industrie. En troisième position figure la carotte. Biowallonie note également que la culture de plantes condimentaires, aromatiques et médicinales se porte très bien. Certes, ces espèces n’occupent que 96 ha mais il s’agit d’un véritable bond de 51 ha entre 2023 et 2024.
Les surfaces légumières bio wallonnes se répartissent comme suit : province de Liège (31 %), Brabant wallon (26 %), Hainaut (20 %), provinces de Namur (19 %) et Luxembourg (3 %).
Du côté des cultures fruitières, un nouveau progrès est enregistré (+ 115 ha, soit +13 %). Il s’explique par l’importante demande des consommateurs, couplée à une offre insuffisante. Les vergers et vignobles bio, qui occupent une surface totale de 1.023 ha, se trouvent principalement en province de Namur (41 %). Derrière, on retrouve la province de Liège (23 %), le Hainaut (14 %), le Brabant wallon (14 %) et la province de Luxembourg (8 %).
Les vergers bio sont majoritairement dédiés à la production de pommes et poires. Mais on retrouve aussi des cerisiers, pruniers, pêchers, abricotiers et kiwaïs. Avec, note Biowallonie, un intérêt croissant pour les vergers haute-tige, plantés comme diversification des fermes et/ou en vue d’aménager des parcours extérieurs et prairies. Quant à la production de raisins bio, elle se développe fortement, avec 27 nouveaux ha l’an dernier, pour un total de 259 ha. La filière « raisin » regroupe 67 agriculteurs, dont 53 s’orientent vers la transformation en vin tandis que les autres ont opté pour la production de raisin de table.
La production de semences et de plants progresse (+ 8 %) pour atteindre 651 ha. Selon Biowallonie, 578 ha sont utilisés pour la multiplication de semences, 44 ha pour la production de plants de pommes de terre et 29 ha pour la production de plants (légumes, fruits ou d’ornement). Ariane Beaudelot rappelle combien le développement de cette filière est crucial tant il permet aux producteurs de s’approvisionner en Wallonie et non au sein d’autres régions ou pays.
Les jachères, engrais verts et parcours extérieurs enregistrent une chute de 12 % et plafonnent à 1.070 ha.
Enfin, les cultures non alimentaires (lin et chanvre textile, sapins de Noël, houblon…) atteignent 112 ha (-8 %) après avoir connu une fulgurante ascension de 38 % en 2023.
Les bovins laitiers souffrent davantage que les viandeux
Au cours de l’année 2023, le nombre d’animaux bio a fondu de 12 %, toutes espèces confondues. Il s’agit de la seconde année consécutive que ce phénomène se produit. Avec un problème majeur : les fermes bio ont besoin d’effluents d’élevage bio, eux aussi. Or, sans animaux, pas d’effluent…
Cette baisse trouve son origine dans l’épidémie de fièvre catarrhale ovine qui a fortement touché les ruminants en Wallonie l’an dernier mais aussi dans la déconversion de certains éleveurs.
En perte de vitesse depuis 2021, le nombre de bovin bio a connu un nouveau recul en 2024. Il atteint 100.246 têtes. Trois quarts des animaux sont élevés dans les provinces de Luxembourg et Liège.
Après être reparti à la hausse en 2022 et 2023, le nombre de vaches allaitantes s’inscrit dans une tendance inverse. Il fléchit de 0,9 % par rapport à 2023, pour atteindre 26.080 animaux.
La filière laitière s’affaiblit quelque peu pour la seconde année consécutive. La Wallonie compte 459 vaches laitières bio en moins par rapport à 2023, soit un recul de 2 % (18.847 têtes au total). Cette baisse ne fait pas les affaires des transformateurs. Ariane Beaudelot souligne, en effet, que les laiteries sont à la recherche de producteurs bio.
Le porc bio s’écroule !
La filière porcine souffre d’un manque de rentabilité chronique, ce qui se traduit dans la grande fluctuation des chiffres d’une année à l’autre. Ainsi, elle a progressé en 2020 et 2021, s’est un peu tassée en 2022, est repartie à la hausse en 2023 (+22 %) mais s’est littéralement écroulée en 2024 (-48 %).
Seuls 9.378 porcs gras ont été commercialisés, contre 18.586 un an auparavant. En parallèle, le nombre de truies reproductrices a fléchi de 12 % (-34 % en deux ans, 736 truies recensées), induisant automatiquement des complications au niveau de l’engraissement.
Les porcs bio wallons sont élevés majoritairement en Hainaut (43 %) et province de Luxembourg (39 %). À noter : la Wallonie compte 52 éleveurs de porcs bio, soit une perte de 20 éleveurs en un an.
Poules pondeuses : la seule filière en croissance
Après des années de forte croissance et une certaine stabilité affichée en 2022, le nombre de poulets de chair commercialisés a fortement fléchi en 2023 et ne s’est pas écarté de cette tendance en 2024 : -13 %. 470.000 poulets de moins ont été commercialisés l’année dernière, pour un total de 3.112.000 unités. Biowallonie évalue cette baisse à 26 poulaillers (4.200 places chacun).
La moitié des poulets bio a été élevée dans la province de Namur. Suivent les provinces de Luxembourg (27 %) et de Liège (14 %).
En 2023, la filière poules pondeuses s’affaiblissait pour la première fois depuis 2009. La tendance s’est inversée en 2024, avec un gain de 35.482 pondeuses (+10 %). Elle comptait, fin de l’année dernière, 404.572 animaux et est, surtout, la seule à croître. Les 112 élevages sont répartis sur l’ensemble de la Région mais sont principalement présents en provinces de Namur (38 %), de Luxembourg (25 %) et dans le Hainaut (21 %).
Le nombre de poulettes futures pondeuses s’élevait à 141.307 (-38 %, un véritable problème pour l’approvisionnement des poulaillers !). Seuls trois élevages bio sont recensés.
Moins de moutons et chèvres