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Les pommées et batavia! Incontournables parmi les laitues

Dans les fermes diversifiées, les laitues sont proposées toute l’année avec une demande accrue dès le printemps et en fin d’année pour les fêtes.

Temps de lecture : 7 min

Les laitues ne font pas exception. Elles font partie des cultures classiques des petites fermes maraîchères alors que de grandes exploitations spécialisées fournissent criées et 4e gamme.

Plusieurs types de laitues sont proposés, nous nous penchons aujourd’hui sur les laitues pommées et les laitues batavia.

Très exigeantes

Elles sont sensibles aux défauts de pH : 6,5 à 6,8 est un niveau conseillé. L’enracinement est très sensible aux défauts de structure et surtout aux défauts de drainage. Comme la culture est plantée et non plus semée en place, cela réduit considérablement les possibilités de développement de la racine pivotante typique de l’espèce.

Plus la rotation est longue, mieux se comporte la culture (sensibilité de l’enracinement à la fatigue de sol). De même, les sols à haute teneur en carbone (3,5-4 %) conviennent très bien à la production de laitues par la stabilité structurale et la nutrition minérale permise par la minéralisation (voir plus loin).

Produire ses plants, c’est possible !

De nombreux maraîchers commandent les plants à des éleveurs spécialisés. Mais rien n’empêche le maraîcher de produire ses plants, c’est une question d’organisation du travail et du coût de transport des lots de plants en fonction de leur taille.

Le terreau pour l’élevage des laitues est de faible conductivité électrique (moins de 1mS/cm) et de pH proche de la neutralité. Attention : à ne pas le confondre avec du terreau enrichi destiné aux tomates ou concombres.

Le choix variétal est large, avec des formes en couleurs riches.
Le choix variétal est large, avec des formes en couleurs riches.

Nous semons directement des graines en mottes pressées de 3,5 cm. Les semences peuvent être enrobées, pelliculées ou nues. Les deux premières présentations germent le mieux et conviennent aux semis de précision. La température est réglée à 15 à 20 ºC en évitant les températures supérieures à 20ºC qui inhibent la germination. Nous pouvons faire passer les mottes en enceinte climatisée deux jours ou poser des plaques isolantes sur les mottes les deux premiers jours. L’élevage jusqu’au stade 5 feuilles juvéniles dure 19 jours de mai à août et 45 jours de novembre à janvier, avec une durée intermédiaire lors des autres mois.

En fin d’été pour la culture d’automne, pour éviter des températures naturellement élevées, nous semons dans la fraîcheur matinale, couvrons les mottes semées d’un isolant en plaques. Notons qu’au-dessus de 28ºC, la germination est mauvaise suite à l’induction d’une dormance.

Renouveau variétal

Les sélectionneurs proposent presque chaque année de nouvelles variétés, qui maintiennent bien les adaptations aux types de cultures et apportent une résistance accrue à certaines maladies et ravageurs.

Le marché local attend surtout les laitues beurre pommées et les laitues batavia américaine Iceberg. Mais des propositions de niches en Batavia européennes, laitues romaines, laitues grasses et laitues à couper sont pertinentes aussi en diversification.

En priorité, nous devons respecter scrupuleusement les périodes de l’année conseillées pour la culture, c’est-à-dire la longueur du jour permettant une bonne pommaison.

Fumure : gare aux excès !

Les exportations minérales de la laitue sont élevées. Elles sont de l’ordre de 70, 55, 240 et 25 unités N-P-K-Mg en pleine terre, moitié plus élevées sous tunnel maraîcher pour les types pommés et batavia.

L’analyse du sol avec détermination de l’azote (profondeur 0-30) est bien utile pour tenir compte de la minéralisation et ajuster le bon rapport K/N (souhait d’un rapport de 4 en hiver et de 3 en été). Les apports d’azote sont souvent très faibles, la minéralisation des matières organiques pouvant suffire.

L’excès d’azote perturbe la pommaison et favorise le Botrytis. L’excès de potasse favorise les blocages en bore et magnésium. Autant de raisons pour ne pas apporter des fumures organiques fraîches juste avant une plantation de laitues.

La culture

La préparation du sol vise un décompactage jusque 40 cm de profondeur (pas de semelle de labour ou de pseudo-labour) et une terre fine en surface.

La plantation est normalement décidée dès que les racines sortent de la motte, c’est d’ordinaire au stade 4 feuilles. Nous plantons en planche de 1,2 ou 1,5 m de largeur. La densité est de l’ordre de 12 plantes/m² sur la partie plantée des planches, à adapter aux variétés selon les recommandations des semenciers.

La croissance est rapide à 20ºC et ce d’autant que les jours sont longs, avec une forte variation selon l’adaptation aux saisons des variétés. La pommaison est nettement dépendante des exigences variétales. Les variétés à jours longs demandent des longueurs de jours supérieures à 12h et s’adaptent bien aux températures proches de 20ºC. Les variétés à jours courts pomment mieux aux températures basses. Les variétés à jours courts sont plus sensibles au risque de montaison précoce dès que les températures sont élevées et les jours plus longs.

Le pilotage de l’irrigation est un élément clé pour la réussite de la culture (voir aussi nos éditions des 21 novembre 2014, 17 avril 2015, 12 juin 2015, 10 juillet 2015, et14 avril 2017). Les apports seront de 14 mm par semaine de la plantation au recouvrement du sol (formation et ancrage des racines) et de 3 mm par jour du début pommaison à la récolte (bassinage quotidien ou deux fois par jour pour prévenir les brûlures marginales). Ces doses sont à moduler en fonction de la météo, en s’aidant de tensiomètres placés à 20 cm de profondeur.

Sous tunnel maraîcher, nous mettons un chauffage antigel réglé à 2 ou 3ºC au minimum. L’aération doit être suffisante pour ne pas dépasser les 25ºC. Ce sont les températures extrêmes. Pour optimaliser la croissance, nous pouvons affiner les réglages pour avoir entre 6 et 20ºC de températures minimum et maximum de la plantation au recouvrement du sol et entre 2 et 15 ºC du début de la pommaison à la récolte.

Crucial désherbage

Le désherbage est un point important pour le maraîcher. Sous les cahiers de charge bio, les faux-semis successifs ou suivis d’un passage au désherbeur thermique permettent de planter sur une surface relativement peu enherbée en annuelles. Le paillage plastique photo ou bio dégradable complètent la maîtrise de l’enherbement tout en nécessitant une adaptation du régime des irrigations. Le binage des passe-pieds et le sarclage complètent les interventions.

En culture conventionnelle, plusieurs produits sont homologués, voir http://fytoweb.be/fr

La laitue est sensible à la salinité en serre maraîchère. Raisonner la fertilisation et l'irrigation est  indispensable.
La laitue est sensible à la salinité en serre maraîchère. Raisonner la fertilisation et l'irrigation est indispensable. - F.

Accidents physiologiques

La nécrose marginale du feuillage (tip burn) est un accident physiologique lié au déséquilibre hydrique (salinité du sol ou sol trop froid par rapport à la température de l’air induisant une faiblesse de l’enracinement) ou minéral (rapport K/N ou K/Mg), avec une sensibilité variétale nette (inadaptation de la variété à la saison de culture).

Cette nécrose peut rester sèche (dry tip burn) ou au contraire devenir humide (normal tip burn) quand la transpiration de la plante est trop faible (manque d’aération de l’abri par exemple). Le Botrytis s’installe souvent sur de telles lésions.

Ravageurs…

Les limaces et escargots sont des ravageurs classiques en élevage et en production. Les haies mélangées sont des refuges pour les carabes auxiliaires. Les produits à base de phosphate ferrique en appâts permettent d’intervenir curativement.

Les noctuelles défoliatrices sont présentes lors des périodes chaudes : l’été 2017 fut favorable à ce ravageur attiré par les astéracées.

Ce sera sourtout en fin d'hiver et au début du printemps, alors que  les auxiliaires ne sont encore bien installés, que les pucerons  peuvent devenir envahissants.
Ce sera sourtout en fin d'hiver et au début du printemps, alors que les auxiliaires ne sont encore bien installés, que les pucerons peuvent devenir envahissants. - F.

Certaines espèces de pucerons du feuillage sont tolérées par des variétés de laitues, mais pas toutes. Les auxiliaires (syrphidés, chrysopes…) résolvent bien les surpopulations de pucerons grâce aux plantes hôtes à proximité de la parcelle.

De nouvelles variétés sont résistantes à bon nombre de souches du Brémia de la laitue. Mais face aux plus de 600 souches regroupées en 26 types, la résistance n’est pas totale. Une bonne rotation, une aération ou un chauffage matinal des abris pour réduire la durée des périodes humides, une densité de plantation comme recommandé et une fumure azotée calculée selon des analyses de sol constituent des méthodes préventives importantes.

… et maladies

Plusieurs champignons peuvent provoquer une fonte des semis ou une pourriture du collet pouvant s’étendre aux nervures principales des feuilles. Botrytis cinerea, Sclerotinia sclerotiorum et minor et Rhizoctonia solani sont les plus fréquents. Le paillage du sol et la plantation en n’enterrant la motte pressée que d’au maximum un tiers de sa hauteur permet de retarder le contact feuilles-sol. Une rotation longue améliore la situation. N’irriguer que quand le feuillage est déjà naturellement pouillé par les rosées nocturnes permet de ne pas allonger la période humide du feuillage ; ce dernier aspect concerne aussi Bremia et l’oïdium des chicorées.

F.

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