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Les acariens : un climat chaud et sec, idéal pour leur développement

Les acariens tétranyques, dont Tetranychus urticae, s’en prennent fréquemment aux concombres, melons et fraises en serres maraîchères. Si leurs attaques sur d’autres fruits et légumes, comme la tomate, sont moins fréquentes, lorsqu’elles surviennent les dégâts peuvent être impressionnants. Lors d’étés chauds et secs comme celui de cette année, nous constatons l’extension de leurs populations également en plein air. Différentes cultures peuvent en être victimes.

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Les acariens se dispersent lentement et de proche en proche d'une plante à l'autre. Ils sont facilement transportés par le vent, les animaux, les vêtements... De la sorte, ils se développent généralement, au départ, par foyers. Ce foyer commence par une plante et quelques voisines puis s’étend progressivement.

Une centaine d’œufs sur une vie

Les acariens passent par plusieurs stades : l’œuf, le stade larvaire à 6 pattes, le stade nymphal protonymphe, le stade nymphal deutonymphe immobile et puis le stade adulte.

La femelle de tétranyque tisserand pond environ 6 œufs par jour, soit une centaine sur sa vie. Le cycle de développement demande 23 jours à 15°C et 4 jours à 32 °C. Les conditions météo de cet été sont, dès lors, idéales pour cette espèce.

Plusieurs espèces se rencontrent dans nos serres à côté du tétranyque à deux points ou tétranyque tisserand (Tetranychus urticae) : une araignée rouge (Tetranychus cinnabarinus), l’acarien de la tomate (Aculops lycopersici) et d’autres espèces.

Les acariens tétranyques développent leurs populations en face inférieure des feuilles et sont favorisés par des températures élevées, plus de 30°C et une faible hygrométrie.

Une décoloration du feuillage

Le plus souvent, ce sont les taches chlorotiques (jaunissement) sur les feuilles qui attirent notre attention. En observant la face inférieure de la feuille à l’aide d’une loupe, nous voyons les bestioles. Nous pouvons trouver simultanément des œufs, des larves, des protonymphes, des deutonymphes et des adultes. Ce sont les piqûres en face inférieure de la feuille qui provoquent la décoloration des deux faces sur la zone couverte par la population d’acariens. Ces derniers se nourrissent en perçant les feuilles ou les tiges de leurs pièces buccales et en suçant le contenu cellulaire. Les cellules végétales évidées prennent alors une teinte jaune.

Les populations sont protégées par la toile produite par les individus eux-mêmes en cas de pullulation. Lors d’été comme celui de cette année, nous constatons des dégâts sur toutes les solanacées et les cucurbitacées de serre.

Notons que le tétranyque tisserand est le plus fréquent, on le retrouve aussi en plein air notamment sur la betterave potagère, le maïs doux, des adventices, le fraisier, le haricot ou l’oignon.

Différentes méthodes de lutte

La lutte inclut des mesures prophylactiques, d’entretien et correctives.

Celle-ci commence par une bonne élimination des déchets de culture en fin d’été ou début d’automne ainsi qu’un bon nettoyage des parois, piquets, supports en fin de saison. Elle se complète par une surveillance des plants qui entrent dans la serre au printemps. Le nettoyage permet de limiter les risques de garder un foyer d’une année à l’autre. Le contrôle des plants à l’arrivée permet, lui, de s’assurer que ceux-ci ne soient pas porteurs d’individus pouvant installer un début de colonie.

Dès l’implantation d’une nouvelle culture, la lutte contre les tétranyques commence par une surveillance attentive des plantes pour repérer le plus rapidement possible la présence des populations qui s’installent. Les débuts des populations sont souvent repérés d’abord dans les zones les plus chaudes des serres maraîchères.

Préventivement pour la saison culturale suivante, une bonne hygiène de serre permet de réduire les foyers de survie sur les débris végétaux, les tiges creuses, les raccords de tuyauteries, etc. Nous reviendrons sur cet aspect de l’hygiène de serre dans quelques semaines.

Introduire des prédateurs

Il est possible d’apporter des acariens prédateurs qui jouent efficacement le rôle d’auxiliaire. Différents prédateurs sont efficaces  comme : Ambyselius californicus et Phytoseiulus persimilis, la cécidomyie Feltiella acarisuga et la punaise Macrolophus caliginosus. Ils doivent être présents afin de pouvoir s’étendre, mais ce n’est pas évident. Des lâchers et certaines mesures sont à envisager.

Cette lutte par introduction de prédateurs est efficace en serre, elle peut s’étendre en plein air au départ de la serre dès que la température extérieure devient favorable. Il existe plusieurs familles. Les phytoséiides (les typhlodromes) sont très présents en serres maraîchères et en plein air. Les typhlodromes prédateurs ont une forme de poire et sont d’une taille comparable à celle des tétraniques phytophages. Leur couleur est semblable. Les femelles adultes hivernent sur les plantes, sous les pierres, sous les écorces, dans les bourgeons, souvent à proximité de populations d’acariens phytophages dont elles mangent les œufs et les larves et régulièrement à l’abri de la lumière. La présence de végétaux ligneux ou de zones refuges à proximité de la parcelle est donc essentielle.

Plusieurs autres familles importantes peuvent être rencontrées chez nous. Parmi elles, les stigmaeides, les anystides et les trombidiides se nourrissant des œufs et larves de tétranyques et d’autres acariens, de thrips et de cicadelles à tous les stades. Ils sont moins présents sur les cultures maraîchères, toutefois nous les trouvons sur les végétaux ligneux (petits fruitiers, haies, etc.)

Les chrysopes possèdent également une action intéressante sur les populations d’acariens phytophages. Bien connus des pucerons, ils sont très mobiles et jouent un rôle important.

Les punaises mirides sont aussi des prédateurs actifs des acariens en cultures maraîchères. Dicyphus errans est présente sporadiquement, Macrolophus pygmaeus se maintient sous abris de serre.

L'aubergine est une plante fréquemment envahie  par les acariens phytophages.
L'aubergine est une plante fréquemment envahie par les acariens phytophages. - F.

Le bassinage pour réduire l’extension des populations

Il existe des produits homologués en culture conventionnelle, sur quelques cultures seulement, sous serre. La lutte chimique est difficile à mener. D’une part les acariens se trouvent en faces inférieures des feuilles et ils se protègent de leur toile. D’autre part, leur multiplication rapide est favorable à la sélection de souches résistantes. Enfin, la lutte risque de limiter l’action des prédateurs si elle n’est pas bien ciblée. Pour plus d’infos, il faut se rendre sur www.fytoweb.be .

Au niveau de la lutte physique, nous trouvons souvent des notes techniques recommandant de bassiner le feuillage pour réduire l’extension des populations d’acariens phytophages en cours de culture.

Ce contrôle physique, qui donne certains résultats, consiste à brumiser de l’eau sur le feuillage pour augmenter l’humidité relative à quelques moments de la journée. Cela réduit sensiblement la ponte par les femelles, sans toutefois l’arrêter. Retenons que le bassinage des feuilles a un effet dépressif certain sur les phytophages sans toutefois suffire à les éradiquer.

Un équilibre dans la serre maraîchère

La lutte doit être réalisée sur le moyen terme. Elle passe par la diversité floristique pour maintenir des populations nombreuses de prédateurs sur place et par le nettoyage des structures de la serre durant la période hivernale. Ces deux démarches sont quelque peu contradictoires en apparence. Le principe est de maintenir une faune diversifiée sur les végétaux en vue d’une colonisation ultérieure de la culture, avec une certaine réserve de phytophages et de leurs prédateurs. On laisse le moins possible de débris végétaux abandonnés de la culture elle-même en fin de saison estivale et on nettoie les supports. Les débris peuvent être broyés et enfouis légèrement dans le sol où la faune naturelle réduit très efficacement les risques de recolonisation. Ces débris peuvent aussi être emmenés hors de la serre.

Le fait de garder des cultures semi-ligneuses ou ligneuses dans la serre durant la période hivernale (quelques framboisiers ou quelques fraisiers par exemple) peut être une démarche intéressante quand les prédateurs se sont bien installés au préalable. Ces végétaux les aident à maintenir une certaine population sur place au printemps. A suivre de près.

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