Accueil Droit rural

Un congé pour le motif d’exploitation personnelle : à notifier dans les délais

La présentation des critères légaux de validité d’un congé pour le motif d’exploitation personnelle se termine par la précision des délais durant lesquels le congé doit être envoyé.

Temps de lecture : 5 min

Terminons ce tour d’horizon des critères légaux de validité d’un congé pour le motif d’exploitation personnelle. Après les critères de fond et de forme et les règles relatives aux modes d’envoi, abordés à l’occasion des précédentes parutions, on s’attardera enfin aux délais de notification. Quiconque pratique la matière sait l’importance que la loi accorde au respect des délais. Une erreur peut coûter cher, si bien qu’il est « prudent d’être prudent ». D’emblée, il convient de préciser qu’ici, tout est « au cas par cas » : selon la durée du bail, sa date de prise de cours, sa forme, les dispositions transitoires de la réforme de 2020, on peut, ou pas, selon le moment où on se trouve, notifier un congé. Chaque cas présente ainsi ses propres spécificités. Certaines grandes lignes peuvent cependant être ici exposées.

Un délai de préavis variable, au choix du bailleur…

En présence d’un bail de moins de 27 ans, il faut distinguer selon que la date en est à sa première, seconde ou troisième période.

Si le bail en est à sa première période, le congé doit être notifié pour l’échéance de la période en cours, ce qui signifie que le congé sera effectif à l’échéance de la période en cours. Se pose alors la question du délai de préavis et, par voie de conséquence, le moment où il faut adresser le congé. Il faut en effet distinguer le moment d’effectivité du congé (= le jour où les terres deviennent disponibles) du délai de préavis (combien de temps, avant le moment de l’effectivité du congé, faut-il notifier le congé ?).

Pour la première période du bail, le congé doit être notifié entre 4 ans et 2 ans avant l’échéance de la période. Le délai de préavis est donc variable, au choix du bailleur qui notifie le congé, pour autant naturellement que le congé soit notifié entre 4 ans et 2 ans avant l’échéance de la période.

Un exemple : un bail de 9 ans prend cours le 1er  janvier 2020. Sa première période s’achèvera donc, en règle, le 31 décembre 2028. Cette dernière date constitue l’échéance de la période. Le congé doit être notifié entre 4 ans et 2 ans avant le 31 décembre 2028, donc entre décembre 2024 et 2026.

… de 4 ans au plus et 2 ans au moins

Le même mécanisme de réflexion prévaut lorsque, pour l’échéance de la première période de bail, le congé n’a pas été notifié et que le bail vit donc sa seconde période d’occupation. Le congé doit, aussi, être rendu effectif pour l’échéance de la seconde période. Il doit, aussi, observer un délai de préavis de 4 ans au plus et 2 ans au moins.

Reprenons notre exemple précédent. Si le bailleur n’a pas notifié de congé pour le 31 décembre 2028, le bail entamera sa seconde période d’occupation de 9 ans qui s’achèvera le 31 décembre 2037. Un congé peut être notifié pour l’échéance du 31 décembre 2037, entre décembre 2033 et décembre 2035.

Une troisième période aux conditions différentes

À partir de la troisième période de bail, la loi prévoit que le congé peut être notifié à tout moment, ce qui suppose qu’il ne faudra pas attendre l’échéance de la troisième période pour rendre un congé effectif. En pareille hypothèse, le congé doit observer un délai de préavis de 4 ans au plus et 3 ans au moins.

Revenant à l’exemple précité, si le congé n’est pas notifié pour l’échéance 2037 et que le bailleur souhaite notifier congé en 2040, il le peut, en laissant au preneur en place un délai de préavis de 3 ans au moins et 4 ans au plus. Le bail pourrait ainsi prendre fin en 2043.

Un préavis de 3 à 4 ans pour un bail de 27 ans

La situation est quelque peu différente en présence d’un bail de longue durée, soit un bail de 27 ans au moins au sens de l’article 8§2 de la loi sur le bail à ferme. La période fixe de 27 ans, par exemple, ne constitue évidemment pas 3 périodes de 9 ans mais constitue une seule et unique période de 27 ans. Le congé ne peut donc être notifié que pour l’échéance des 27 ans, moyennant un délai de préavis de 3 ans au moins et 4 ans au plus, donc entre la 23e  et la 25e  année de la période fixe. Il est rappelé que, selon la nouvelle législation, après le bail de 27 ans, prend cours une seule et dernière période de 9 ans.

Voilà, en substance, et pour essayer de faire simple, les quelques grandes règles qui se dégagent de la loi sous l’ange du « temps » pour notifier un congé pour le motif d’exploitation personnelle. Les délais de préavis sont repris à l’article 11 de la loi sur le bail à ferme, qui fonctionne via un système de renvoi aux dispositions légales propres à chaque (type de) période : article 7 et 8 de la loi.

Il est plus que vivement conseillé de se faire assister sur la question parce que, selon le cas, les situations peuvent varier… La présence de baux oraux ou les cessions privilégiées éventuellement notifiées ont aussi une incidence sur l’alignement des périodes, ce qui complexifie parfois encore davantage les situations…

Henry & Louise Van Malleghem,

avocats au Barreau de Tournai

A lire aussi en Droit rural

Voir plus d'articles