À Saint-Hubert, une célébration des filières agricoles et de leurs artisans du goût
Alors que les filières d’élevage doivent affronter de multiples défis (pressions économiques, crises sanitaires, remise en cause sociale de leurs pratiques), la Province de Luxembourg a choisi de réaffirmer son engagement auprès des producteurs locaux. À travers un double concours, elle a mis en lumière deux produits emblématiques de son terroir : la viande de Blanc Bleu Belge et le fromage frais de chèvre au lait cru. Les noms des lauréats ont été dévoilés le 24 juin dernier, au pied de la basilique de Saint-Hubert, à « La Fratrie », une friterie tournée vers l’approvisionnement en circuit court.

Depuis plusieurs années, la Province de Luxembourg déploie une politique agricole articulée autour de plusieurs axes : accompagnement technique aux exploitations, soutien à la diversification, aide à la transition agroécologique, et mise en réseau des filières locales. Malgré les bouleversements liés à la réforme des institutions provinciales, les moyens alloués à l’agriculture ont été maintenus, voire renforcés.
Un engagement agricole structurant pour le territoire
« Ce n’est pas nouveau, mais c’est confirmé, l’agriculture est notre priorité », a rappelé la députée provinciale à l’Agriculture, Coralie Bonnet, devant la presse. Elle a aussi souligné le rôle essentiel joué par les partenaires de terrain, à l’instar du CER, du centre de Michamps, ou de la coopérative Agrinew, qui participent activement au soutien des producteurs à travers le conseil, la transformation ou la mise en marché.
À ce socle d’accompagnement vient s’ajouter un programme ambitieux en matière d’alimentation durable. « Grâce à la cellule provinciale dédiée, la Province a accompagné la transition de plus de 12.000 repas scolaires quotidiens, désormais constitués majoritairement de produits locaux, durables et de saison » a souligné la députée provinciale. Le site « TerroirLux », régulièrement mis à jour, facilite les mises en relation entre producteurs, cantines, commerces et consommateurs.
Un concours pour redonner sa place à la viande BBB
Après avoir mis à l’honneur le beurre, le yaourt et plus récemment la glace artisanale au lait de ferme, la Province poursuit sa dynamique de valorisation des produits locaux avec une filière aussi traditionnelle que fragilisée : la viande bovine de race BBB.
Ce choix n’est pas anodin. Il répond à une triple ambition : rendre visible le travail exigeant et passionné des éleveurs, encourager les circuits courts dans un contexte de raréfaction du cheptel et de volatilité des prix, et rappeler le rôle central de l’agriculture dans l’équilibre économique, social et culturel du territoire.
La filière bovine, confrontée depuis plusieurs années à des crises sanitaires comme la FCO, ou à des mises en cause idéologiques liées aux questions climatiques et sociétales, subit une pression croissante. Pourtant, les attentes des consommateurs évoluent. Un intérêt renouvelé se manifeste pour des viandes de qualité, traçables, issues de pratiques transparentes et locales. Le concours provincial s’inscrit dans cette tendance. II devient un outil de reconnaissance, mais aussi un levier de promotion pour les éleveurs qui ont fait le choix d’une production responsable.
Une sélection rigoureuse, une évaluation exigeante
Parmi les quelque 90 éleveurs de bovins commercialisant leur viande en circuit court et recensés sur « TerroirLux », 22 élèvent spécifiquement du Blanc Bleu Belge. Huit d’entre eux ont pu relever le défi malgré les contraintes du calendrier, les impératifs d’abattage ou encore les aléas de préparation des colis.
La dégustation, organisée le 21 mai à Forrières, s’est déroulée dans une école provinciale disposant d’infrastructures adaptées. Le jury, présidé par Philippe Bouillon, président de la Fédération belge des bouchers, a été impressionné par l’homogénéité qualitative des pièces présentées. Couleur, tendreté, jutosité, intensité aromatique : autant de critères qui ont permis de départager les participants dans un climat de rigueur et de bienveillance.
Les membres du jury reflétaient la diversité des acteurs de la filière : chefs de collectivités, restaurateurs, responsables de structures locales, producteurs, consommateurs avertis.
Le fromage de chèvre, un artisanat en quête de reconnaissance
En parallèle, le concours consacré au fromage frais de chèvre au lait cru a permis de révéler la richesse et la singularité d’une filière encore discrète, mais en plein essor. Sur les 15 chèvreries actives recensées en province, huit ont présenté un produit, malgré des freins d’ordre administratif, sanitaire ou organisationnel.
Là encore, la diversité des textures, des équilibres salins et des profils aromatiques a été saluée. Les producteurs, souvent issus de petites structures, ont exprimé leur volonté de faire reconnaître leur savoir-faire, de faire goûter leur production et de construire, à leur échelle, un modèle de proximité.
Dans un marché dominé par des fromages standardisés, ce concours joue un rôle de vitrine et de tremplin pour ces artisans souvent isolés, mais porteurs d’une vision cohérente : produire bon, propre, local et humain.
Un événement fédérateur, entre exigence et convivialité
La cérémonie a également été l’occasion de saluer le travail discret mais déterminant des équipes de la Province, en charge de la logistique, de la collecte des produits dans le respect de la chaîne du froid, de la communication et du bon déroulement des concours.
En clôture, la députée a rappelé que ce type d’initiative n’a de sens que si elle se prolonge dans le temps et dans les actes. « Faire rayonner nos produits, c’est aussi faire exister notre ruralité au-delà des clichés. C’est affirmer qu’ici, dans la Province de Luxembourg, nous avons des hommes, des femmes, et des savoir-faire qui méritent toute notre reconnaissance ».